Intervention de Roger-Gérard Schwartzenberg

Séance en hémicycle du 20 novembre 2012 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoger-Gérard Schwartzenberg :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de ce projet de budget pour 2013 intervient dans des conditions assez insolites. En effet, depuis le vote de sa première partie par notre assemblée le 23 octobre dernier, le Premier ministre le 6 novembre, puis le chef de l'État le 23 novembre, ont annoncé un ensemble de mesures nouvelles qui changent la donne et risquent de rendre ce texte partiellement périmé avant même son adoption.

Chacun pressent qu'une loi de finances rectificative pour 2013 interviendra en janvier ou en février, modifiant la loi de finances initiale soumise aujourd'hui à notre vote. À certains égards, ce projet de budget présente donc un caractère temporaire ou éphémère.

Comme vous le savez, Oscar Wilde (Murmures sur divers bancs), manifestement apprécié par l'ensemble de cette assemblée, a intitulé l'une de ses comédies L'importance d'être constant. Cette règle, qu'il applique aux moeurs, pourrait sans doute s'appliquer également aux finances. D'un côté, pour redresser les comptes publics, pour réduire le déficit et la dette laissés par l'équipe précédente, le projet de budget 2013 que vous nous proposez comporte un effort fiscal accru demandé aux entreprises, à hauteur de dix milliards d'euros. Mais, d'un autre côté, le Gouvernement a annoncé le 6 novembre dernier un pacte national pour la croissance, destiné à renforcer la compétitivité des entreprises. Ce pacte comporte pour celles-ci 20 milliards de baisse de charges patronales sur trois ans, dont 10 milliards de façon effective dès la première année, en 2014 – et d'une certaine manière dès 2013.

En théorie, en effet, les entreprises continueront d'acquitter en 2013 les mêmes charges patronales qu'aujourd'hui, mais en pratique elles seront remboursées au titre de l'exercice 2013. Cet allègement de leurs charges affectera donc le produit fiscal du budget 2013, du moins a posteriori. Le budget garde le silence sur ce qui sera, à terme, une opération quasiment blanche pour le monde de l'entreprise considéré globalement : 10 milliards d'augmentation des impôts au budget 2013, puis 10 milliards de baisse ensuite au titre de ce même budget. Il n'est pas absolument sûr que ce double coup d'accordéon soit parfaitement logique.

Par ailleurs, lors de sa conférence de presse du 13 novembre, le chef de l'État a annoncé 60 milliards d'euros d'économies sur la dépense publique durant le quinquennat, soit 12 milliards par an. Mesure courageuse et nécessaire, que nous ne pouvons qu'approuver.

Pourtant, le budget 2013 qui nous est soumis semble fondé sur un autre choix. En effet, l'augmentation des impôts sur les ménages et les entreprises fournira les deux tiers de l'effort de redressement, tandis que les économies sur les dépenses publiques en fourniront un tiers seulement. Cette répartition inégale entre la hausse des impôts et la baisse des dépenses est-elle la plus opportune ? Il est permis d'en douter.

D'une part, en effet, le pourcentage des prélèvements obligatoires atteint déjà 44,9 % du PIB en 2012, et atteindra même 46,3 % en 2013, ce qui est beaucoup, et même trop.

D'autre part, la France se classe au deuxième rang des pays de l'OCDE, après le Danemark, pour le rapport des dépenses publiques sur le PIB, établi à 56,3 % ; il est donc nécessaire de dépenser moins. J'ajoute d'ailleurs, concernant la réduction des dépenses publiques, que le compte n'y est pas tout à fait – M. le ministre du budget acceptera sans doute cette analyse –, puisque le Président de la République annonce 12 milliards de réduction des dépenses publiques par an alors que, à ce jour du moins, le projet de budget qui nous est soumis, avec talent, comporte seulement 10 milliards de mesures d'économies.

Mais j'en termine par l'essentiel : nous voterons cette loi de finances, parce qu'elle stabilise, voire réduit les crédits des secteurs non essentiels, et parce qu'elle accorde à juste titre des moyens accrus aux vraies priorités, comme l'éducation ou la justice.

En dépit des quelques réserves dont j'ai pu faire état, avec une extrême modération, le groupe RRDP votera donc ce texte. Le vote du budget est, comme on le sait, l'acte d'appartenance à la majorité, ce qui ne laisse donc pas un choix excessif. (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)

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