Il me semble même que M. Rousset a fait ses comptes : comme il va devoir aligner tous ses fonctionnaires désormais sur ceux qui sont les mieux payés, cela va au contraire lui occasionner des dépenses nouvelles !
Tout en étant hostiles à cette fusion bloc par bloc, nous avions proposé d’avancer sur la question en permettant un ajustement démocratique de cette carte élaborée dans les salons parisiens. Cet ajustement devait être rendu possible par un véritable droit d’option, garant d’une certaine souplesse.
C’est le deuxième point sur lequel il aurait fallu écouter le Sénat, même s’il n’allait sans doute pas aussi loin que nous le souhaitions. En effet, le Sénat avait également fait évoluer le texte sur les conditions d’exercice du droit d’option des départements en le rendant plus souple, avec un droit de veto pour la région d’origine à la majorité des trois cinquièmes, dite des « trois cinquièmes négatifs ».
Les modifications apportées en deuxième lecture par notre assemblée, malgré un désaccord sur tous les bancs, ont consacré un droit d’option totalement verrouillé, constituant ainsi un point de divergence important entre les deux assemblées. Puisqu’il s’agit d’un des derniers points sur lesquels il existe une faible lueur d’espoir d’évoluer, je souhaite revenir ici plus longuement sur le droit d’option, et notamment sur l’imposition d’un droit de veto de la région d’origine, qu’il soit à la majorité des trois cinquièmes ou pas.
En effet, pour justifier cette contrainte imposée au droit d’option, notre rapporteur, notamment utilise une analogie éminemment discutable : Il nous est expliqué que pour une communauté d’agglomération ou une communauté de communes, il faut d’abord l’accord du conseil municipal concerné, mais également l’accord à la majorité qualifiée des deux communautés de communes ou communautés d’agglomération, représentant chaque fois soit deux tiers des communes et la moitié de la population, soit la moitié des communes et les deux tiers de la population.
Il nous est également expliqué que ce ne sont pas seulement des territoires qui souhaitent changer de région de rattachement, ce ne sont pas uniquement nos concitoyens qui, représentés par leurs élus départementaux et régionaux, font ce choix : ce sont aussi des collectivités constituées, qui ont travaillé pendant plus de trente années, après que l’État a lui-même travaillé dans ces circonscriptions d’action régionale ; ainsi, au-delà de ce travail et des agents concernés, cela met aussi en lumière l’existence d’un actif et d’un passif.
Mes chers collègues, l’histoire des régions est pourtant toute autre que celle des communautés de communes ! En effet, Étienne Clémentel, par un premier arrêté ministériel, institua des groupements économiques régionaux le 5 avril 1919. Ces régions économiques regroupaient des chambres de commerce.
La triste loi du 19 avril 1941 créa des préfectures de région à compétence supra-départementale, tandis que celle du 21 mars 1948 mit en place des inspecteurs généraux de l’administration en mission extraordinaire chargés de coordonner au sein de treize circonscriptions – déjà ! – l’action des régions de défense et des préfets de départements. Puis ce furent les régions du décret Pflimlin de 1955, avec leurs programmes d’action régionale, avec un préfet de région à compter de mars 1964.
Vint ensuite la loi du 5 juillet 1972 portant création et organisation des régions, qui crée dans chaque circonscription d’action régionale un établissement public : la région ou établissement public régional. Chaque région est administrée par un conseil régional assisté d’un comité économique et social. Le conseil régional est alors composé des députés et sénateurs, de représentants des conseils généraux et de représentants des agglomérations.
Puis vint un gouvernement de gauche – bien inspiré, il est vrai –, avec les lois de décentralisation et la création des régions, érigées en collectivités territoriales par la loi du 2 mars 1982 instaurant le passage de l’établissement public d’État à la collectivité.
Ainsi mes chers collègues, à aucun moment, les départements ne se sont réunis pour créer une région. La région n’a jamais été un syndicat mixte de départements et de communes ni, a fortiori, un établissement public de coopération départementale.
La construction de l’intercommunalité a bien été le regroupement des communes, sur une base essentiellement volontaire. Les communes se sont dessaisies, partiellement ou totalement, de certaines compétences, de moyens, d’impôts, voire de personnel, pour les confier à la nouvelle structure. Ces établissements publics de coopération intercommunale, ou EPCI, ont constitué un capital, avec un actif et un passif ; il est légitime qu’en cas de divorce, il y ait consultation.
Mais l’histoire du fait régional, comme je l’ai exposée, est tout autre. Les régions ne se sont pas construites par un volontariat départemental ; les conseils généraux ne se sont pas dessaisis de compétences pour les transférer aux régions, pas plus que n’ont été transférés des moyens, des taxes ou des personnels. C’est l’État, quand on parlait encore de décentralisation, qui a transféré une partie de ses moyens et de ses compétences.
Il n’y a strictement aucune raison de demander à une région d’émettre un avis sur le départ de l’un ou l’autre de ses membres, sauf à admettre le principe anticonstitutionnel que la région puisse exercer une tutelle sur une autre collectivité, c’est-à-dire le département. Les départements n’ayant pas créé la région, la région ne peut en effet empêcher une collectivité autonome par la Constitution, de suivre sa voie, dans son ressort ou dans une autre région.
Le devenir d’un département regarde d’abord son conseil départemental, voire ses habitants, mais sûrement pas la région qui le chapeaute ou encore les communes qui le composent.
Le 11/12/2014 à 11:16, laïc a dit :
De toute façon il y a l'article 72 alinéa 5 de la constitution qui prévient ce genre de chapeautage en interdisant le droit de tutelle d'une collectivité locale sur une autre.
Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui