Intervention de Brigitte Bourguignon

Séance en hémicycle du 17 décembre 2014 à 15h00
Habilitation du gouvernement à prendre les mesures législatives nécessaires au respect du code mondial antidopage — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Bourguignon :

Le dopage est un fléau qui abîme les valeurs du sport et la santé de nos sportifs. Depuis la création de l’Agence mondiale antidopage, en 1999, à l’initiative de la France, une volonté internationale et coordonnée de lutter contre le dopage et ses dérives a vu le jour. La France demeure à la pointe de ce combat grâce à son volontarisme politique en la matière, qui transcende nos sensibilités politiques, et au travail remarquable de 1’Agence française de lutte contre le dopage. Elle s’honore donc encore une fois aujourd’hui de se montrer exemplaire en termes d’éthique et de déontologie par la transcription des nouvelles dispositions proposées par l’Agence mondiale antidopage.

Avec ce texte, il s’agit de continuer de rationaliser et d’harmoniser à l’échelle mondiale les règles de lutte contre toute forme de dopage. Cette modification du code mondial antidopage, qui prend en compte l’évolution technologique du dopage, sera la troisième depuis son élaboration en 2003. Elle devra être respectée par l’ensemble des fédérations sportives internationales et des agences de lutte contre le dopage des différents pays signataires – 177 au total.

Certaines de ces nouvelles dispositions, certes très techniques, nécessitent une intervention législative et présentent, comme l’a rappelé notre rapporteur, un juste équilibre entre prévention et répression, avec un ciblage affiné qui permet de protéger le sportif à la fois de lui-même, lorsque la tentation est grande, et de son entourage, lorsque son intérêt est encore plus grand au regard des enjeux financiers que représente parfois le sport de haut niveau, notamment dans certaines disciplines.

Ainsi, cette nouvelle doctrine antidopage met l’accent sur les enquêtes, le recours aux renseignements durcit les sanctions et implique davantage les fédérations nationales. Toute une série de mesures graduées en fonction du type d’infraction et des circonstances aggravantes sont définies.

Nous avons débattu en commission de nos inquiétudes quant à quelques points qui restaient encore à préciser au regard de notre droit constitutionnel, comme l’a rappelé Mme Buffet – points que vous connaissez, monsieur le ministre, puisque nos collègues sénateurs avaient émis les mêmes interrogations lors du passage du texte au Sénat.

Il s’agit tout d’abord de la disposition concernant la disponibilité du sportif pour un contrôle antidopage en tout lieu et à tout moment, qui posait notamment le problème du contrôle entre 21 heures et 6 heures du matin, et de l’automaticité des sanctions, qui, pour ne pas s’opposer au principe d’individualisation des peines, devra être entendue comme la possibilité d’instaurer un régime de sanction maximale.

Nous comprenons que, comme cela avait été le cas pour la deuxième modification du code, le recours aux ordonnances soit nécessaire dans un souci de rapidité face à l’entrée en vigueur des dispositions nouvelles au 1er janvier 2015. Néanmoins, le président de notre commission, soucieux du travail des parlementaires, vous a alerté par courrier, monsieur le secrétaire d’État, de notre souhait de pouvoir être consultés sur l’ordonnance dès qu’elle sera définitivement écrite.

Ce contrôle ne devra donc être possible qu’avec l’autorisation du sportif, il se limitera à un prélèvement d’échantillon et devra trouver un juste milieu entre le droit à l’intimité du sportif et l’application de la lutte antidopage.

Continuons à protéger nos sportifs – le chemin est encore long. La France a toute sa place dans cette lutte et elle est reconnue internationalement. La nomination de Mme Valérie Fourneyron à la tête du comité « Santé, médecine et recherche » de l’AMA est du reste un atout pour notre pays et une véritable reconnaissance de son engagement.

La France doit être également une force de propositions. D’autres avancées sont envisageables. Il serait par exemple intéressant de travailler sur un rapprochement entre l’Organisation mondiale de la santé et INTERPOL pour la recherche sur les molécules utilisées frauduleusement et pour la lutte contre le trafic de médicaments. La création d’une structure indépendante d’arbitrage des conflits entre les fédérations et les États pourrait également être étudiée.

De même tout ce qui peut consolider le périmètre d’action de l’AMA et ne pas la réduire à des fonctions d’appui et de coordination doit être encouragé afin qu’elle dispose de la totalité du pilotage de la lutte contre le dopage.

L’actualité nous rappelle à l’urgence et à la constance de cette lutte nécessaire. Nous venons précisément d’apprendre que l’AMA diligentera, à partir du mois de janvier 2015, une enquête sur la situation de la Russie sur la base de graves allégations de dopage présentées dans une série de documentaires de la télévision allemande.

Tout ce qui permet de conforter l’éthique dans le sport doit être fait. Cependant, outre cette dimension, la lutte contre le dopage, la fraude, la triche, représente également un enjeu de santé publique, notamment vis-à-vis du sport amateur, dont les pratiquants ne sont pas épargnés par la tentation de la performance à tout prix au détriment de leur santé et de leur avenir.

Je me réjouis donc de la détermination de l’ensemble des parlementaires sur ces questions, car ce texte a été adopté à l’unanimité au Sénat et presque aussi unanimement au sein de notre commission. Aussi le groupe SRC souhaite-t-il que ce projet de loi soit adopté dans les mêmes conditions.

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