Intervention de Bruno Le Roux

Séance en hémicycle du 28 novembre 2014 à 9h30
Reconnaissance de l'État de palestine — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Le Roux :

Monsieur le président, monsieur le ministre des affaires étrangères et du développement international, mes chers collègues, je porte aujourd’hui avec humilité et gravité la parole de mon groupe à l’occasion de l’examen par notre assemblée de cette proposition de résolution portant sur la reconnaissance de l’État de Palestine.

Avec humilité, parce que si notre force est d’être la voix de la souveraineté française et si nous savons que cette voix compte dans le monde, elle ne peut, à elle seule, inverser le cours des choses.

Avec gravité, parce que, en Israël, en Palestine, le chemin de la paix se rétrécit chaque jour et que nous ne pouvons l’accepter.

Le débat que nous engageons et notre vote sur ce texte sont particulièrement attendus, bien au delà de nos frontières – en Israël, en Cisjordanie, à Gaza –, mais pas seulement. Le conflit israélo-palestinien a une résonance forte dans de très nombreux pays d’Europe et du monde, et la voix de la France y est écoutée et attendue.

Je sais que sur ces bancs, au-delà de nos sensibilités politiques, nous sommes tous des femmes et des hommes attachés à la paix. Nous voulons être des artisans de la paix dans cette région du monde.

Car, mes chers collègues, cette résolution est d’abord et avant tout une contribution à la paix. Elle reflète la position équilibrée de la France depuis la présidence de François Mitterrand. Personne ne doit en douter.

Je sais que sur ces bancs, quelle que soit notre génération, des plus jeunes aux plus anciens d’entre nous, nous aimerions connaître un jour, le plus rapidement possible, la fin de cette guerre, qui oppose deux peuples depuis plus de soixante-dix ans.

Mais si nous sommes honnêtes avec nous-mêmes, y croyons-nous vraiment ? Osons-nous simplement y croire ? Ce conflit fait tellement partie de l’image du monde que nous connaissons depuis toujours ; il semble tellement inscrit dans notre paysage, dans notre histoire collective. Il s’impose régulièrement à nous depuis tellement de temps déjà. Osons-nous simplement y croire ?

Cette guerre semble sans fin. Elle enrôle les générations les unes après les autres et les meurtrit toutes. Elle se réinvente dans ses formes, se poursuit dans la destruction, la tension et le chaos qu’elle organise à chaque fois. Par trois fois déjà, en quelques années seulement, la ville de Gaza a été détruite. La paix est, là-bas, toujours éphémère.

Oui, mes chers collègues, quelque chose nous empêche de simplement oser croire possible la fin de ce conflit. Il y a eu tant d’espoirs déçus ! Il y a eu tant de reprises des hostilités, tant de cessez-le-feu illusoires. L’histoire de ces dernières décennies nous a appris à nous méfier de nos propres enthousiasmes.

Recevant en septembre dernier, Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, le Président de la République résumait le sentiment dominant des opinions publiques nationales et des responsables politiques. Il disait : « cela fait trop longtemps, qu’il y a des discussions, qu’il y a des négociations, des suspensions, des arrêts, des interruptions et qu’il y a l’idée qu’il n’y aura jamais de solution pour en terminer avec le conflit israélo-palestinien, alors que nous en connaissons tous les paramètres ».

Le Président de la République a raison, c’est cela aussi qui menace la paix : cette idée « qu’il n’y aura jamais de solution pour en terminer avec le conflit israélo-palestinien ». C’est précisément cette idée-là que nous devons extirper de nos têtes et de nos consciences.

La résolution que nous vous proposons d’adopter aujourd’hui n’a d’autre but que de « concourir à l’effort international de paix au Proche-Orient ». Tel en est d’ailleurs le premier alinéa.

Elle s’inscrit dans une dynamique européenne de reconnaissance de l’État palestinien. Cette dynamique sortira renforcée par le vote qui sera le nôtre la semaine prochaine.

Ainsi, après le gouvernement suédois le 30 octobre dernier, après le Congrès des députés espagnols qui a adopté, à une écrasante majorité, tous groupes politiques confondus, une résolution de même nature que celle que nous examinons aujourd’hui, la représentation nationale française demandera à son gouvernement que soit reconnu par la France l’État de Palestine et qu’il soit mis fin à la poursuite illégale de la colonisation dans les territoires palestiniens, qui mine la viabilité même de cet État palestinien.

Cette dynamique européenne dépasse les clivages politiques. Le Parlement britannique, majoritairement conservateur a voté. En Espagne, une initiative sociale-démocrate a été reprise par la droite.

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