Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, monsieur le vice-président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, chers collègues, notre assemblée débute ce jour l’examen du second projet de loi de finances rectificative pour 2014, déposé le 12 novembre par le Gouvernement.
Comme chaque collectif budgétaire de fin d’année, ce projet de loi de finances rectificative a principalement pour objet de proposer à la représentation nationale des ouvertures et annulations de crédits – ici, notamment, une nouvelle annulation de 1,6 milliard d’euros sur la charge de la dette – permettant d’assurer une bonne tenue des dépenses de l’État.
Comme le Gouvernement s’y était engagé, dans le cadre d’une meilleure sécurisation de la trajectoire des finances publiques, en établissant des mesures supplémentaires d’économie pour 4 milliards d’euros, le présent projet de loi de finances rectificative permet d’assurer le respect de la norme de dépenses de l’État par une diminution de 3,3 milliards d’euros des dépenses par rapport à la loi de finances initiale pour 2013, hors charges de la dette et des pensions. Le précédent projet de loi de finances rectificative du 8 août 2014 avait déjà procédé à l’annulation de 1,6 milliard d’euros de crédits.
En effet, contrairement à l’année dernière, plusieurs facteurs ont contribué à l’exécution de dépassements des dépenses ministérielles au sein du budget général, notamment les prestations sociales qui, dans un contexte de croissance faible, ont été plus dynamiques que ce qui avait été initialement anticipé. Notons, de plus, que le coût des opérations militaires a dépassé de plus de 600 millions d’euros la provision constituée l’hiver dernier, ce nécessite de la part de l’exécutif des redéploiements importants.
L’effort de modernisation de l’action publique a toutefois permis de compenser ces dépassements circonscrits par une meilleure maîtrise des autres dépenses, par la rationalisation et la priorisation de celles-ci ainsi que par une gestion plus prudente de la réserve initiale de 7,5 milliards d’euros.
Concernant la trajectoire de nos finances publiques, le Gouvernement table, tout comme dans le projet de loi de finances pour 2015, sur une prévision de croissance de 0,4 % jugée réaliste par le Haut conseil des finances publiques, et sur un déficit des administrations publiques de 4,4 % du PIB en 2014, qualifié de vraisemblable par le Haut conseil.
Nous notons que la stratégie de réduction des dépenses publiques porte ses fruits, puisque l’on constate une progression historiquement faible de celles-ci : elle est estimée cette année à environ 16 milliards d’euros, soit la moitié de la croissance moyenne des dépenses constatée sur la décennie 2002-2012. Elle est ainsi contenue à 1,4 % en valeur et à 0,9 % en volume hors crédits d’impôt, même si son impact sur l’effort structurel est toutefois moindre qu’attendu du fait de la faiblesse de l’inflation.
Le solde budgétaire de l’État pour 2014 est évalué à moins 88,2 milliards d’euros, soit une dégradation de 1,2 milliard d’euros par rapport à la prévision révisée associée au projet de loi de finances pour 2015, et de 4,3 milliards d’euros par rapport au collectif budgétaire de cet été.
Ce nouveau solde budgétaire intègre : une révision à la hausse de 100 millions d’euros des prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de 200 millions d’euros du prélèvement au profit de l’Union européenne ; une révision à la baisse de 6,1 milliards d’euros des recettes fiscales nettes ; une révision à la baisse des recettes non fiscales pour 200 millions d’euros ; une amélioration de 1,1 milliard d’euros du solde des comptes spéciaux, notamment le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales ». Le solde des mouvements de crédits sur le budget général, comprenant les investissements d’avenir, aboutit ainsi à une baisse de 1,3 milliard d’euros des crédits du budget général.
Concernant la prévision de recettes nettes, elle est en baisse de 6,1 milliards d’euros comparativement au collectif budgétaire de l’été, du fait de l’impact de la faiblesse de l’inflation et de la croissance sur le dynamisme des assiettes fiscales. Ces moins-values, anticipées en projet de loi de finances pour 2015, sont dues pour l’essentiel à : une minoration de 2,9 milliards d’euros de l’impôt sur le revenu, du fait principalement d’une évolution dégradée des revenus de capitaux mobiliers en 2013 ; une baisse de 1 milliard d’euros de l’impôt sur les sociétés ; une baisse nette de la TVA de 2,2 milliards d’euros, dans un contexte macroéconomique dégradé.
Dans ce projet de loi de finances rectificative, le Gouvernement soumet au Parlement une série de mesures fiscales que, dans leur ensemble, le groupe RRDP soutient.
