Ce budget nous permet de répondre à deux grandes priorités : d'une part, la relance de la construction et de la rénovation de logements, par la mise en oeuvre des deux plans de relance de la construction de logements présentés en juin et août ; d'autre part, le maintien de l'effort de solidarité pour aider les ménages les plus modestes à accéder à un logement. Dans cette période difficile, il faut amplifier la production de logements pour répondre à la diversité des besoins, des situations et des territoires. Le projet de loi de finances pour 2015 comporte un ensemble de mesures au service de ces objectifs, concernant l'ensemble des maillons de la chaîne du logement.
Une première série de dispositions vise à activer la mobilisation du foncier privé, en cohérence avec les mesures déjà prises sur le foncier public. Il s'agit de l'alignement sur la fiscalité applicable aux immeubles bâtis du régime d'imposition des plus-values immobilières résultant de la cession de terrains à bâtir, de la création d'un abattement exceptionnel de 30 % de l'impôt sur le revenu, des prélèvements sociaux sur les plus-values immobilières réalisées en cas de cession de terrains à bâtir, ou encore des opérations de démolition-reconstruction adoptées en première partie du projet de loi. Il s'agit enfin de la création d'un abattement exceptionnel de 100 000 euros pour les donations de terrains effectuées d'ici à la fin de l'année 2015, à condition que ces terrains soient ultérieurement construits.
En outre, nous soutenons directement la production de logements. L'objectif de construction de logements sociaux est maintenu grâce aux crédits d'aide à la pierre, qui seront complétés par un apport d'Action Logement, le taux de TVA réduit à 5,5 % et la mobilisation du fonds d'épargne.
Je confirme, monsieur Caresche, l'objectif de construction de 150 000 logements, à raison de 7 000 en outre-mer, 8 000 au titre de la rénovation urbaine, et 135 000 en métropole bénéficiant de financements du programme 135. En outre, comme je l'ai annoncé lors du congrès de l'Union sociale pour l'habitat (USH), en septembre dernier, la mutualisation par le mouvement HLM de 300 millions d'euros permettra, dès 2015, de créer chaque année, pendant trois ans, 5 000 logements très sociaux : les super-PLAI HLM. Cette production s'ajoutera au programme de PLAI adaptés, dont le deuxième appel à projets a été lancé en mars et qui vise à créer 2 000 super-PLAI en 2014 et 3 000 en 2015.
L'investissement locatif est renforcé et assoupli, avec la possibilité offerte à l'investisseur de choisir sa durée d'engagement sur six, neuf ou douze ans. Cela contribuera à développer l'offre de logements à loyer intermédiaire dans les zones tendues, car de nombreux ménages qui ne peuvent bénéficier d'un logement social peinent à se loger dans un parc privé devenu trop cher.
L'accession sociale à la propriété ne sera pas en reste, puisque le prêt à taux zéro est prolongé jusqu'en 2017, avec un niveau d'aide en 2015 d'un milliard d'euros. Le dispositif est rééquilibré entre les différents territoires. L'objectif est d'atteindre 80 000 prêts par an.
Les 1 300 quartiers prioritaires de la politique de la ville bénéficieront, quant à eux, du taux de TVA réduit à 5,5 % pour les opérations d'accession, ce qui permettra de favoriser la mixité sociale dans ces quartiers.
Cette relance s'accompagne d'un renforcement de la solidarité intergénérationnelle. L'abattement exceptionnel de 30 % s'appliquera également aux donations de logements neufs. De même, les particuliers réalisant un investissement locatif auront la possibilité de louer leur bien à leurs ascendants et descendants. Ce dispositif suscite des débats, mais je considère que la mesure a toute sa place dans le plan de relance : c'est une manière d'aider de nombreux ménages aux revenus moyens tout en leur permettant d'accompagner leurs proches. Les logements ainsi construits libéreront des places dans le parc ancien. Les conditions de loyer et de revenus du locataire devront être respectées, et ce dernier devra appartenir à un foyer fiscal distinct du propriétaire.
Toutes ces mesures ne prendront pleinement leur sens que si elles s'accompagnent de mesures qui ne sont ni budgétaires ni fiscales, telles que la simplification des normes de construction. J'ai présenté une première vague de cinquante mesures de simplification en juin, et je souhaite en présenter une seconde avant la fin de l'année.
Par le biais de l'effort financier en faveur de la rénovation énergétique, mon ministère apporte aussi son soutien à la transition énergétique des bâtiments. Les travaux de rénovation énergétique, qui sont une source de travail pour les artisans et PME du secteur ainsi qu'une source de pouvoir d'achat pour les ménages, bénéficieront, pour les publics modestes, d'un soutien conforté de l'ANAH, ainsi que de l'augmentation du crédit d'impôt pour le développement durable transformé en crédit d'impôt pour la transition énergétique.
Je reconnais que la principale ressource de l'ANAH, très dépendante du cours d'échange de la tonne de quotas carbone, est incertaine. Le Gouvernement apportera à l'Agence des moyens complémentaires en 2015 : une hausse de 30 millions d'euros de la fraction de la taxe sur les logements vacants qui lui est attribuée, ainsi qu'une contribution exceptionnelle de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, et 50 millions d'Action Logement.
