Intervention de Gabriel Serville

Séance en hémicycle du 22 novembre 2012 à 21h30
Aménagement numérique du territoire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGabriel Serville :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, messieurs les rapporteurs, chers collègues, à l'occasion de l'examen de cette proposition de loi visant à assurer l'aménagement numérique du territoire, je veux donner la position des députés du groupe GDR sur la question de l'accès au numérique pour tous et dans tous les territoires.

Ce chantier correspond bien aux défis du xxie siècle en termes de création d'infrastructures de réseau. L'accès à ces technologies est déterminant dans tous les domaines de la vie quotidienne de nos concitoyens, que ce soit la santé, l'éducation, les achats, les documents administratifs, mais aussi l'industrie, l'agriculture, le tourisme et la culture.

Du reste, l'économie numérique est un puissant facteur de croissance et pourrait également constituer un outil privilégié d'une politique ambitieuse de réindustrialisation, à moins qu'il ne s'agisse tout simplement d'industrialisation pour certaines régions d'outre mer.

La manière dont nous aurons pensé ce développement numérique nous permettra de lutter contre d'autres fractures, sociales et territoriales. Aussi la présente proposition de loi pose-t-elle les bonnes questions. Quelle valeur contraignante et quelle consistance donner aux documents programmatiques d'aménagement numérique ? Qui doit financer cet effort ? Comment coordonner initiatives publiques et privées, et selon quels critères ? Enfin, quels doivent être les droits de nos concitoyens ?

Les réponses apportées par le programme national « très haut débit », adopté en 2010, manquent d'ambition. Elles fixent l'échéance de couverture totale du territoire à l'horizon de 2025. Dans les zones non rentables, ce programme fait reposer la totalité de l'effort sur les collectivités alors que, dans les zones rentables, il laisse les opérateurs privés se partager les bénéfices, par la multiplication des réseaux et des offres.

Je me permets de le signaler avec d'autant plus de conviction que le territoire de la Guyane, à partir duquel s'envole Ariane 5, et d'où partira peut-être bientôt Ariane 6, accuse un retard important en matière d'accès au haut débit, tandis que la collectivité régionale sacrifie des sommes considérables pour mettre à niveau cette terre française en Amérique du Sud, qui aurait dû être un véritable joyau.

Nous sommes dans la logique classique d'une nouvelle forme de libéralisme qui consiste à socialiser les pertes et à privatiser les bénéfices. Les collectivités ne sont en effet amenées à intervenir que pour suppléer la carence du privé, alors même que le souci partagé de bonne gestion des deniers publics devrait nous rendre plus vigilants.

Nous considérons qu'il est anormal de faire peser sur les collectivités le risque lié à l'investissement dans un secteur où les technologies sont en évolution permanente.

En outre, le dispositif institué est particulièrement favorable aux investisseurs privés qui bénéficient soit des infrastructures, grâce à la mutualisation, soit de l'intervention publique dans les zones non rentables. Pour les grands opérateurs, il s'agit donc d'un investissement sans risque, avec un retour sur investissement garanti.

L'Autorité de la concurrence et l'ARCEP considèrent même que le cadre d'intervention défini par le programme national « très haut débit » est contraire à la concurrence, dans la mesure où il favorise trop nettement l'intervention privée.

D'une façon générale, les dispositions de ce texte rompent avec la doctrine mise en place par le précédent gouvernement, dont le mot d'ordre était de n'imposer aucun engagement ni aucune obligation aux opérateurs privés pour l'aménagement du territoire.

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