Intervention de Gaby Charroux

Séance en hémicycle du 1er décembre 2014 à 21h30
/14/dossier/1 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaby Charroux :

Le fonds créé dans le cadre de ce plan d’investissement ne sera doté « que » de 20 milliards d’euros. Pour atteindre ces fameux 300 milliards d’euros, la Commission table sur un effet de levier qui relève presque du miracle. Peut-être attendait-elle un geste divin du pape François, qui s’est rendu au Parlement européen mercredi dernier, pour rendre ce miracle possible ?

Ce n’est pas en opérant des coupes aveugles dans les budgets, notamment ceux des collectivités territoriales, qu’il sera possible de mobiliser l’argent public et privé autour de ce plan d’investissement. Nous considérons que la première des urgences est d’en finir avec les politiques d’austérité, qui tuent dans l’oeuf tout redémarrage de l’économie, précarisent et paupérisent les peuples européens.

Cette paupérisation est d’ailleurs visible à travers les éléments budgétaires que vous nous soumettez aujourd’hui : les prestations sociales, filet de sécurité pour les personnes touchées de plein fouet par la crise, sont en hausse. Elles continueront à l’être si l’Europe et vous-mêmes vous obstinez à renforcer les politiques de rigueur.

S’agissant des autres postes budgétaires, nous nous interrogeons sur la pertinence de financer le surcoût des opérations extérieures par des annulations de crédits du même ministère de la défense.

Concernant les mesures de ce projet de loi, nous sommes nombreux sur ces bancs à nous interroger sur la suppression de la prime pour l’emploi, dont il est prévu qu’elle soit remplacée par un nouveau dispositif qui sera présenté au Parlement courant 2015. Comment pouvons-nous nous prononcer sur cette suppression sans connaître le contenu du futur dispositif ? Quels en seront les contours ? Le pouvoir d’achat des plus modestes sera-t-il garanti ? Y aura-t-il des perdants et des gagnants ? Les enjeux pour nos concitoyens sont bien trop importants pour remettre un blanc-seing. Les questions demeurent aujourd’hui sans réponse précise, même si vous avez indiqué quelques pistes dans votre intervention, monsieur le secrétaire d’État.

Une autre mesure phare du PLFR est l’exonération fiscale accordée aux organismes chargés de l’organisation en France d’événements sportifs internationaux. Il nous est proposé d’accorder de manière générale et pérenne un régime fiscal ultra favorable à ces fédérations qui réalisent des bénéfices énormes dans l’organisation de ces événements. Cette mesure est scandaleuse !

Rappelons que les bénéfices attendus par la FIFA pour l’organisation de la coupe du monde de football de l’été dernier sont de 3 milliards d’euros ! Par contre, la note payée par le Brésil s’élève à 15 milliards d’euros, pour des retombées plus qu’incertaines. Nous considérons que l’État n’a pas à encourager ou à cautionner le dumping fiscal sportif. Par le passé, l’application du régime commun d’imposition ne nous a pas empêchés d’obtenir l’organisation d’événements sportifs d’ampleur, comme la coupe du monde de rugby ou les championnats du monde d’athlétisme. Nous proposerons donc la suppression de cette disposition.

Je souhaite mettre l’accent sur deux mesures qui nous semblent aller dans le bon sens. Une taxe additionnelle de 20 % sera appliquée aux résidences secondaires dans les zones où la situation du logement est tendue. L’exemple de Paris est à cet égard très frappant : on y compte environ 170 000 résidences secondaires, presque autant que de demandes de logements sociaux ! Nous sommes donc favorables à votre proposition. Nous défendrons aussi plusieurs amendements relatifs à la situation du logement et des locaux professionnels en Île-de-France.

Par ailleurs, la taxe de risque systémique ne sera plus déductible. Nous avons proposé cette mesure lors des derniers débats budgétaires et nous nous félicitons de la voir aujourd’hui reprise.

Lors de l’examen des articles, nous proposerons de donner plus de vigueur à la réglementation du secteur financier, notamment sur la taxation des transactions financières, après que le Gouvernement a défendu une position a minima lors des négociations récentes à Bruxelles, en contradiction complète avec ses déclarations lors de l’examen du budget pour 2015. Nous demanderons que toute la transparence soit faite à ce sujet.

Nous proposerons également d’étendre aux compagnies d’assurance la règle du reporting pays par pays, applicable aux banques depuis l’entrée en vigueur de la loi de séparation bancaire. La publication de ces informations est d’utilité publique. Compilées et analysées par une plate-forme d’ONG, elles confirment que les paradis fiscaux sont bel et bien au coeur de l’activité internationale des banques. Nous proposerons de nous appuyer sur la publicité de ces informations pour instaurer une contrepartie fiscale à l’utilisation massive des paradis fiscaux par ces banques.

Enfin, je veux aussi souligner l’évolution de la masse salariale. Oui, la masse salariale est en hausse, notamment grâce à l’augmentation du nombre de salariés dans l’éducation nationale, ce qui nous semble un très bon signe !

C’est dans un esprit toujours constructif, monsieur le secrétaire d’État, mais avec peu d’espoir – disons-le tout net – que nous abordons la lecture de ce nouveau texte financier. Nos amendements porteront ces propositions mais surtout, notre exigence de réorientation de la politique budgétaire de la France.

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