En ce qui concerne Action Logement, nous avons engagé en juin les négociations avec les partenaires sociaux pour établir sa première convention quinquennale. Après des débuts difficiles, ces discussions ont permis d'aboutir à un accord sur le montant de la contribution d'Action Logement aux politiques nationales, qui sera relevé à hauteur d'un milliard d'euros en 2016, puis de 900 millions en 2017, 700 millions en 2018 et 500 millions en 2019, pour tenir compte du pacte de responsabilité et de solidarité qui bénéficiera directement aux entreprises et aux salariés. Les échanges se poursuivent sur les autres rubriques de la convention, en particulier sur le montant et le ciblage de l'effort d'Action Logement en faveur de la production de logements, et sur l'articulation de ces dispositifs avec ceux de l'État en matière d'accession à la propriété. La convention devrait être signée d'ici à la fin de l'année.
Parallèlement, le traitement des copropriétés dégradées et la lutte contre l'habitat indigne, évoqués par Daniel Goldberg, sont renforcés conformément aux dispositions de la loi ALUR, comme en témoigne la première opération de requalification des copropriétés dégradées de Clichy. Je signerai le décret avant la fin de l'année.
Par ailleurs, j'ai souhaité simplifier, dans le dernier collectif budgétaire, les procédures d'instruction par les banques de l'éco-prêt à taux zéro, dans le but de tripler le nombre de prêts aidés.
Afin d'engager la dynamique dans tous nos territoires, le projet de loi de finances prévoit d'élargir le bénéfice du PTZ à l'achat de logements anciens dans 6 000 communes rurales qui connaissent un niveau de vacance élevé et offrent un niveau minimal de services. Cette mesure a pour objectif de relancer l'activité par des travaux de réhabilitation et de préserver l'attractivité des territoires ruraux. Estimant essentiel de parvenir à une déclinaison territoriale de la politique du logement, j'entamerai dans quelques semaines un tour de France de la construction pour faire connaître ces mesures et mobiliser l'ensemble des acteurs.
Parce que la relance de la construction est essentielle pour créer des emplois, et parce que les inégalités persistent, le budget de la mission soutient aussi l'accès au logement. La progression des crédits budgétaires de 80 millions d'euros reflète l'effort de solidarité du Gouvernement, en particulier avec la revalorisation au 1er octobre des aides personnelles au logement versées à 6,5 millions de ménages. Par ailleurs, dans un souci de cohérence et d'efficacité, l'État aura désormais la charge de la part des APL actuellement financées par la sécurité sociale. Les aides au logement représenteront désormais 11 milliards d'euros sur les 13 milliards du budget total du ministère. C'est un budget sincère et cohérent avec les prévisions de la Caisse nationale des allocations familiales.
Les aides à l'accession sont réorientées vers un dispositif de sécurisation des ménages, comportant l'attribution d'une aide en cas de chute brutale des revenus. Cette mesure d'économie doit être replacée dans la perspective du renforcement des autres dispositifs, en particulier du PTZ qui devient ainsi l'outil privilégié pour favoriser l'accession sociale à la propriété. Dans le montage d'un prêt, le PTZ apporte une meilleure solvabilité aux ménages. J'ai bien pris note des propositions de maintien de l'allocation de logement pendant la phase locative d'un PSLA ; sensible aux arguments développés, je soutiendrai les amendements en ce sens.
La politique d'hébergement devant répondre à une pression de plus en plus forte, j'ai fixé dans ma feuille de route trois objectifs. Premièrement, anticiper davantage, dans le cadre d'une politique de prévention des ruptures et de maintien dans le logement. Les procédures actuelles de prévention des expulsions locatives ne garantissent pas un accompagnement efficace, la prise en charge devant intervenir dans les tout premiers mois. Deuxièmement, inscrire nos actions dans un processus continu, plutôt que d'être contraints de réagir dans l'urgence. C'est l'objectif poursuivi par la fin de la gestion saisonnière de l'hébergement, qui nécessite un changement en profondeur de l'action sociale. Troisièmement, coordonner plus efficacement l'action des nombreux acteurs.
Les crédits de la politique d'hébergement et de logement accompagné progressent de près de 5 %. Des moyens financiers significatifs sont ainsi prévus pour la mise en oeuvre du principe de l'accueil inconditionnel des personnes sans domicile. La situation, sur ce point, est particulièrement préoccupante en Île-de-France. Le préfet de région pilote une action coordonnée qui vise non seulement à améliorer l'accompagnement des personnes hébergées à l'hôtel, mais aussi à favoriser l'orientation vers des dispositifs plus adaptés aux situations personnelles ; je pense notamment aux résidences sociales et à l'intermédiation locative. À ce titre, le développement du logement adapté, qui est une passerelle efficace vers le logement, verra ses crédits pérennisés à hauteur de 200 millions d'euros, après une progression de 30 % en 2014.
La réforme de l'asile, madame Massonneau, devrait diminuer la pression sur le dispositif d'hébergement d'urgence grâce au raccourcissement des délais d'instruction. Une autre réforme impactera le programme 177 en 2015 : la modulation de l'aide mensuelle à la place d'aire d'accueil des gens du voyage, dite ALT 2, versée aux collectivités, qui aura pour but d'inciter les gestionnaires à améliorer le service rendu. Cette aide sera désormais directement liée au taux d'occupation, conformément à la loi de finances pour 2014.
Dans un contexte de maîtrise des dépenses, ce budget est à la hauteur des objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés pour relancer la construction et aider les ménages à se loger. Les plans de relance participeront au retour de l'activité et à la création d'emplois dans les territoires, et généreront à terme des recettes fiscales.
Présidence de M. Dominique Baert, vice-président de la commission des finances