Vous savez très bien que la carte idéale n’existe pas. La « bonne » carte est nécessairement un compromis, un point d’équilibre entre ce qu’il est possible de faire pour que la réforme – très largement souhaitée par les Français – soit possible.
Pour toutes ces raisons-là – le Premier ministre l’a d’ailleurs répété hier à l’occasion d’un discours prononcé au Sénat – il importe à un moment donné de prendre ses responsabilités, de faire des propositions et d’essayer d’avancer.
Je souhaiterais répondre sur un deuxième point qui a été très souvent évoqué par les parlementaires alsaciens et bretons : le nécessaire équilibre à trouver entre, d’une part, le respect de l’identité et, d’autre part, le devoir que nous avons de doter nos territoires de capacités de modernisation. Je répondrai ainsi aux interventions de Marc Le Fur, François de Rugy et de tous ceux qui se sont exprimés à ce sujet.
On peut bien entendu toujours reprocher à des ministres ou à des membres de l’Assemblée ce qu’ils pensent – c’est même l’objet du débat politique – à condition que ce soit précisément bien ce qu’ils pensent. En effet, on ne peut prêter à autrui des intentions qu’il n’a pas afin de mettre en cause sa démarche et ses orientations.
J’ai entendu dire que ce texte était jacobin et que j’étais moi-même un ministre jacobin. Mais je ne l’ai jamais été ! Si tel était le cas, je l’assumerais, mais je n’ai jamais considéré qu’il était risqué de confier à des collectivités territoriales des compétences qui relèvent de l’État, dès lors que cela permet de développer des territoires, d’y créer de la croissance et d’y faire venir des projets.
Cela n’a jamais été conforme à ma pensée. Vous ne trouverez dans ce texte absolument aucun transfert de compétences exercées par les collectivités locales à l’État – ce qui serait en effet d’un projet jacobin. Il ne s’agit en rien d’un texte de recentralisation, que je ne préconise d’ailleurs pas.
Comme le Premier ministre, je suis désireux de faire en sorte que l’on clarifie d’abord les compétences entres collectivités territoriales – telle est la position du Gouvernement, du Premier ministre et celle que je défends à ce banc – et que nous puissions, à l’occasion de la loi NOTRe visant à évaluer la répartition des compétences entre les collectivités locales, si c’est nécessaire, notamment, au terme du travail que nous faisons s’agissant de l’administration territoriale de l’État, définir les conditions dans lesquelles nous pouvons aller plus loin dans la décentralisation.
Tels sont les premiers points sur lesquels je tiens à insister : premièrement, nous sommes engagés dans un exercice difficile mais nous avons pris nos responsabilités et nous les assumons ; deuxièmement, nous ne sommes pas animés par une volonté jacobine ou de recentralisation mais par une volonté de clarification. A l’occasion de l’examen de la loi NOTRe, une nouvelle étape de la décentralisation pourra être envisagé, le cas échéant.
Troisièmement, je voudrais revenir sur le débat entre identité et modernité ou identité et région économique.
Ce débat a été passionné et, sur de tels sujets, je ne peux que le comprendre. Contrairement à ce qui a pu être dit, je comprends très bien que des élus soient très attachés aux racines et à l’histoire de leur territoire. Il n’est d’ailleurs pas possible de construire quoi que ce soit si on les ignore.
Je dis simplement qu’il n’existe pas d’antinomie entre le respect des identités et la possibilité, pour des collectivités territoriales, de décider de porter ensemble des projets économiques.
Autrement dit, je ne pense pas que la Bretagne, l’Alsace ou la Lorraine disparaîtront si, dans cette enceinte, nous décidons de donner à ces régions la capacité de nourrir des projets communs. Je pense même qu’à l’intérieur de ces grandes régions, ces identités pourront s’exprimer aussi pleinement qu’hier.
Je fais d’ailleurs remarquer aux élus alsaciens que si le projet de collectivité territoriale que vous appelez de vos voeux a échoué, c’est parce qu’un certain nombre d’élus n’ont pas appuyé le projet du président Richert lorsqu’il l’a présenté.