Intervention de Myriam El Khomri

Réunion du 30 octobre 2014 à 15h00
Commission élargie

Myriam El Khomri, secrétaire d'état chargée de la politique de la ville :

Monsieur Vercamer, la mobilisation du droit commun est une question importante pour tout ministre chargé de la politique de la ville. Notre réussite en dépend. Ainsi que l'a indiqué Patrick Kanner, plus de 4 milliards d'euros sont mobilisés par les différents ministères en faveur des quartiers prioritaires. La question de l'école, en particulier, est prioritaire à nos yeux. Mon prédécesseur, François Lamy, avait signé des conventions interministérielles avec douze ministères. Patrick Kanner et moi-même nous engageons à les suivre. Nous n'hésitons pas à intervenir devant les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) avec François Rebsamen ou devant les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) avec Fleur Pellerin, afin de les mobiliser, notamment dans le cadre des contrats de ville. La nouveauté est justement que l'ensemble des services publics vont signer ces contrats uniques et s'engager dans ce cadre.

Notre politique a permis des réalisations très concrètes. Dans le cadre des emplois d'avenir, conformément à notre objectif, 20 % des embauches ont concerné des personnes issues des quartiers prioritaires. Nous souhaitons passer à 30 %, ce qui implique une mobilisation notamment de Pôle emploi et des missions locales. En matière de développement économique, nous allons intervenir devant les délégués régionaux de la Caisse des dépôts. Nous rencontrons aussi de nombreux élus locaux, qui sont parfois porteurs de projets de développement économique – tel est d'ailleurs le cas à Roubaix. Nous les incitons à signer eux aussi les contrats de ville et à s'engager dans ce cadre. Nous avons récemment réuni les préfets délégués pour l'égalité des chances et les sous-préfets à la ville, et leur avons demandé de se mobiliser. Nous veillons en outre à l'application de la charte « Entreprises et quartiers » avec Pôle emploi et avec les préfets, à qui nous demandons de vérifier si les grandes entreprises signataires sont installées dans leur bassin d'emploi et si elles peuvent décliner localement cette charte signée au niveau national. En matière éducative, 25 % des postes créés pour la scolarisation des enfants de moins de trois ans l'ont été dans les quartiers prioritaires. Dans le cadre du dispositif « plus de maîtres que de classes », nous nous étions fixé comme objectif que 25 % des maîtres supplémentaires soient affectés dans des écoles des quartiers prioritaires. Cet objectif sera porté à 40 % en 2014. Il faudra évidemment insérer cet élément dans la dynamique des contrats de ville.

Nous sommes très attachés aux centres sociaux, qui sont non seulement des lieux de participation des habitants, mais aussi des associations structurantes, présentes dans de nombreux quartiers prioritaires. Ils exercent des missions essentielles en matière de prévention sociale, de prévention précoce, d'accompagnement à la scolarité et, parfois, d'alphabétisation. Ils sont largement contrôlés : ils sont à la fois agréés par les caisses d'allocations familiales et suivis par les collectivités territoriales – départements et communes – qui participent à leur financement. Dans un souci de simplification administrative, Patrick Kanner et moi-même nous sommes donné comme priorité de signer avec ces centres – en commençant par ceux des quartiers prioritaires – des conventions pluriannuelles d'objectifs de trois ans qui leur assurent des financements pérennes. Cela leur évitera de perdre du temps à solliciter des sommes modestes dans le cadre de dispositifs tels que « Ville, vie, vacances » ou les contrats locaux d'accompagnement à la scolarité. Ils pourront ainsi passer plus de temps avec les habitants et moins de temps à remplir des dossiers. Nous avons déjà conclu une convention pluriannuelle d'objectifs avec la Fédération des centres sociaux et socioculturels de France. Nous souhaitons la décliner localement. Enfin, nous allons travailler sur les régies de quartier, qui jouent également un rôle structurant dans les quartiers prioritaires.