Concernant la fraude à la TVA, tout d’abord, conformément aux annonces de l’exécutif à l’occasion du dernier comité national de lutte contre la fraude, nous nous réjouissons que l’intensification des moyens de détection et d’intervention soit en cours. Il est également proposé de renforcer l’arsenal juridique de l’administration fiscale concernant par exemple la vente de véhicules d’occasion, les entreprises éphémères du secteur du bâtiment ou encore la vente en ligne. Il faut s’en féliciter.
Concernant la suppression programmée en quatre ans de la taxe de risque systémique, dont le produit est aujourd’hui versé au budget général de l’État pour un rendement de 900 millions d’euros, nous regrettons la position du Gouvernement, qui entend y substituer la contribution de nos banques – dont nous ne nions pas l’importance en volume – au Fonds de résolution unique établi au niveau européen. En effet, le lien entre ces deux contributions, certes réalisées par les mêmes agents, est un peu rapide. La taxe de risque systémique a aussi pour objet de réguler par la taxation les comportements à risque les plus excessifs des établissements de crédit. Par ailleurs, l’Assemblée nationale avait relevé son taux de 0,50 % à 0,539 % en loi de finances pour 2014.
Nous défendrons donc, en toute cohérence parlementaire, des amendements visant à préserver cette taxe bancaire pour des montants qui ne sont pas exagérément lourds pour les établissements, et ce d’autant moins que ceux-ci bénéficient en partie du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE. Nous défendrons également, à l’article 14, un amendement adopté par la commission des finances sur notre initiative visant à relever le taux de la taxe bis de risque systémique, que le Gouvernement instaure aux fins de financer le fonds de soutien des collectivités qui ont contracté des produits structurés, afin de lui assurer un rendement minimum de 50 millions d’euros annuels et ainsi de respecter l’esprit de la loi de finances pour 2014.
Nous voterons également en confiance la suppression de la prime pour l’emploi à l’horizon de 2016, en vue du nouveau dispositif annoncé dès le lancement du Plan de lutte contre la pauvreté par le précédent gouvernement, un dispositif qui devra être mieux ciblé, mieux calibré et qui, nous le souhaitons, prendra mieux en compte les inégalités structurelles entre travailleurs pauvres, selon leur situation personnelle et familiale.
Le Gouvernement a décidé une majoration de la taxe d’habitation à hauteur de 20 % pour les résidences secondaires, dans une démarche volontaire de réduction de la pénurie de l’offre de logements principaux. Toutefois, en limitant l’applicabilité de ce dispositif, on néglige un pan entier du territoire français qui n’est pas moins touché par cette pression foncière aiguë : il s’agit principalement des communes touristiques du littoral et de la montagne. Nous défendrons donc un amendement visant à étendre l’éligibilité de ce dispositif aux communes touristiques et classées : chacune sera alors en mesure de se prononcer sur l’application ou non de cette majoration sur son territoire.
D’autres mesures viennent compléter ce projet de loi de finances rectificative de fin de gestion 2014, notamment un recalibrage de la taxe sur les nuisances sonores aériennes ou TNSA, que nous soutenons. Nous proposerons toutefois par un amendement de déplafonner cette taxe de 3 millions d’euros afin de mieux répondre aux demandes des riverains d’aéroports concernant la prise en charge de l’insonorisation de leurs logements, dans la mesure où plusieurs centaines de dossiers sont bloqués depuis le mois de décembre 2013 au niveau des commissions consultatives d’aide aux riverains des aéroports parisiens et que près de 8 000 dossiers sont en attente à l’heure actuelle. Nous souhaitons que cet amendement connaisse une issue favorable.
Nous défendrons enfin plusieurs dispositifs : une majoration de 50 % du montant de la TASCOM, la taxe sur les surfaces commerciales, uniquement pour les établissements commerciaux s’acquittant déjà de la taxe et dont la surface de vente excède 2 500 mètres carrés ; le maintien au taux de 20 % et jusqu’en 2020 du crédit d’impôt investissement au bénéfice de la Corse, que le secrétaire d’État chargé du budget avait préfiguré lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015 ; une modification du régime des sociétés mères et filiales pour le resserrer sur les seules situations de double imposition, afin de consacrer le principe selon lequel une distribution exonérée chez la filiale ne peut bénéficier du régime mères-filles, quel que soit le lieu d’implantation de la filiale ; enfin, nous défendrons un léger relèvement des contributions perçues sur les boissons et préparations liquides pour boissons visant à augmenter d’environ 80 millions d’euros le produit de cette contribution affectée au budget de la Sécurité sociale et qui avait bénéficié d’un avis de sagesse bienveillante du secrétaire d’État chargé du budget lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015.
Sous réserve d’une issue favorable concernant une majorité de nos propositions, le groupe RRDP votera ce second projet de loi de finances rectificative pour 2014.