Intervention de Olivier Gohin

Réunion du 12 novembre 2014 à 11h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Olivier Gohin, professeur à l'université Panthéon-Assas Paris II :

La France n'est pas en situation de « prendre acte » des arrêts de la CEDH : elle a obligation de les exécuter de bonne foi, en vertu de sa Constitution et des conventions auxquelles elle a librement décidé d'adhérer. Je vous renvoie au problème récurrent des magistrats du Parquet, qui, au sens de la Cour, ne sont pas des magistrats : après trois arrêts condamnant la France depuis l'arrêt Medvedyev, où sont les modifications de la Constitution ou de la législation organique à ce sujet ? Dans le cas qui nous occupe, si la France ne modifie rien, elle sera de nouveau condamnée !

Je veux bien que l'on interjette appel devant la grande chambre – nous en avons en effet la possibilité –, mais je pense que le résultat sera le même. La jurisprudence de la Cour est très construite, elle ne remonte pas aux deux arrêts du 2 octobre 2014 ! Comme dans bien d'autres cas, notre législation n'est pas en conformité avec la Convention mais personne ne s'en était soucié jusqu'à présent.

Maintenant que le problème est posé, il appartient au législateur de le résoudre. La difficulté tient à l'article 4121-4 alinéa 2 du code de la défense. Mais vous disposez de marges importantes : dans sa jurisprudence, la Cour accepte des restrictions fortes pourvu qu'elles soient légitimes.

À mon sens, l'opinion séparée exprimée par le juge maltais relève largement du sophisme. Ce que nous ne devons pas perdre de vue, c'est la distinction opérée en droit français entre le syndicat – loi Waldeck-Rousseau du 21 mars 1884 – et la liberté d'association telle que définie par la loi du 1er juillet 1901. Le régime d'association recouvre un vaste champ qui inclut d'ailleurs les partis politiques. Ce qu'admettait la circulaire Clémentel de 1924 peut exister à nouveau sans aucune difficulté, moyennant, bien entendu, les réserves déjà mentionnées : exclusion du droit de grève, du droit de retrait, exigence renforcée en matière de neutralité et de réserve, loyalisme envers les institutions. Cela n'empêche pas de revoir les structures actuelles de concertation, mais il faut aussi mettre le droit français en conformité avec la Convention.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion