Intervention de Annick Lepetit

Séance en hémicycle du 26 novembre 2014 à 15h00
Droit fondamental à l'interruption volontaire de grossesse — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnick Lepetit :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne demanderai pas pardon pour M. Bompard, : il est le seul responsable de ses propos.

Il y a quarante ans, Simone Veil, à qui je veux rendre hommage à mon tour, présentait son projet de loi reconnaissant l’interruption volontaire de grossesse. Il y a quarante ans, cet hémicycle était le lieu d’un débat d’une rare violence, qui s’est achevé par l’adoption de cette grande loi, grâce au soutien des députés de gauche. Sans eux, cette loi ne serait jamais passée. Il y a quarante ans, notre pays entrait enfin dans une nouvelle ère.

Depuis quatre décennies, des générations de Françaises se sont approprié ce droit, car il s’agit bien d’un droit, et non d’une simple tolérance assortie de conditions fluctuant selon les époques. Il s’agit du droit fondamental de chaque femme à disposer librement de son corps et à accéder aux moyens de planifier le moment où elle désire être enceinte. C’est ce que réaffirme avec force cette proposition de résolution.

La simple lecture des considérants nous rappelle que chaque génération a dû batailler pour ajouter sa pierre à l’édifice. Les parlementaires socialistes n’ont cessé de conforter, de renforcer, d’étendre ce droit pour que les principes établis par la loi Veil prennent toute leur ampleur. Parallèlement, nous avons toujours veillé à défendre ces droits une fois qu’ils avaient été obtenus.

Souvenons-nous que cette loi n’était au départ que provisoire, pour une durée de cinq ans, comme si les femmes avaient besoin d’une période d’essai pour prouver qu’elles peuvent être responsables à part entière. La liberté des femmes n’est jamais acquise définitivement. Une parole obscurantiste se libère un peu plus chaque jour.

Ici même, dans cet hémicycle, les débats que nous avons eus en janvier dernier nous ont rappelé que les discours réactionnaires ont toujours cours dans notre pays et sur ces bancs. Ce qui les avait provoqués ce jour-là était la proposition de supprimer la notion de détresse comme justification de l’interruption de grossesse. Cette notion, issue du difficile compromis politique de 1974, n’avait plus selon nous de raison d’être en 2014.

1 commentaire :

Le 27/11/2014 à 21:43, laïc a dit :

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"Il s’agit du droit fondamental de chaque femme à disposer librement de son corps et à accéder aux moyens de planifier le moment où elle désire être enceinte"

Méfions nous que ce droit fondamental ne se transforme en droit fondamental de la personne violente et tapie dans l'ombre de disposer librement du corps d'une pauvre femme sans défense, et d'autant plus sans défense qu'elle ne pourra pas profiter d'une enquête légale sur les raisons de l'avortement pour livrer à l'autorité officielle le nom de la personne qui lui fait ce chantage affectif ou financier pour qu'elle avorte.

Quant à la planification du moment d'être enceinte, c'est en effet possible pour de nombreuses femmes, et ce serait l'objectif idéal et rêvé, s'il n'y avait pas cette suspicion de violence exercée contre les femmes enceintes qui paraissent souhaiter avorter de leur propre chef, suspicion que rien de légal ne permet d'évacuer, puisque la notion de détresse est biffée d'un trait de plume dans la nouvelle loi.

Il ne faudrait pas non plus, certes, si la notion de détresse était rétablie, qu'elle serve de prétexte à des enquêtes tellement minutieuses et contraignantes qu'elles en deviendraient des prétextes légaux pour faire renoncer les femmes à l'avortement. Il faut raison garder : le but est d'aider la femme, pas de l'enfoncer un peu plus.

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