Intervention de Alain Tourret

Séance en hémicycle du 3 décembre 2014 à 15h00
Surveillance des filières djihadistes — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Tourret :

Une mise à jour des travaux peut donc parfaitement se concevoir : avec l’amplification des flux, on peut estimer que de nouveaux phénomènes interviennent.

L’actualité récente, cela a été rappelé par Pierre Lellouche, a été marquée par le massacre de plusieurs soldats syriens et d’un travailleur humanitaire américain, massacre auquel auraient participé deux Français, ce qui est tout de même totalement nouveau. Pourquoi ? Jusqu’où cela peut-il aller ? Y a-t-il d’autres personnes susceptibles de commettre de tels crimes ? Telles sont les questions auxquelles nous devons trouver des solutions.

Il serait d’ailleurs bon de disposer des chiffres du procureur de la République de Paris en temps réel, chaque mois. D’après François Molins, ce sont 1 132 Français qui sont à ce jour impliqués dans les filières djihadistes, dont 376 seraient présents en Syrie et en Irak, dont au moins 88 femmes et 10 mineurs. La structuration de ce nombre se différencie-t-elle semaine après semaine ? Il serait bon de le savoir, et c’est ce à quoi la commission d’enquête serait utile.

Face à l’ampleur de ce phénomène, la nécessité d’un renforcement de la surveillance des filières et des individus djihadistes ne saurait donc être contestée. Nous le savons, certains individus présentent à leur retour en France un risque sérieux de passage à l’acte terroriste. Nous nous en voudrions énormément si une telle commission n’était pas constituée et que des actes terroristes se produisaient sur le sol français.

Par ailleurs, il est parfaitement exact que d’autres travaux ont été réalisés par l’Assemblée nationale, en particulier le rapport qui a été publié le 24 mai 2013 et celui de la mission d’information sur l’évaluation du cadre juridique applicable aux services de renseignement, qui a été cité tout à l’heure et qui remonte à environ dix-huit mois.

On peut dès lors voir les choses de deux façons : estimer que la commission est inutile car le phénomène a déjà été étudié, ou considérer qu’on peut s’appuyer sur un substrat pour aller plus loin. C’est plutôt ce raisonnement que je tiens. Quelles évolutions peut-on constater depuis les conclusions qui ont été rendues dans le rapport publié voilà dix-huit mois ? C’est à partir de ce constat que nous pourrons faire des propositions sur un sujet aussi important pour la sécurité de chacun.

Je rappelle également que le Sénat a décidé le 9 octobre dernier la création d’une commission d’enquête sur l’organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe.

On pourrait souhaiter interdire par le règlement toute concurrence entre les travaux des deux assemblées, au profit d’une corrélation ou d’une complémentarité. Les deux commissions pourraient d’ailleurs se réunir afin de travailler ensemble, les présidents et les rapporteurs pourraient échanger leurs informations et travailler de concert. C’est ainsi que pourrait se traduire la complémentarité que j’appelle de mes voeux, mais je m’en remets à cet égard bien évidemment à la sagesse des deux présidents et des deux rapporteurs.

Pour conclure, j’ajouterai qu’il serait pertinent que l’évaluation de l’efficacité des moyens de surveillance des filiales et des individus soit faite dans la perspective de la loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme. Les travaux de la commission permettront ainsi d’observer et d’analyser les premiers effets de cette loi, ce qui constitue également un élément important.

Comme vous le voyez, mon état d’esprit est très positif. Devant la commission, je m’en étais remis à la sagesse de ses membres, car je pensais que c’était le rôle du rapporteur. J’ai écouté les avis et les opinions de chacun. Je me rallie donc aujourd’hui pleinement à la création de cette commission d’enquête.

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