Certes, le déficit de la Sécurité sociale, qui s’élève à 15 milliards d’euros, est très préoccupant, mais il est d’abord dû au manque de recettes. Qu’il faille veiller à l’efficience avec le souci légitime de ne pas gâcher l’argent public ne saurait être confondu avec les réductions drastiques de moyens que vous imposez alors que votre rôle devrait être de soutenir l’excellence de notre système de santé pour répondre le plus et le mieux possible aux besoins des familles et des malades.
En tant qu’élus, nous savons à quel point les établissements publics de santé sont en difficulté et ont besoin d’être accompagnés pour relever les nouveaux défis en matière de santé. Nous mesurons aussi avec inquiétude les difficultés concrètes et quotidiennes que rencontrent de plus en plus de nos concitoyens pour se faire soigner et l’impérieuse nécessité de disposer d’établissements publics de soins pour les accueillir.
Ce PLFSS aurait dû en priorité répondre à ces préoccupations en proposant des réformes structurelles du financement de la Sécurité sociale, par la création de nouvelles recettes. Il aurait dû concrétiser les engagements sur lesquels la majorité des Français vous ont fait confiance, qu’il s’agisse de la lutte contre les paradis fiscaux et la fraude ou la révision du barème de l’impôt sur le revenu – en un mot combattre les dérives de la finance afin de créer les conditions d’une plus juste redistribution des richesses.
Nous vous avons fait des propositions en ce sens. L’un de nos amendements visait à réduire les exonérations de cotisations sociales patronales qui coûtent plusieurs milliards d’euros d’argent public par an et qui n’ont jamais fait la preuve de leur efficacité. Un autre amendement tendait à faire contribuer les revenus financiers des entreprises au même niveau que les salaires. Pourtant, vous avez refusé en bloc ces propositions.
Ce PLFSS incarne, hélas, la droitisation de votre politique, à tel point que, comme l’a indiqué en nouvelle lecture ma collègue Jacqueline Fraysse, la majorité de droite du Sénat n’a eu qu’à vous emboîter le pas pour tirer encore un peu plus le fil de votre logique libérale visant à aggraver profondément le projet de loi initial.
De ce point de vue, je citerai rapidement plusieurs points emblématiques : l’article 55, tout d’abord, porte l’ONDAM à son plus bas niveau, et le Sénat a même proposé de le diminuer davantage pour réaliser une économie supplémentaire de 1 milliard d’euros. De même, à l’article 56, vous avez porté l’âge de départ à la retraite à 62 ans ; les sénateurs proposent de le porter à 64 ans.
En fin de compte, les débats auront tout de même convaincu les sénateurs d’approuver l’exonération des participations forfaitaires et des franchises pour les bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé, ainsi que la suppression de l’instauration de trois jours de carence dans la fonction publique hospitalière. Toutefois, ces modifications sont bien maigres au regard – encore une fois – de ce que nous étions légitimement en droit d’attendre d’une majorité de gauche.
Il restera aussi de ce PLFSS la décision de moduler les allocations familiales en fonction des revenus. En prenant cette décision, vous avez, je le répète, introduit dans notre système de solidarité une faille grave et dangereuse, que vous tentez de surcroît de camoufler derrière l’argument de la justice sociale.
C’est en effet pour faire des économies que vous avez rompu avec le principe d’universalité, et non pour redistribuer plus équitablement les montants de ces prestations. Vous avez la responsabilité de garantir à tout prix la cohésion sociale et la solidarité ; avec ce projet de loi, pourtant, vous avez bien inutilement semé la division entre les forces de gauche du pays, mais aussi entre nos concitoyens.
Pour toutes ces raisons, les députés du Front de gauche maintiendront résolument leur vote contre ce texte.