Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous ne pouvons que nous féliciter de cette proposition de loi qui tend à moderniser le secteur de la presse, donc à le consolider.
La déclaration des droits de l’homme et des citoyens le proclame : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement ». Cette liberté inaliénable doit cependant bénéficier de moyens suffisamment importants pour donner vie à une information de qualité. C’est pourquoi la présente proposition de loi vise à la confronter à la réalité économique du XXIe siècle, laquelle impose de récolter et diffuser rapidement les informations.
Je me permettrai de partir du constat de notre excellent rapporteur : l’information est pensée comme un bien public, mais produite comme une marchandise.
La presse écrite est foisonnante, et cette richesse doit impérativement être préservée. On recense aujourd’hui 4 726 titres, mais seulement 500, soit un neuvième, répondent à la qualification de « presse nationale ou locale d’information générale et politique » ; la plupart sont à la recherche d’un équilibre budgétaire. Pour y parvenir, le meilleur moyen serait que leur lectorat augmente ; l’information ne peut s’épanouir dans le cadre d’un libéralisme débridé ou d’un système d’aides publiques dont on connaît les dysfonctionnements. Tel était d’ailleurs le sens de la question écrite posée il y a quelques mois par Marcel Rogemont à la ministre de la culture et de la communication : est-il normal que le montant de l’aide publique soit trois fois plus élevé pour un magazine à sensation que pour un mensuel d’information politique digne de confiance ?
Le titre I du projet de loi, relatif à la distribution de la presse, précise les champs de compétence des deux instances indépendantes de maîtrise et de contrôle du système, confirmant le choix d’une régulation bicéphale.
Le décroisement des flux du niveau 1 sera sans doute de nature à engendrer des économies d’échelle, dans une conjoncture qui voit les coûts de transport peser toujours davantage sur le prix de la presse. Le dispositif prévoit également la possibilité de recourir à des réseaux locaux de distribution et l’homologation des contrats de distribution conclus dans ces conditions.
Je voudrais préciser en deux mots le contexte dans lequel sont prises ces mesures.
À la suite de l’annonce en juillet 2013 de la réforme des aides à la presse, les conditions d’attribution de l’aide au portage ont été modifiées par le décret du 24 septembre 2014, l’objectif étant de rendre cette aide plus incitative, de favoriser le portage multititres et de mettre fin au conflit entre les éditeurs de presse quotidienne nationale et de presse quotidienne régionale.
D’autre part, il est prévu que le montant de la compensation versée à la sécurité sociale par le budget général dans le cadre du dispositif d’exonération de charges patronales des rémunérations des vendeurs-colporteurs et porteurs de presse, qui vise à développer un réseau structuré de portage, augmente en 2015, à hauteur de 22,5 millions d’euros.
J’évoquerai rapidement le titre II, relatif à l’Agence France-presse, en laissant le soin de l’expertise à Michel Françaix.
La création d’une filiale technique devrait permettre à l’AFP de rester dans la course mondiale à l’information, tout en lui garantissant les moyens nécessaires pour délivrer une information fiable et de qualité. La dotation, sous forme de prêt, de cette nouvelle société, éligible au programme des investissements d’avenir et soutenue par des établissements financiers publics, sera un gage de pérennité pour l’AFP. De plus, cette filiale lui procurera de nouvelles ressources par le biais de ses prestations.
Le statut d’entreprise citoyenne de presse d’information, dont la création est prévue par le titre III, concerne la presse en ligne, qui dispose souvent de compétences mais manque de capitaux. L’objectif est de donner une chance à ces nouveaux médias qui répondent à une demande sociale. Il s’agit de faire vivre ces véritables laboratoires d’idées que sont ces nouveaux vecteurs d’information. Il convient de leur donner les moyens de diffuser une information fiable dans un paysage numérique qui tend à confondre les échanges sur les réseaux sociaux et le travail journalistique, qui vise à diffuser une information vérifiée, objective et formalisée.
L’application depuis cette année du taux de TVA super-réduit est un premier pas dans cette direction. Il reste que cette presse a besoin de capitaux. Le statut d’entreprise citoyenne leur permettra, en utilisant un modèle de gestion emprunté à l’économie sociale et solidaire, d’attirer les investisseurs intéressés par des avantages fiscaux.
Mesdames, messieurs, Victor Hugo écrivait que « la liberté commence où finit l’ignorance ». Je propose que nous fassions nôtres ces propos et qu’au travers de cette proposition de loi, nous affirmions qu’être mieux informé, c’est être libre.