La coopération bilatérale, ancienne, entre le Royaume-Uni et la France, a donc été redéfinie par le traité de Lancaster House. Mais quelle est l'opinion du Gouvernement britannique sur l'Europe de la défense, que le Gouvernement français tente de relancer ? D'autre part, nos deux pays ont mis sur pied des programmes d'armement conjoints déjà avancés, avec l'objectif de parvenir à terme à une industrie missilière franco-britannique. Mais qu'en est-il du projet emblématique de coopération pour les porte-avions ? Le choix fait par le Royaume-Uni de se fournir en F35 à décollage vertical, ce qui ne permet pas la mutualisation de nos moyens, ne lui a-t-il pas donné un coup d'arrêt ?
Sir Peter Ricketts. Nous soutenons l'initiative française tendant à redynamiser l'Europe de la défense quand il s'agit d'améliorer les capacités des pays européens et de les utiliser dans le monde. J'observe que lorsque deux grandes nations européennes, la France et le Royaume-Uni, travaillent ensemble à améliorer leurs capacités, elles contribuent à l'Europe de la défense ; il en est de même des coopérations franco-allemande, italo-britannique et autres, certaines étant maintenant coordonnées par l'Agence européenne de défense. De même, nous accordons une grande importance à la politique sécurité et de défense commune (PSDC). C'est sous commandement britannique que se poursuit l'opération européenne Atalanta de lutte contre la piraterie au large de la Somalie, et nous soutenons sans réserve la démarche de la France visant à organiser une opération européenne destinée au soutien et à la formation des forces maliennes. Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté une résolution relative au Mali à laquelle la France et le Royaume-Uni ont beaucoup travaillé, et nous approuvons l'idée d'une opération européenne destinée à appuyer l'action de la CEDEAO. Le seul point sur lequel nous avons des réserves concerne la création de nouvelles institutions européennes, du type état-major permanent. Nous n'en voyons pas le besoin actuellement, dans la mesure où plusieurs états-majors européens existent déjà. Mais je le répète, nous sommes fermement en faveur du développement des capacités européennes et à leur utilisation.
Nous avons confirmé notre décision de nous doter de deux porte-avions de très grande taille. Notre Livre blanc prévoyait des catapultes et des F35 classiques, qui auraient éventuellement pu être utilisés aussi sur le Charles-de-Gaulle – mais ce n'était pas certain. Cependant, équiper de catapultes les deux porte-avions aurait coûté 2 milliards de livres, un montant inconcevable en cette période de restrictions budgétaires. Nous avons donc opté pour la version du F35 à décollage vertical, qui n'a pas besoin de catapulte. Certes, ce n'est pas entièrement satisfaisant, mais l'essentiel est qu'à partir de 2020 trois porte-avions européens - deux britanniques et un français – seront déployés de manière coordonnée, si bien que l'un des trois sera en permanence disponible pour parer à toute éventualité.