Intervention de Laurence Denis

Réunion du 15 octobre 2014 à 11h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Laurence Denis, présidente fédérale de la fédération ministérielle CFTC du personnel du ministère de la Défense et des établissements et structures connexes :

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, si c'est un honneur de venir vous rencontrer chaque année, nos déclarations sont de plus en plus complexes car c'est aujourd'hui que notre ministre annonce son plan de restructuration, maintes et maintes fois reporté. Comme d'habitude, grâce à quelques fuites, nous avons appris dès ce matin sur RTL la dissolution du 1er régiment d'artillerie de marine, créé en 1692, à peine installé en 2012 à Châlons-en-Champagne et qui provoque la suppression de 960 personnels et laisse en jachère près de quarante-deux hectares – le Quartier Corbineau. Cette dissolution entraînera également une restructuration du soutien afférent et augmentera le nombre de postes de commandement touchés. Ce n'est qu'un exemple et nous attendons de connaître l'ampleur des dégâts après le conseil des ministres de ce matin et la réunion avec les autorités centrales d'emploi du ministère de la Défense que M. Le Drian a prévue pour demain après-midi avec les organisations syndicales.

Le 1er octobre dernier au soir, nous demandions au ministre de la Défense que notre ministère redevienne budgétairement, et non pas seulement négativement en termes de déflation des effectifs, un des ministères prioritaires de la République. Aurions-nous été entendus par le secrétaire d'État chargé du Budget, M. Christian Eckert ? Il vous a expliqué il y a quelques jours à l'Assemblée nationale, dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014-2019 et du PLF pour 2015, que les engagements du pacte de solidarité – 41 milliards d'allégement pour les entreprises et cinq milliards pour les ménages – soient intégralement tenus et que soient maintenues les priorités défense, éducation, sécurité, justice, transition énergétique. Et d'annoncer que le surcoût des opérations extérieures, qui atteindra 1,1 milliard d'euros en 2014, devra être mutualisé entre les ministères au-delà de la provision budgétaire des 430 millions. C'est pour nous une satisfaction, mais plutôt une demi-satisfaction, car c'est la France qui éponge seule ce surcoût. Et l'Europe ? Le Gouvernement dépose le PLF pour 2015 sur le bureau de la Commission de Bruxelles aujourd'hui : vous rappelez-vous que depuis un an, voire plus si on considère les travaux du Livre blanc, la CTFC a répété inlassablement que le pacte de stabilité européen adopté dans le cadre du traité de Maastricht devait tenir compte, dans ses six critères, de l'effort de défense sans précédent opéré par la France seule, ou presque, pour calculer son pourcentage de déficit rapporté au PIB – les fameux 3 % : nous en sommes à 4,3 %.

Ni le Gouvernement ni sa majorité parlementaire n'ont réussi à le faire comprendre à nos partenaires européens comme à la Commission européenne lors du Conseil européen de décembre 2013. Cette piste a-t-elle encore quelque chance de se concrétiser un jour, au vu des tensions actuelles qui ne baissent pas ?

Les crédits de la mission Défense, qui en comprennent deux autres – Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation, recherche et enseignement supérieur : ne les oublions pas –, augmentent légèrement entre 2014 et 2017, avec des à-coups, comme cela était prévu dans la loi de programmation militaire pour 2014-2019. Ils passent de 31,37 milliards d'euros hors pensions cette année à 31,4 en 2015, 32, 34 en 2016 et 32,75 en 2017.

C'est la mission Défense qui est la plus touchée en termes de suppressions de postes : 7 500. Le personnel paie cher sa contribution au redressement des finances publiques. Le point d'indice, gelé depuis 2010, ne sera pas augmenté jusqu'en 2017. De plus, les enveloppes de mesures catégorielles sont fortement réduites. Un plan d'économies de 7,7 milliards d'euros est programmé sur l'ensemble des dépenses de l'État et de ses agences pour l'année 2015, donc 1,4 milliard sur la masse salariale. Sa progression sera limitée à 0,6 %, un niveau largement inférieur à l'inflation prévisionnelle, qui s'établit à 0,9 % en 2015.

Par ailleurs, et comme prévu, le ministère, et singulièrement la DGA, restera le premier investisseur de l'État avec près de 16,7 milliards d'euros courants en 2015.

Nous remercions Mme la présidente Patricia Adam d'avoir fait inviter les syndicats de la défense pour la première fois aux universités de la défense qui se sont tenues à Bordeaux, les 8 et 9 septembre dernier – c'étaient les douzièmes. Trois organisations syndicales de la défense ont pu s'y rendre et prendre connaissance notamment du fameux rapport sur les exportations d'armements à la fin de 2013, ce qui me permet d'apporter un peu de baume au coeur pour finir mon intervention puisque les prises de commande à l'export d'armement ont enregistré une hausse de 43 %, pour un montant de 6,87 milliards d'euros, ce qui représente une progression de 30 % par rapport à la moyenne 2002-2012.

La CFTC est fière et satisfaite que les exportations d'armement engendrent des bénéfices pour la société française tout d'abord sur les plans économique et social – plus de 40 000 emplois sont directement liés aux exportations de défense, soit près de 25 % des emplois de l'industrie de la défense qui s'élèvent à 165 000, principalement en Île-de-France, région Centre, Bretagne, Aquitaine, Midi-Pyrénées, PACA, Rhône-Alpes. Les bénéfices sont également d'ordre technologique et industriel avec des retombées civiles en termes d'innovation.

Le projet de société de leasing de matériels de la défense – le létal excepté – que le ministre de la Défense s'apprête à créer avant la fin du premier semestre 2015 nous laisse dubitatifs. S'agirait-il d'un tour de passe-passe budgétaire ? La CTFC-Défense a d'ores et déjà demandé au ministre une réunion de concertation approfondie sur le sujet.

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