Je vous prie d'excuser Marylise Lebranchu, actuellement en séance publique pour l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », ainsi que Michel Sapin, qui se trouve à Bruxelles.
Avant de répondre à vos questions, je rappellerai que le ministère dont j'ai la charge a contribué de manière exemplaire aux économies budgétaires, avec une baisse de 2,3 %, hors charges de retraites, de ses crédits en 2015, soit 300 millions d'euros, et 2 000 à 2 500 suppressions d'emplois sur l'ensemble de son périmètre. C'est notamment le cas pour les administrations qui relèvent du périmètre de la mission « Gestion des finances publiques », avec une réduction d'effectifs de 2 400 ETP, soit une baisse de 1,8 % du plafond d'emplois. Les dépenses hors personnel baissent de 60 millions d'euros et les dépenses de personnel, hors retraites, de 82 millions.
Vous aurez par ailleurs noté que la maquette budgétaire est simplifiée avec la fusion des deux programmes 221 et 218 qui étaient déjà tous les deux sous la responsabilité du secrétaire général du ministère.
Dans ce contexte exigeant, le ministère poursuit sa modernisation. La direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) se sont ainsi dotées de projets stratégiques à moyen terme qui impliqueront notamment une adaptation des réseaux territoriaux. C'est une démarche complexe, que nous mènerons de manière progressive, dans la concertation et le dialogue social, en portant la plus grande attention aux conditions de travail de nos agents. J'en profite pour saluer la compétence et le dévouement de ces derniers, souvent injustement critiqués, alors même que plusieurs centres des finances publiques ont récemment fait l'objet de dégradations inacceptables que je condamne fermement, ainsi que j'ai eu l'occasion de le dire à Morlaix, où je me suis rendu, et en d'autres lieux.
La priorité est aussi donnée à la dématérialisation et aux gains de productivité qui en résultent : dématérialisation des relations avec le contribuable ou avec les entreprises qui utilisent les procédures douanières ; dématérialisation des relations entre la DGFiP et les collectivités territoriales – nous souhaitons promouvoir un objectif de généralisation aux plus grandes collectivités – ; enfin, dématérialisation de la chaîne de la dépense publique et notamment des factures de nos fournisseurs à partir de 2017.
Le ministère des finances joue par ailleurs tout son rôle dans le choc de simplification, et dans l'optimisation des fonctions support de l'État – je pense notamment aux achats, à la politique immobilière, sur laquelle M. Dumont a posé des questions précises, ou encore à la gestion de la paie des agents de l'État, champ sur lequel nous sommes revenus à une approche plus pragmatique après l'abandon, en début d'année 2014, du projet d'opérateur national de paie (ONP), trop risqué et trop coûteux.
Mme Berger a souligné les progrès considérables du pilotage, tout en mettant l'accent sur les difficultés du suivi de la dépense locale – suivi plutôt que pilotage, d'ailleurs, les dépenses locales relevant des décisions des collectivités. Nous devons produire des analyses de l'ensemble de la dépense publique sur des périodes triannuelles, et l'évaluation des dépenses des collectivités territoriales présente de grosses difficultés. Nous avons engagé des travaux sur le sujet, notamment avec l'introduction dans le projet de programmation pluriannuelle des finances publiques d'un indice prévisionnel : l'objectif national de la dépense des collectivités territoriales. Nous devons, en concertation avec le Comité des finances locales, aller plus loin. Cet indice suscite des réactions chez les parlementaires et les élus locaux. Certains, au Sénat, jugent même inconstitutionnel le fait d'introduire un simple indice dépourvu de caractère normatif !
Je rappelle par ailleurs que certaines composantes de la dépense publique, gérées par les partenaires sociaux, échappent en grande partie au Parlement : l'UNEDIC ou encore certaines caisses de retraite ne figurent pas dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS).
Merci, madame Berger, d'avoir souligné le travail précis accompli sur l'ONDAM. L'objectif de 2 % ne semble pas encore assez ambitieux à certains. En tout état de cause, la démarche est très documentée. La question du tendanciel est également importante.
En ce qui concerne l'inflation, je suis très frappé par le fait que peu d'experts économiques – voire aucun – n'avaient prévu la faiblesse prolongée de l'inflation. Il est facile de dire aujourd'hui qu'elle était prévisible compte tenu des mesures budgétaires prises, mais elle a été une surprise. S'agissant de ses effets sur la dette, le taux d'intérêt à dix ans, celui des OAT, est actuellement de 1,23 %. Nous avons retenu une hypothèse de 2,2 % en 2015, que nous pensons donc pouvoir réduire, même si c'est toujours risqué. Les prévisions de la programmation des finances publiques sont, eu égard au taux constaté aujourd'hui, très prudentes. Il me semble par ailleurs que la gestion de la dette est bien pilotée, par des services très professionnels. Nous essayons de renforcer l'information du Parlement, chose parfois délicate lorsque l'on en vient à cette question récurrente : « Qui détient la dette de la France ? »
La question du pilotage des universités est d'actualité puisque nous sommes en fin de gestion et que des discussions serrées ont lieu. L'hétérogénéité des trésoreries des universités est un sujet de préoccupation. Avec les ministres en charge de ces questions, nous avons demandé à l'Inspection générale des finances et à l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche de nous faire, dans un délai de trois mois, des propositions de meilleurs outils de pilotage, de mutualisation de trésoreries. Il s'agit d'un secteur dans lequel les marges de progrès sont considérables.
M. de Rocca Serra a souligné les efforts demandés aux personnels, notamment ceux de la DGDDI. Il a évoqué les 300 agents affectés à l'écotaxe poids lourds, dont un peu plus d'une centaine ont été centralisés à Metz, les autres ayant été répartis sur l'ensemble du territoire. Ces derniers pourront se redéployer sans difficulté sur des missions traditionnelles de contrôle, mais le problème est très sensible pour les agents à Metz, que j'ai rencontrés il y a une dizaine de jours et dont la situation est difficile. Ce que j'ai retenu de leurs paroles, c'est que, si, en tant que fonctionnaires, ils ne craignent pas de perdre leur salaire et leur toit, leur dignité se trouve aussi dans leur travail. Ils se sont investis dans des missions nouvelles, ce qui n'est pas très courant à la douane, ont développé de la formation et du savoir-faire.
J'ai pris avec eux l'engagement que personne ne serait muté sans son accord. De même, je me suis ensuite engagé à leur confier des missions à caractère national. Avec les outils informatiques, il ne doit pas être difficile de déconcentrer des activités. Ces personnes ne souhaitent pas être payées à ne rien faire, et elles ont été très choquées par les propos de certains journalistes. Je les reverrai à Metz, au plus tard à la mi-janvier, pour leur dire très précisément quelles missions leur seront transférées. Il n'est pas question d'affecter des douaniers, comme cela a été dit ici ou là, à la surveillance de travailleurs détachés.
M. de Rocca Serra a également évoqué la revue des missions que conduit le Gouvernement, administration par administration. J'ai déjà rappelé les gains de productivité liés à la dématérialisation. La revue nous permettra de savoir quelles missions seront conservées par l'État, quelles missions peuvent être transférées à d'autres organismes. Un recentrage est nécessaire. Nous devrions en avoir terminé à la fin du premier trimestre de l'année prochaine ; nous aurons en tout cas bien avancé.
M. Pajon m'a interrogé sur l'impact du nouveau régime indemnitaire. Les moyens seront redéployés d'ici à 2017 dans l'ensemble de la fonction publique de l'État. L'objectif est d'uniformiser les plus de mille régimes indemnitaires existant actuellement. Les mesures catégorielles ont été diminuées largement ; seules seront exécutées celles qui avaient fait l'objet d'un accord de mise en oeuvre pluriannuelle.
Une revalorisation des agents de catégorie C a été engagée et se poursuivra. Pa ailleurs, une négociation est en cours sur l'avenir de la fonction publique, dont l'objet est de rénover les carrières et de revoir les grilles de rémunération. Ses effets se feront sentir à partir de 2016, sur une période de cinq à dix ans.
En ce qui concerne l'avancement, je souhaite que l'on réfléchisse aux différences existant entre la fonction publique de l'État et la fonction publique territoriale. L'avancement dans la première est souvent lié à des quotas, ce qui est rarement le cas dans la seconde. Le coût de la fonction publique territoriale n'est pas seulement lié au nombre d'agents, mais aussi au déroulé des carrières : l'avancement y est plus favorable que dans la fonction publique de l'État.
M. Dumont a évoqué l'immobilier de l'État. Nous travaillons, notamment avec le service des domaines, à améliorer sa gestion. La question des 12 mètres carrés fait partie des schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI). Je souhaite que mon ministère exerce une pression plus forte pour que les engagements pris dans le cadre de ces SPSI par les ministères soient tenus. Je vous suis pleinement, monsieur Dumont, sur le fait que les 12 mètres carrés doivent rester un plafond…
L'effort de l'État en matière d'entretien n'est pas représenté seulement par le programme 309 : les opérateurs disposent également de crédits, à hauteur de 915 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 529 millions d'euros en crédits de paiement.
Le déménagement des juridictions de l'île de la Cité vers les Batignolles interviendra au second semestre 2017. Les locaux libérés n'ont pas encore reçu d'affectation définitive. Nous étudions leur réhabilitation afin, par exemple, d'y regrouper les services de la chancellerie ou de ses juridictions aujourd'hui installées en location dans Paris. La direction régionale de la police judiciaire, qui occupe actuellement le 36 quai des Orfèvres et d'autres implantations parisiennes, sera regroupée aux Batignolles à proximité du palais de justice. Les locaux libérés pourraient être amenés à héberger, à compter de 2017, des services de la Chancellerie. Le ministère de l'intérieur souhaite par ailleurs y transférer le musée de la police, actuellement installé au sein du commissariat du 5e arrondissement.
Le projet de cession de l'ancienne bibliothèque de l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO) s'inscrit dans une démarche globale associant l'État et la ville de Paris, destiné à identifier les sites cessibles en faveur de la construction de logements. Certains sont inscrits sur la liste régionale, d'autres peuvent être cédés sans contrainte d'affectation particulière. L'opération doit être envisagée dans le cadre d'un équilibre global avec la cession réussie de l'ensemble Penthemont-Bellechasse. Elle peut être considérée comme représentative des cessions en faveur du logement. Il s'agit d'une opération emblématique qui se traduit certes par un coût économique inhabituel, lié à la restructuration lourde d'une ancienne bibliothèque, mais elle permet d'introduire de la mixité sociale dans un arrondissement où elle est peu développée. Les conditions financières du projet ne sont pas encore complètement stabilisées.
M. Dumont a déploré le mauvais état du parc immobilier de la gendarmerie, qui gère 75 000 logements, dont 33 000 sont propriété de l'État, le reste étant en général loué aux communes d'implantation. Pour 2015, nous avons prévu 79,3 millions d'euros pour sa remise à niveau : un montant initial de 9,3 millions et un abondement de 70 millions. Une trentaine d'opérations lourdes de réhabilitation et de remise aux normes de casernes seront engagées, dont les secondes phases de réfection du clos et du couvert des casernes de Bouliac et de Gap. Le budget cumulé consacré aux opérations de réhabilitation et d'entretien sera le plus élevé de ces cinq dernières années, puisqu'il dépassera les 100 millions d'euros.
M. de Rocca Serra s'est penché sur la mutualisation des moyens des caisses de retraite subventionnées par l'État. Nous avons prévu la création d'un groupement d'intérêt public (GIP) chargé de piloter les principaux projets de simplification communs aux régimes. Les régimes spéciaux de retraite sont intégrés au champ des travaux de ce GIP, dans le but d'assurer une plus grande mutualisation, notamment des processus informatiques et de la gestion des droits des assurés, entre régimes. Cette possibilité, inscrite dans la loi des retraites de 2014, permet des économies sur les coûts de gestion. Le développement de projets communs à l'ensemble des régimes de retraite est inévitable en raison du mouvement continu de convergence des règles relatives à la retraite et de la croissance du nombre de personnes polypensionnées relevant de plusieurs régimes. La création d'un répertoire de gestion des carrières unique permettra de simplifier le service rendu aux assurés.
Les textes fondateurs du régime spécial de retraite de la RATP prévoient la possibilité d'un adossement au régime général. L'objectif premier d'une opération d'adossement est de mettre en évidence les droits spécifiques des régimes spéciaux par rapport aux règles de droit commun. Or les réformes de 2008, 2010 et 2014 ont déjà permis une convergence des régimes spéciaux vers le régime général : la mise à la retraite d'office a été supprimée, un système de décote et de surcote a été créé, les règles d'âge et de durée de service ont été modifiées. Dans ce contexte, les opérations d'adossement, par ailleurs coûteuses, semblent avoir perdu de leur pertinence.
M. Tourret a formulé plusieurs propositions. Un dispositif de départ volontaire, couplé avec l'augmentation de l'indemnité, existe déjà, avec une indemnité pouvant atteindre deux ans de rémunération : entre 1 000 et 1 200 fonctionnaires en bénéficient chaque année, pour un versement de 30 000 à 32 000 euros. Un dispositif de rupture conventionnelle ne nous paraît pas envisageable à ce stade, compte tenu des exigences du dialogue social et de la difficulté d'avancer sur ce sujet.
M. Tourret nous demande par ailleurs des rapports. Le président Urvoas a réaffirmé qu'il n'y était pas favorable. Le Gouvernement, pour sa part, est prêt à répondre aux demandes du Parlement, même si nous ne sommes pas non plus des fanatiques des rapports, qui mobilisent beaucoup nos équipes.
L'obligation de mobilité professionnelle existe déjà dans certains cas. Sa généralisation doit être soumise à la discussion avec les organisations syndicales.
S'agissant du jour de carence, beaucoup d'efforts, notamment celui que représente le gel prolongé du point d'indice, ont été demandés aux salariés du secteur public. Un certain équilibre a été trouvé. La situation du secteur public, relativement au jour de carence, est par ailleurs difficilement comparable avec le secteur privé, compte tenu des systèmes d'assurance.