S'agissant des REP, monsieur Pupponi, nous mettons la dernière main à une instruction commune de la ministre de l'éducation nationale, du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports et de la secrétaire d'État chargée de la politique de la ville dans le cadre des contrats de ville. Les recteurs informent actuellement les élus de la nouvelle carte de l'éducation prioritaire. Je tiens à vous rassurer : 99 % des REP + se trouvent dans des quartiers prioritaires. Nous souhaitons que le ministère de l'éducation nationale inscrive les moyens des REP dans le cadre des contrats de ville. Nous travaillons en ce sens.

En matière de sécurité, soixante-dix-neuf des quatre-vingts zones de sécurité prioritaires – zones qui bénéficient de renforts de policiers ou de gendarmes – couvrent des quartiers prioritaires. Dans ces quartiers, nous développons en outre le dispositif des délégués à la cohésion police-population, ainsi que celui des intervenants sociaux en commissariat, lesquels ont à la fois une mission d'accueil des victimes – il s'agit souvent de violences conjugales – et de prévention à l'intention des jeunes qui traînent tard le soir dans la rue et commettent des incivilités infra-pénales. Ces intervenants sociaux peuvent consulter la main courante et convoquer les familles au commissariat. Nous sommes très attachés à leur rôle.

En matière de participation des citoyens, madame Abeille, la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine prévoit la création des conseils citoyens. À cette fin, nous avons créé une bourse nationale d'expérimentation. De nombreuses associations et, parfois, des collectivités territoriales ont répondu à l'appel à projets que nous avons lancé dans ce cadre et qui s'est achevé le 15 octobre dernier. Nous avons porté de 600 000 à 1,2 million d'euros le montant de l'enveloppe que nous consacrons à son financement. Nous prendrons le temps d'écrire à chacun des maires concernés pour les informer des projets retenus dans leur commune. Il s'agit non pas d'installer sur tout le territoire des conseils citoyens dont le modèle aurait été conçu au niveau central, mais de prendre en considération le travail réalisé sur le terrain et les propositions des élus locaux. Les conseils citoyens doivent dans tous les cas être composés pour moitié d'habitants tirés au sort et pour moitié d'acteurs économiques et associatifs du territoire, voire d'habitants des quartiers alentour afin d'éviter la stigmatisation du quartier concerné. En outre, nous mettons en place une maison des projets dans chacun des quartiers concernés par le NPNRU. Enfin, en application des recommandations du rapport Bacqué-Mechmache, nous travaillons à la création d'une « Fondation quartiers » afin de soutenir les initiatives sociales ou économiques qui remontent du terrain. Quant à la mise en place du Fonds d'interpellation citoyenne, elle est avant tout de votre ressort, mesdames, messieurs les députés, puisque ce fonds doit être alimenté par 10 % de la réserve parlementaire. Je suis trop attachée au principe de séparation des pouvoirs pour me prononcer aujourd'hui sur cette question !

Monsieur Goldberg, la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine contient en effet des dispositions relatives à la lutte contre les discriminations, en particulier contre les discriminations à raison du lieu de résidence ou de l'origine. Nous célébrons cette année les dix ans de la Charte de la diversité. François Rebsamen et Patrick Kanner ont réuni hier le groupe de travail « lutte contre les discriminations » qui avait été annoncé par le Premier ministre à l'issue de la grande conférence sociale pour l'emploi en juillet dernier. Ce groupe de travail rassemble notamment les partenaires sociaux et les associations compétentes. L'un des deux ateliers porte sur les outils à destination des entreprises et des salariés, l'autre sur les moyens d'offrir une certaine sécurité juridique aux entreprises et de réduire les discriminations collectives. Ce travail, qui fait lui aussi suite au rapport Bacqué-Mechmache, est en bonne voie. Nous souhaitons néanmoins que chaque contrat de ville inclue un plan de lutte contre les discriminations. L'État a mobilisé des financements sur ce volet, et j'espère que les régions et les départements accompagneront le mouvement. Il est en effet très important que la prise de conscience en la matière se fasse tant au niveau local que national.

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