Intervention de Jean-Louis Touraine

Séance en hémicycle du 9 décembre 2014 à 15h00
Réforme de l'asile — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Touraine, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales :

Il me paraît normal que les demandeurs aient à signaler leur absence afin que les directeurs de CADA puissent gérer au mieux les places disponibles sans en laisser certaines indûment vacantes.

Le texte adopté en commission des lois alourdit quelque peu, au risque de la ralentir, la procédure présidant à l’adoption du Schéma national d’hébergement ou d’accueil et des schémas régionaux en associant plusieurs ministères et les conférences territoriales de l’action publique. L’essentiel est d’aboutir rapidement à un système d’hébergement plus efficace et plus équitable. De même, un amendement adopté en commission des lois dispose que le directeur du lieu d’hébergement sera consulté sur chaque admission. Cette mesure ralentira l’admission et risque de conduire à ce que certains directeurs considèrent comme indésirables des demandeurs en raison de leur origine ethnique ou autre.

La détection de la vulnérabilité est une question très délicate. Félicitons-nous du fait que le projet de loi prévoie une procédure particulière pour que les besoins spécifiques des personnes vulnérables soient pris en compte. Les demandeurs d’asile étaient autrefois des hommes seuls, qui venaient de pays en guerre ; aujourd’hui, de plus en plus souvent, ce sont des familles avec des enfants, des mineurs isolés ou des femmes seules qui ont subi des violences et savent qu’elles peuvent faire valoir leurs droits dans notre pays.

En revanche, il ne me paraît pas très opérationnel de proposer aux personnes vulnérables de passer un bilan de santé de droit commun car les médecins qui font passer ce bilan connaissent très mal les problématiques de l’exil et les risques qui y sont souvent associés. Je regrette que l’on fasse un procès d’intention aux médecins de l’OFII, qui restent avant tout des médecins à la déontologie rigoureuse. Il faut que les professionnels de santé travaillent en réseau pour orienter les patients vulnérables vers les services spécialisés qui ont déjà travaillé sur les actes de torture ou sur la problématique des viols de guerre, par exemple. Il importe que soient également dépistés et traités le plus tôt possible les états infectieux éventuellement contagieux, dans l’intérêt même des demandeurs d’asile.

Enfin, le projet de loi instaure une allocation unique, qui prend en considération la charge de la famille. Aujourd’hui, une personne seule perçoit la même allocation qu’une personne isolée avec trois enfants ; c’est injuste car, vous me l’accorderez, les besoins ne sont pas les mêmes. Cette nouvelle allocation devra permettre, pendant le temps de l’examen du dossier de demande d’asile, que les conditions de vie de chacun soient décentes. C’est pourquoi je défendrai un amendement qui, dans sa version initiale, avait été adopté par la commission des affaires sociales et auquel j’ai ajouté des précisions pour indiquer qu’il n’entraînerait aucune charge supplémentaire. Son adoption n’introduirait qu’une évidente justice dans la répartition des ressources.

Ce projet de loi représente une réelle avancée. Il accorde de nouvelles garanties aux demandeurs, notamment dans le déroulement de la procédure devant l’OFPRA, au cours de laquelle ils auront la garantie d’être accompagnés et assistés par une personne ressource. Des délais d’instruction plus brefs permettront aux réfugiés de s’organiser pour leur nouvelle vie, notamment en ayant la possibilité d’accéder à un emploi au bout de neuf mois. La durée d’hébergement en CADA sera plus courte, ce qui permettra de satisfaire davantage de demandeurs.

Cette réforme demande un effort de mobilisation pour l’OFPRA, pour l’OFII et pour la CNDA, mais ce mouvement est déjà amorcé, comme le prouvent les chiffres récents, très significatifs, que vient de nous donner M. le ministre de l’intérieur. Améliorer le droit d’asile en France sera notre fierté, notre honneur.

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