Monsieur le ministre, mesdames les rapporteures, monsieur le président, chers collègues, c’est avec responsabilité et les yeux ouverts que je me présente devant vous, au nom du groupe UDI, en essayant modestement d’être à la hauteur de notre héritage républicain.
Honorer notre tradition d’asile, c’est être fidèle aux valeurs qui fondent notre République. C’est l’un de ces combats que nous devons mener ensemble, mes chers collègues. C’est respecter cette longue tradition républicaine inscrite dans notre Constitution qui veut que « Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ait droit d’asile sur les territoires de la République ».
Au-delà de ces principes fondamentaux, mes chers collègues, se révèle la réalité d’un système en crise, fragilisé par des carences manifestes, par des délais de traitement de plus en plus longs, des coûts budgétaires croissants, par une difficulté croissante à faire face à une hausse constante de la demande même si ce n’est pas tout à fait vrai pour ces derniers mois.
Ces insuffisances rendent notre dispositif inefficace, inégalitaire et incapable d’absorber les demandes d’accueil au titre d’un droit constitutionnel, reconnu par la Convention de Genève et la Convention des droits de l’Homme.
Nous nous trouvons aujourd’hui devant un étrange paradoxe : notre système d’accueil se voit contraint de traiter de nombreuses demandes qui n’aboutiront que rarement alors que les personnes qui auraient un réel besoin de protection ne s’adressent que peu à lui et sont bien mal traitées.
En un mot, y a-t-il de vrais ou de faux réfugiés ?
Notre capacité à accueillir dignement et efficacement les plus fragiles s’en trouve fragilisée.
Ce constat, nous le partageons tous. Il a été dressé par Valérie Létard et Jean-Louis Touraine à qui je tiens à rendre hommage.
Avec Jeanine Dubié, nous avons essayé d’esquisser la « radiographie » d’un système en crise, en avril dernier, au sein du comité d’évaluation et de contrôle et je remercie les collègues qui ont accompagné notre démarche.
Philippe Vigier et Éric Ciotti ont également souligné à juste titre, dans leurs rapports budgétaires, de lourdes difficultés. La nécessité d’une réforme n’est plus à démontrer, ce qui explique notre vote contre la motion de rejet et la motion de renvoi.
Une fois ce diagnostic posé, quelles solutions pouvons-nous apporter ? Le groupe UDI attend de cette réforme, monsieur le ministre, qu’elle redonne son sens au droit d’asile en revenant aux principes fondamentaux, qu’elle mette fin aux instrumentalisations et à des dérives qui nuisent aux demandeurs d’asile tout en mettant à rude épreuve l’ensemble des acteurs du droit d’asile, les personnels des préfectures, les travailleurs sociaux des plates-formes d’accueil ou encore les responsables des structures d’hébergement.
Avant tout, cette réforme doit réorganiser le premier accueil, l’hébergement, l’accompagnement des demandeurs et rénover les procédures.
La simplification du parcours du demandeur d’asile, en lui permettant d’accéder plus rapidement à la procédure devant l’OFPRA, avec à terme la création d’un « guichet unique », semble aller dans le bon sens.
En outre, la fin de la distinction entre l’« admission au séjour » et le « refus d’admission au séjour », devrait permettre d’améliorer la lisibilité du dispositif et de réduire les contentieux liés au refus. L’examen en commission, madame la rapporteure, a utilement complété ces dispositions en supprimant la condition préalable de domiciliation pour l’enregistrement de la demande.
Ce projet de loi vise par ailleurs à améliorer l’application des procédures particulières, qu’il s’agisse de l’asile à la frontière ou de la procédure Dublin.
Nous avons souligné dans notre rapport, avec Jeanine Dubié, la nécessité de redonner un sens à la procédure d’asile à la frontière. En effet, la procédure actuelle est très théorique et ne correspond pas à la réalité de la pratique constatée sur le terrain, puisqu’un grand nombre de personnes ayant présenté des demandes considérées comme manifestement infondées par l’OFPRA sont néanmoins libérées. Nous devons remédier à cette situation qui affaiblit considérablement la procédure en clarifiant la rédaction du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sur les conditions de prolongation du maintien en zone d’attente.
À ce titre, il serait judicieux d’inscrire dans la loi le fait que le juge des libertés et de la détention ne peut en aucun cas ordonner la libération d’un étranger en zone d’attente sur le seul fondement de l’existence de garanties de représentation.
On constate en effet, madame la rapporteure, que près de 22 % des étrangers placés en zone d’attente ont été libérés pour ce motif en 2013.
D’autre part, une réforme de l’asile doit nécessairement assurer un hébergement et un accompagnement adaptés aux demandeurs d’asile. Le projet de loi prévoit d’instaurer un schéma national des demandeurs d’asile et précise que ceux-ci, qu’ils soient accueillis en CADA ou dans le dispositif d’hébergement d’urgence, bénéficient d’un accompagnement juridique et social. Ce sont des mesures qu’il convient de saluer.
Pour autant, nous devons concrètement faire des CADA le dispositif central de l’hébergement, car une part importante des demandeurs est aujourd’hui accueillie dans les structures d’hébergement d’urgence, dont il faut pour ce faire clarifier le statut en garantissant une orientation prioritaire en CADA et en rattachant ces lieux d’hébergement d’urgence aux missions d’urgence telles que les définit le code de l’action sociale et des familles. Cet exercice sera difficile.
S’agissant des conditions d’accueil, le projet de loi prévoit le remplacement de la fameuse allocation temporaire d’attente, l’ATA, par une nouvelle allocation pour demandeurs d’asile qui sera gérée par l’OFII. Cette disposition devrait permettre de réduire le nombre d’acteurs impliqués dans le système de l’asile, et de confier enfin le versement de l’allocation à un opérateur familier des problématiques liées à l’asile.
En outre, pour dynamiser la procédure des demandes d’asile, nous devons avant tout, monsieur Myard, utiliser le potentiel des procédures accélérées, conformément au droit européen qui vous est si cher.