Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, chers collègues, comme nous l’avons dit lors du vote sur la première partie de ce projet de loi de finances, ce budget ne porte pas le changement de cap que nous attendions.
D’abord, parce qu’il ne donne pas la priorité à l’allégement de la fiscalité des ménages : vous annoncez 19 milliards d’euros d’allégements pour les entreprises, contre 3 milliards d’euros pour les ménages, alors que chacun dit que la charge fiscale doit être levée, tant sur les classes moyennes que sur les ménages aux revenus modestes.
Enfin, parce qu’il ne donne pas la priorité à l’écologie, dont le budget baisse de 6 %, soit 481 millions d’euros. Nous ne comprenons ni ne pouvons comprendre cette baisse de crédits quand nous votons une loi aussi fondatrice que la loi relative à la transition énergétique. Comment traduire les ambitieux objectifs de cette loi, notamment en matière d’économies d’énergie, d’isolation des logements, de développement des transports collectifs ou de développement des énergies renouvelables, sans disposer des moyens nécessaires ?
Que dire du versement de transport interstitiel, une mesure de bon sens, destiné à financer les transports en région, qui avait été instituée par la loi portant réforme ferroviaire et que le Gouvernement abroge ici, avec difficulté d’ailleurs, car il aura fallu une seconde délibération ?
Que dire de l’amendement adopté avec l’appui du Gouvernement, qui crée une niche fiscale pour les entreprises les plus consommatrices d’énergie, en leur permettant de déduire une partie plus importante de leurs intérêts d’emprunt ? Cette niche fiscale anti-écologique est créée alors que nous venons de voter la loi relative à la transition énergétique...
Que dire, enfin, de l’allégement des taxes sur le transport aérien, notamment d’une partie de la taxe de solidarité sur les billets d’avion, adoptée par amendement dans ce texte ?
Par ailleurs, ce budget ne porte pas le changement de cap que nous attendions, parce qu’il porte une forme de sacralisation des aides aux entreprises, même lorsque les effets d’aubaine sont reconnus par chacun. Je veux citer ici le travail réalisé par les parlementaires sur tous les bancs de la majorité pour mieux cibler le crédit d’impôt recherche sur les petites et moyennes entreprises, et éviter de le transformer en dispositif d’optimisation fiscale pour les grands groupes. Un amendement issu du travail approfondi de la rapporteure générale, visant à plafonner ce crédit d’impôt pour les groupes, avait ainsi été adopté par la commission des finances. Las, le Gouvernement n’aura pas souhaité le voir adopté.
Pas de changement de cap, disais-je, mais aussi peu de prise en compte du travail parlementaire. Un important travail d’amélioration du texte a pourtant été mené en commission des finances. Celle-ci a fait des propositions approfondies sur la lutte contre l’optimisation fiscale agressive ou sur les contreparties à apporter au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Malheureusement, ce travail n’a pas été soutenu par le Gouvernement, qui a ainsi manqué l’occasion d’entrer dans une phase de travail collaboratif avec le Parlement, phase qui nous aurait permis de dépasser le carcan d’une Cinquième République à bout de souffle et de revaloriser le rôle du Parlement, comme le Président de la République s’y était engagé.
Bien sûr, nous aurons aussi noté les avancées que porte ce projet de loi de finances : l’augmentation des financements pour le service civique ; la prolongation des aides aux communes, afin de les soutenir dans la mise en place de la réforme des rythmes scolaires ; l’augmentation du budget alloué au crédit d’impôt pour la transition énergétique, l’ancien crédit d’impôt pour le développement durable ; les 140 millions d’euros de financement alloués à l’investissement dans les transports franciliens, pour sécuriser et entretenir le réseau, même si nous regrettons que ce financement repose en partie sur les ménages.
Nous savons aussi que le contexte économique et institutionnel européen contraint la politique économique et budgétaire de la France.
Nous savons encore qu’avec l’opposition et ses 130 milliards d’euros d’économies proposés, la situation serait pire encore. Mais vous avez aussi fait des choix en faveur d’un allégement indifférencié et inconditionnel de la fiscalité des entreprises, qui conduisent nécessairement à une pression exagérée sur les ménages et les investissements.
Nous ne pouvons soutenir ces choix. Aussi, vous comprendrez que pour cela, et pour le peu de cas fait de l’écologie dans ce budget, le groupe écologiste s’abstiendra dans sa quasi-intégralité. En effet, ce projet de loi ne répond pas à l’aspiration légitime du pays à une autre politique, plus efficace et plus juste, en faveur des ménages, en faveur de l’investissement et en faveur de l’écologie.