Intervention de Bernard Cazeneuve

Séance en hémicycle du 9 décembre 2014 à 15h00
Réforme de l'asile — Présentation

Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur :

Néanmoins, d’autres amendements, certes peu nombreux, sont à mes yeux susceptibles de poser des difficultés : la rédaction adoptée en matière de droit à la formation professionnelle semble peu opérante ; la disposition permettant à la CNDA de ne pas soumettre au contradictoire certaines pièces de la procédure, lorsque cela mettrait en jeu la sécurité nationale ou la vie de certaines personnes, soulève également de très délicates questions juridiques.

Le Gouvernement soumettra bien sûr ces diverses difficultés à l’appréciation de la représentation nationale, de même qu’il s’efforcera de clarifier, au cours des débats, tous les autres points qui méritent encore de l’être. Je pense notamment au régime de la domiciliation, ou encore à celui de l’apatridie, qui nécessite une base législative plus claire, même si ce n’est pas l’objet du présent projet de loi.

Mesdames, messieurs les députés, en la matière, nous n’avons pas le droit de fuir nos responsabilités, ni de nous complaire dans des postures maximalistes, quelles qu’elles soient, qui peuvent certes flatter nos egos ou nos organisations politiques, mais ne rendent pas service aux authentiques demandeurs d’asile. Voilà pourquoi nous proposons une réforme à la fois globale et équilibrée.

Il ne suffira pas de voter des dispositions, même ambitieuses, pour transformer la demande d’asile en France. Je peux vous l’assurer : chacune des institutions concernées est aujourd’hui prête à participer pleinement à cette grande réforme que nous sommes nombreux à juger nécessaire. L’OFPRA, comme je l’ai dit, a déjà obtenu des résultats tangibles et va poursuivre son traitement vigilant et adapté des dossiers des demandeurs d’asile. Les missions de l’OFII sont progressivement redéfinies pour coïncider avec les exigences affirmées par la loi. La CNDA est engagée dans un effort de raccourcissement des délais de jugement, qui doit se poursuivre. Les préfectures sont à pied d’oeuvre pour enregistrer la demande d’asile dans des délais compatibles avec les directives.

Avec l’amélioration de nos dispositifs d’intégration, l’accueil des étudiants et des talents étrangers, la lutte contre les filières d’immigration irrégulière, la réforme du droit d’asile est l’un des quatre piliers de notre politique à l’égard des étrangers en France. Elle est aussi la plus symbolique.

En effet, le droit d’asile n’est surtout pas l’expression de la mauvaise conscience qu’un pays nourrirait à l’égard des misères du monde. C’est un droit qui nous oblige, parce qu’il est l’incarnation de ce que nous sommes : une République fière des valeurs universelles qu’elle défend en toute occasion, et solidaire de l’humanité qui souffre.

Voilà pourquoi la présente réforme est indispensable si l’on veut rendre au droit d’asile le rôle fondamental qui est le sien, conformément à la vocation historique de la France et aux valeurs de la République.

Le 28 mars 1933, à la Chambre des députés, le socialiste Jules Moch apostrophait ainsi le ministre de l’intérieur de l’époque, Camille Chautemps : « La France, j’en suis sûr, voudra rester, dans cette Europe en folie, le refuge de tous les persécutés. Des ordres, n’est-ce pas, monsieur le ministre, seront donnés à toutes nos frontières, pour que ceux qui ont pu fuir les fusils nazis ou les mitrailleuses de la Reichswehr, là où on en a déjà placé, trouvent chez nous cet accueil fraternel qui a été de tout temps la gloire et l’honneur de la France ».

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