Intervention de Éric Ciotti

Séance en hémicycle du 9 décembre 2014 à 15h00
Réforme de l'asile — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti :

Ceux-ci détournent nos procédures ; les officiers de protection de l’OFPRA nous ont ainsi montré, au cours d’une visite effectuée l’année dernière, avec quelques collègues parlementaires, des lettres stéréotypées relatant les mêmes récits de vie, à la virgule près. Ces récits sont vendus par des réseaux implantés dans des pays tels que le Kosovo. C’est donc par manque de vigilance que le Conseil d’État l’a retiré de la liste des pays d’origine sûrs.

Plus généralement, cette hausse des demandes ne s’explique qu’en partie par la multiplication des conflits internationaux. Je n’ignore pas que la situation géopolitique est particulièrement troublée et inquiétante, notamment dans certaines zones – j’ai évoqué tout à l’heure l’Irak et la Syrie. On ne peut cependant expliquer l’augmentation du nombre de demandeurs d’asile par cette seule situation : c’est une augmentation structurelle, car elle repose essentiellement sur des demandes infondées, provenant de filières qui utilisent l’asile comme un moyen légal d’entrer sur le territoire national.

Votre projet de loi, monsieur le ministre, ne prévoit pas les moyens nécessaires pour répondre à cette hausse des demandes. Vous ne vous affrontez nullement à la réalité de ce détournement de procédure, qui conduit pourtant notre système d’asile, inexorablement, à l’embolie, et qui menace l’existence même de celui-ci !

J’insisterai sur un troisième point : l’allongement des délais de traitement, qui entraîne un effet d’aubaine.

Ainsi, vous précisez dans l’exposé des motifs que « l’allongement des délais de traitement de la demande d’asile […] ouvre aux demandeurs une période de droits […] qui incite au dépôt de demandes abusives ». Vous avez raison. Vous ajoutez que ces demandes abusives « contribuent à engorger davantage le dispositif. »

En effet, l’augmentation des demandes d’asile se traduit par une hausse du stock d’affaires en instance à l’OFPRA. Au total, 30 000 dossiers sont en attente, malgré les efforts que j’ai évoqués il y a quelques instants, et le délai global d’examen atteint une durée moyenne supérieure à seize mois.

Le système est devenu tellement protecteur des droits des demandeurs d’asile et, plus largement, de ceux des réfugiés, que de nombreuses familles parviennent, en utilisant toutes les voies de droit, à se maintenir cinq ans sur le territoire, avant d’avoir accès à une régularisation « Valls », selon le nom de la circulaire publiée par votre prédécesseur place Beauvau, aujourd’hui Premier ministre.

Mes chers collègues, je vous invite à suivre le parcours type d’un demandeur d’asile. Il peut d’abord, sans trop se presser, déposer sa demande d’asile plusieurs semaines après son arrivée en France, ce qui facilite déjà la fraude, voire la favorise. Le texte initial proposait un délai de quatre-vingt-dix jours, délai qui a été allongé à cent vingt jours par les commissaires de votre majorité. Nous proposerons d’ailleurs des amendements visant à revenir à un délai décent et de bon sens.

Ensuite, s’il est débouté par l’OFPRA, ce qui est le cas dans 75 % des demandes, l’étranger peut faire appel devant la Cour nationale du droit d’asile – la CNDA. Si celle-ci rejette sa demande, ce qui correspond à 78 % des cas en moyenne, le préfet peut prendre par arrêté une obligation de quitter le territoire français – OQTF –, qui peut elle-même être contestée par l’étranger devant le tribunal administratif.

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