Intervention de François de Rugy

Séance en hémicycle du 28 novembre 2014 à 9h30
Ratification de l'amendement au protocole de kyoto l'ordre du jour appelle la discussion après engagement de la procédure accélérée du projet de loi autorisant la ratification de l'amendement au protocole de kyoto du 11 décembre 1997 . — Discussion générale dans la discussion générale la parole est à m. boinali said.

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

Enfin, cet amendement est concomitant de l’action menée par l’Union européenne, qui s’est dotée en 2008 d’un plan de lutte contre le réchauffement climatique à l’horizon 2030. À cet égard, il convient de souligner que l’Union n’est pas encore à la hauteur des enjeux. Avec un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre inférieur aux préconisations des scientifiques, des dispositions non contraignantes, des décisions trop souvent reportées, notamment pour encadrer le prix du carbone, et des États charbonniers qui s’opposent à toute mesure ambitieuse, l’Europe ne se donne pas les moyens d’être à la place qui devrait être la sienne, à savoir celle de leader mondial dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Certes, l’amendement de Doha ne concerne que peu de pays : certains des États qui avaient ratifié le protocole de Kyoto n’ont pas renouvelé leur implication et les pays signataires ne représentent qu’une part minoritaire des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Toutefois, ce dispositif doit faciliter la transition vers la COP21, qui constitue la véritable échéance.

Aujourd’hui, tous les regards sont tournés vers la France. La 21e Conférence sur le climat sera l’occasion d’inscrire à l’agenda international des objectifs à la hauteur du défi climatique : limiter le réchauffement climatique à deux degrés Celsius d’ici à 2100 ; trouver une solution à la question, centrale, des financements, qui est source de blocage dans les négociations internationales – on peut à ce propos saluer ce qu’a dit hier Président de la République en ouverture de la conférence environnementale et se réjouir que l’engagement financier de la France ait été confirmé par le ministre des finances, qui a en outre indiqué que les négociations internationales avaient permis de réunir les sommes prévues, soit près de 10 milliards d’euros ; enfin, rassembler le plus grand nombre de pays possible dans le cadre d’un nouvel accord, qui deviendra effectif à partir de 2020.

Comme l’a souligné hier le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, on ne peut à cet égard que saluer, même en faisant preuve d’un optimisme mesuré, l’annonce d’un accord entre les États-unis et la Chine, deux pays qui sont parmi les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre et qui, jusqu’à présent, faisaient plutôt blocage dans les négociations sur un accord contraignant. Espérons que l’annonce faite par le président Obama et son homologue chinois soit un signal positif, qui ouvrira des perspectives pour la conférence de l’an prochain.

Dans ce contexte, on ne le dira jamais assez, la France se doit d’être exemplaire. Cela a d’ailleurs été souligné par la ministre de l’écologie et le Président de la République à l’ouverture de la conférence environnementale. Nous devons toutes et tous lancer un appel à la mobilisation : mobilisation internationale en vue de la conférence mondiale de l’année prochaine, mobilisation européenne dans la perspective des prochaines échéances qui nous attendent, et mobilisation nationale.

À cet égard, un cap a été franchi avec l’examen en première lecture à l’Assemblée nationale du projet de loi relatif à la transition énergétique ; il s’agit d’une réforme extrêmement importante, qui va dans le bon sens et que le groupe écologiste a saluée. Il serait toutefois bon, monsieur le secrétaire d’État, que le calendrier parlementaire ne soit pas un prétexte pour une forme d’enlisement ! Il est impératif que ce texte soit rapidement adopté définitivement par le Parlement.

Au-delà, on sait qu’il existe dans le secteur de l’agriculture un problème d’émission de gaz à effet de serre trop souvent négligé, notamment dans notre pays, grand pays agricole qui a, du coup, une responsabilité majeure en la matière.

Enfin, il conviendrait de s’intéresser à la question des transports. Nous l’avions signalé au moment de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique : le volet transport de ce texte est trop mince. La politique en la matière aurait dû être évoquée. Nous appelons pour notre part à l’élaboration d’une nouvelle loi d’orientation des transports intérieurs, comme il y en avait eu une au début des années 1980, loi qui comprendrait des mesures volontaristes et aurait des effets réels. Le secrétaire d’État chargé des transports a reconnu, hier, à l’occasion de l’ouverture de la conférence environnementale, que la politique en matière de fret ferroviaire était un échec : il continue de reculer au profit du transport de marchandises par la route.

À cet égard, on ne peut que regretter l’abandon de la taxe sur les poids lourds – du moins à l’échelon national, puisque le Président de la République a, dans une récente interview, envisagé de la relancer à l’échelle régionale, et plus précisément en Alsace et en Lorraine, régions frontalières de l’Allemagne, où il existe depuis longtemps une taxe sur les poids lourds ; le rapporteur le sait bien, lui qui connaît bien ce pays. En Allemagne, la mise en oeuvre de la taxe avait provoqué beaucoup de contestations et de tensions mais maintenant, plus personne n’envisage de la remettre en cause. Bien au contraire, tout le monde se félicite de ses effets positifs, non seulement sur la répartition des transports de marchandises, mais aussi sur le financement des infrastructures. Si le Président a évoqué le cas de l’Alsace et de Lorraine, c’est qu’il a dû réaliser que nous avions intérêt à faire dans les régions frontalières la même chose que ce que font nos voisins allemands. Je profite donc de l’occasion pour vous demander, monsieur le secrétaire d’État, vous qui êtes un élu de Lorraine, de faire pression dans ce sens au sein du Gouvernement !

Voilà donc la tâche qui attend le gouvernement de la France. Le groupe écologiste sera à ses côtés pour essayer de parvenir à un accord satisfaisant au plan mondial et pour mener une politique ambitieuse aux échelons européen et national.

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