Intervention de Stéphane Claireaux

Séance en hémicycle du 25 novembre 2014 à 21h30
Stationnement des personnes en situation de handicap — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Claireaux :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteure, mes chers collègues, la loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a constitué une avancée significative pour les droits des personnes en situation de handicap, notamment en réaffirmant le principe d’accessibilité pour tous. Puis est venu le projet de loi habilitant le Gouvernement à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées, que nous avons débattu récemment au sein de notre commission, puis de notre assemblée.

Admettons-le, la loi de 2005 a conduit au développement d’une meilleure accessibilité et d’une qualité d’usage toujours plus grande. De plus en plus de lieux, d’année en année, ont été aménagés et se sont développés afin d’être accessibles à tous. Des efforts incontestables ont été déployés par les acteurs concernés pour faire avancer l’accessibilité et, bien que soumises à de fortes contraintes, les communes apportent chaque jour la preuve de leur volonté d’améliorer l’accueil de tous les publics dans les équipements communaux et de faciliter ainsi l’accès au service public.

Voici donc une nouvelle proposition de loi émanant du Sénat, et votée par ce dernier en décembre 2013, concernant les personnes en situation de handicap. Comme cela a été rappelé lors de nos discussions en commission des affaires sociales, dès octobre 2012, l’Observatoire interministériel de l’accessibilité et de la conception universelle a suggéré de réexaminer la législation relative au stationnement des véhicules des personnes en situation de handicap et aux redevances y afférent, dans le but de limiter la fatigabilité de ces personnes mais également pour favoriser leur accès à l’autonomie.

La proposition de loi que nous étudions aujourd’hui vient donc apporter deux améliorations essentielles à l’article L. 241-3-2 du code de l’action sociale et des familles.

En effet, cette proposition de loi autorisera les titulaires de la carte de stationnement pour personne en situation de handicap à stationner sur toutes les places, que ces dernières leur soient réservées ou non. Ce stationnement sera gratuit. Toutefois, les parcs de stationnement concédés pourront continuer à être payants comme l’a annoncé Mme la rapporteure Annie Le Houerou en commission. Je tiens par ailleurs à la saluer ici pour son important travail sur ce sujet. En outre, notons que la limitation concernant la durée de stationnement sera allongée et ne pourra être inférieure à douze heures.

L’accessibilité, selon la délégation interministérielle aux personnes handicapées, doit permettre « l’autonomie et la participation des personnes ayant un handicap, en réduisant, voire en supprimant, les discordances entre leurs capacités, leurs besoins et leurs souhaits d’une part, et les différentes composantes physiques, organisationnelles et culturelles de leur environnement d’autre part ». Dès lors, la mobilité va dans le sens d’une plus grande accessibilité.

Si des questions de mobilité ont été traitées dans le dernier texte législatif dont nous avons été saisis, cette proposition de loi vient améliorer ce dispositif en permettant une meilleure accessibilité et mobilité, sources d’une meilleure insertion sociale, professionnelle ou encore éducative. Il est important pour les parents de pouvoir se garer près des installations sportives de leurs enfants ou de leurs écoles, ou encore par exemple pour un adulte de pouvoir se garer près de son lieu de travail. Certes, il existe des places ad hoc, mais la possibilité d’utiliser n’importe quelle place est une mesure intéressante.

Pour autant, la mobilité des personnes handicapées reste encore trop souvent problématique en France. En effet, le stationnement constitue un obstacle, parce que nombre de personnes feignent d’ignorer la règle, notamment l’article R. 417-11 du code de la route, qui dispose qu’un véhicule stationné sur les emplacements réservés aux véhicules portant une carte de stationnement de modèle communautaire pour personne handicapée, ou un macaron grand invalide de guerre ou grand invalide civil, est passible d’une amende.

La route doit être un espace de respect où chacun suit les règles de civisme. Ce civisme n’est malheureusement pas toujours respecté. En effet, combien de fois avons-nous vu des places de stationnement occupées par des voitures ne portant aucun badge ou des places avec des autos stationnées avec les feux de détresse indiquant ainsi une situation temporaire de parking, toujours par des véhicules sans macaron ad hoc ? Il est vrai qu’un certain nombre de conducteurs valides font preuve d’incivilité en stationnant sur les places réservées, et ce au plus grand mépris des droits des personnes handicapées.

Évidemment, les associations de personnes en situation de handicap dénoncent régulièrement ces pratiques. Pire encore, ce phénomène ne cesse de s’aggraver. Il faut absolument y remédier. Cette proposition de loi est un premier pas dans cette direction.

En outre, depuis quelque temps déjà, on peut également observer une recrudescence de pratiques abusives et frauduleuses à la carte de stationnement. À cet égard, l’Association des paralysés de France estime qu’une carte sur trois serait fausse ou utilisée de manière frauduleuse. Ainsi, certaines personnes n’ont aucun scrupule à utiliser la carte d’un parent placé en maison de retraite depuis plusieurs années. D’autres encore n’hésitent pas à voler ces cartes, ou même à les falsifier puisque le processus de fabrication et son simple support papier favorisent une utilisation frauduleuse.

Le recto du macaron est, quant à lui, visible uniquement depuis l’extérieur de la voiture, et il n’indique que le numéro de la carte et sa durée de validité puisque le nom et la photo du détenteur se situent au verso.

Dès lors, le travail des forces de l’ordre pour repérer avec certitude les fausses cartes est particulièrement difficile. Les associations et les maisons départementales des personnes handicapées dénoncent d’ailleurs régulièrement le caractère rudimentaire du badge « handicapé ».

Il faut rappeler que d’après l’Association des paralysés de France, le nombre des cartes de stationnement est estimé à 1,5 million pour environ 38 millions de permis de conduire.

La gratuité illimitée pour les personnes handicapées existe déjà dans 245 villes, dont Bordeaux, Lille, Lyon, Paris, Saint-Brieuc ou encore Toulouse. Une généralisation de cette mesure à la France entière serait appréciable à l’heure où la politique d’accessibilité universelle connaît un second souffle.

En ce qui concerne les propos tenus par Mme Carlotti, il est vrai que la discrimination dite « positive » est un traitement différentiel réservé à une catégorie de personnes en fonction de critères qui peuvent être illégitimes d’un point de vue républicain, mais, surtout, qui catégorisent. En l’espèce, nous ne légiférons donc pas pour instaurer une discrimination positive mais nous renforçons le principe d’accessibilité universelle.

Cette proposition de loi est consensuelle puisqu’elle est raisonnable. Elle permettra aux handicapés d’occuper n’importe quelle place de stationnement, gratuitement pour celles qui sont difficiles d’accès, et l’ensemble des parcs de stationnement leur seront accessibles.

Cette proposition de loi ne relève pas de la compassion ; elle ne constitue pas non plus une faveur, puisqu’il s’agit de répondre à de simples questions. En tant que personne en situation de handicap, comment faire pour me garer et pour me déplacer comme les autres ? C’est à ces simples questions que répond cette proposition de loi.

En tout état de cause, l’objectif de la proposition de loi présentée par le groupe socialiste est légitime et ce texte va dans le bon sens. Le groupe des radicaux de gauche et apparentés le soutiendra, bien évidemment.

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