Ma vision sera peut-être un peu moins pessimiste que celle de M. Mariton, même s’il ne faut pas ignorer les difficultés. Un certain nombre de facteurs nous laissent penser que le scénario proposé par le Gouvernement en matière de croissance peut se réaliser dans les mois qui viennent. On a évoqué la baisse de l’euro, celle du prix du pétrole, et l’on pourrait également parler de la diminution continue des taux d’intérêt. De tels éléments peuvent annoncer un retour de la croissance dans les mois qui viennent.
Par ailleurs, les mesures budgétaires qui nous sont proposées – qu’il s’agisse du projet de loi de finances initiale ou du projet de loi de finances rectificative – maintiennent un équilibre entre le nécessaire ajustement budgétaire – auquel le Gouvernement procède, notamment via une diminution de la dépense qui, à ma connaissance, est d’une ampleur historique – et la volonté de laisser allumés les moteurs de la croissance.
Je veux dire très clairement qu’un ajustement budgétaire plus brutal, alors que l’investissement privé n’est toujours pas reparti, aurait des conséquences très néfastes sur la croissance. C’est pourquoi l’équilibre recherché par le Gouvernement est le bon.
M. Mariton évoquait les incohérences supposées de la politique que nous menons en s’appuyant sur la réaction de M. Macron au rapport franco-allemand. Pour ma part, je me félicite de l’élaboration de ce rapport : il est extrêmement important que la France et l’Allemagne essaient de définir une stratégie commune. J’ai bien entendu la réaction de M. Macron, mais j’ai aussi entendu celle de M. Schäuble. Disons-le clairement : le ministre allemand a fermé la porte aux auteurs du rapport lorsqu’ils demandent à l’Allemagne de faire davantage en matière d’infrastructures et d’investissements. Il faut que nos deux pays continuent à se parler et tentent d’élaborer une stratégie commune, mais force est de constater que la position du ministre des finances allemand n’est pas très encourageante.
Quant à l’assouplissement du droit du travail, nous avons commencé à agir en ce sens, monsieur Mariton. Certes, il faut peut-être aller plus loin – je suis de ceux qui le pensent –, mais cette question dépend aussi du dialogue social et des échanges avec les forces syndicales, auxquelles nous n’avons pas vocation à nous substituer.
J’en viens au plan Juncker. Ce que l’on peut regretter, ce n’est pas l’insuffisance d’argent public, mais l’existence d’une interrogation quant à l’effet de levier proposé : l’apport d’un peu plus de 20 milliards d’euros de capitalisation – mais peut-être faudrait-il examiner ce montant de plus près – est-il cohérent avec l’annonce de plus de 300 milliards d’euros d’investissements ? Cette interrogation n’a pas été exprimée uniquement par le ministre français de l’économie, de l’industrie et du numérique, mais également par de nombreux observateurs. Il convient donc de développer ce plan, que la France a demandé et qui est une bonne chose, et de lui donner plus de force.
Pour toutes ces raisons, nous rejetterons cette motion de rejet préalable.