Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, nous abordons une question délicate, qui touche à la manière dont la science et la technique sont capables de changer non seulement le monde, mais nos vies. La science et la technique peuvent beaucoup : elles l’ont prouvé dans le passé. Faut-il pour autant faire tout ce qu’elles permettent ? C’est aux sociétés de le décider.
Certains pays autorisent la gestation pour autrui, alors qu’elle est interdite en France. C’est donc bien un choix de société : tout ce qui est possible n’a pas vocation a devenir légal.
Certains disent que la gestation pour autrui existe depuis toujours. Certes, mais il fut un temps où on ne choisissait pas d’être enceinte ou non, sinon au péril de sa vie. Il fut un temps où l’enfant était le « bâton de vieillesse », que de riches couples infertiles pouvaient se procurer chez les pauvres. Les récits de Maupassant sont remplis de telles histoires – « L’Histoire d’une fille de ferme » et tant d’autres.
Mais une société, c’est bien plus que ça. Une société est constituée par le droit, intermédiaire entre la nature, les moeurs, le désir des individus et le marché, aujourd’hui où le désir devient marché. Le rôle du droit, le rôle de la loi, donc celui du politique, est de construire les règles dans lesquelles s’inscrira la société, notamment dans ses dimensions les plus fortes que sont la vie et la filiation.
Juridiction supranationale, la Cour européenne des droits de l’homme,siégeant en chambre, et non pas en grande chambre, s’est prononcé à deux reprises sur le cas des enfants issus d’une GPA, dans des arrêts concernant respectivement la France et la Belgique. Le problème, c’est qu’elle ne dit pas la même chose dans les deux cas.