Intervention de Ary Chalus

Séance en hémicycle du 4 décembre 2014 à 15h00
Déchéance de nationalité pour les atteintes aux forces armées et de police — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAry Chalus :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour l’examen de la proposition de loi visant à déchoir de la nationalité française tout individu portant les armes contre les forces armées françaises et de police – et j’aurais aimé qu’on y adjoignît les représentants de l’État.

Cette proposition présentée par nos collègues du groupe UMP et portée par le rapporteur Philippe Meunier vise à limiter les actions engagées contre l’armée française par des hommes et des femmes enrôlés dans des actes de terrorisme, en les empêchant de bénéficier de la nationalité française.

Nous partageons certains de leurs constats. L’intensification de la menace terroriste et la radicalisation de ressortissants français qui conduit ceux-ci à commettre des actes de terrorisme sur des terrains étrangers sont saisissantes.

L’attaque de trois militaires à Toulouse et à Montauban les 11 et 15 mars 2012, suivie de la tuerie du collège lycée juif Ozar Hatorah de Toulouse le 19 mars par Mohammed Merah, qui ont fait sept victimes au total, ont mis sur la scène médiatique le problème de l’islam radical. La question de la radicalisation des ressortissants français se pose avec encore plus d’acuité depuis l’attaque du Musée juif de Bruxelles par Mehdi Nemmouche le 24 mai 2014.

Depuis le 29 juin 2014, l’organisation terroriste « État islamique en Irak et au Levant », sévissant en Irak et en Syrie, s’est proclamée « État islamique », en établissant un califat sur les territoires qu’elle contrôle, sous la direction de Abou Bakr al-Baghdadi, auto-proclamé « chef des musulmans partout dans le monde ». Cet État islamique, non reconnu par la communauté internationale, a pour idéologie le respect rigoureux des préceptes de l’islam ainsi que la guerre sainte contre ses ennemis.

De nombreux ressortissants français ou des personnes résidant sur le territoire français sont partis volontairement à l’étranger dans le but de participer à des activités terroristes. Au 17 juillet 2014, les services français recensaient 899 personnes concernées par ce phénomène, soit une progression de 58 % en six mois, tandis que le Premier ministre Manuel Valls évoquait dans son discours de politique générale du 16 septembre 2014 un nombre de 930 personnes impliquées dans le terrorisme en Syrie et en Irak. Ces départs volontaires représentent une menace majeure pour la France, mais le Premier ministre a déclaré que l’armée française est prête à répondre à cette menace, sans doute la plus importante de ce début de vingt et unième siècle.

De nombreuses actions sont menées pour prendre la mesure de la menace terroriste. Le 15 septembre 2014 a ainsi été organisée à Paris, par la France et l’Irak, une conférence internationale sur la paix et la sécurité en Irak réunissant les représentants d’une trentaine d’États. Cette conférence internationale avait pour but de réfléchir aux actions à mettre en place pour endiguer la progression de l’État islamique. Engagement a été pris d’amplifier l’aide humanitaire et de renforcer les mesures en faveur de la lutte contre le terrorisme.

Lors de sa conférence de presse du 18 septembre 2014, le Président de la République François Hollande a confirmé l’intervention militaire des troupes françaises en Irak, « dans un délai court, dès qu’elles auront identifié les cibles ». L’intervention a débuté le lendemain.

Ce constat a conduit le Gouvernement à adopter le 23 avril dernier, en Conseil des ministres, un « plan de lutte contre la radicalisation violente et les filières terroristes ». La récente loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme a permis d’encadrer ce plan et de prendre des dispositions de prévention et de répression des actes terroristes.

Cette loi institue un dispositif d’interdiction de sortie du territoire des ressortissants français lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’ils souhaitent se déplacer à l’étranger afin de commettre des actes terroristes ou sur un théâtre d’opérations terroristes dans des conditions susceptibles de les conduire à constituer une menace lors de leur retour sur le territoire national.

Elle institue également un dispositif d’interdiction administrative du territoire lorsque leur présence constitue une menace réelle, du point de vue de l’ordre et de la sécurité publics, pour les intérêts fondamentaux du pays.

En outre, elle renforce les mesures d’assignation à résidence des étrangers condamnés à des peines d’interdiction du territoire pour des actes de terrorisme. Les dispositions de nature répressive sont également renforcées, les peines encourues étant aggravées.

Enfin, elle prévoit un renforcement des moyens d’investigation et de prévention de la commission d’actes de terrorisme. Tous ces dispositifs, proportionnés et efficaces, permettent de répondre aux besoins de prévention et de répression des actes de terrorisme.

II apparaît donc souhaitable d’attendre la mise en oeuvre effective de ces actions, et il ne nous semble pas nécessaire de multiplier les dispositions de lutte contre le terrorisme, d’autant que la proposition de loi soumise à notre examen comporte de nombreuses dispositions critiquables.

En effet, elle contrevient au principe d’égalité, car elle ne peut être appliquée à l’ensemble des ressortissants français, et elle introduit donc de fait une différenciation et une catégorisation des citoyens.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion