La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
La parole est à M. Michel Françaix, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Monsieur le président, madame la ministre de la culture et de la communication, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, la presse est aujourd’hui confrontée à une mutation économique et technologique sans précédent. La transition en cours de l’imprimé vers le numérique ne fera sans doute pas disparaître complètement le papier, mais le modèle économique de la presse papier est frappé de plein fouet par une crise structurelle, dont les effets s’amplifient depuis 2012 : érosion et vieillissement continus du lectorat, effondrement des ventes et des recettes liées à la diffusion, en particulier des ressources publicitaires, déstabilisation de la principale messagerie de presse, réduction régulière du nombre de points de vente. Parallèlement, la presse numérique, bien qu’en pleine croissance, demeure une source de revenus mineure pour la plupart des éditeurs de presse.
Dans ce contexte, les rapports qui se succèdent ne cessent d’interroger l’efficacité et la cohérence de la politique de soutien de l’État, mais aussi le comportement des acteurs du secteur face au changement. Depuis deux siècles, le secteur de la presse est marqué par une ambivalence fondamentale : l’information est pensée comme un bien public justifiant un fort interventionnisme de l’État, mais elle demeure produite comme une marchandise. Or le marché, à travers la course à l’audience, voire le racolage, tire la qualité vers le bas. Quant à l’État, il régule avec un zèle mollissant, et depuis trop longtemps subventionne sans faire preuve d’un discernement suffisant. On n’a pas su sanctuariser les moyens de l’ambition de l’après-guerre, le double caractère de la presse, idéalement collectif et concrètement marchand ; tout s’est sédimenté sous la forme d’une tension entre le marché et l’État.
Ce constat est particulièrement vrai s’agissant de la distribution de la presse, ses modes de distribution – portage, postage, réseaux de distribution de la presse régionale, système coopératif de distribution où coexistent deux coopératives –se concurrençant au lieu de se compléter. Dans un contexte d’effondrement de la diffusion papier, il est urgent de rationaliser l’ensemble de ces réseaux, mais aussi les aides qui les accompagnent. Un régulateur puissant doit permettre aux éditeurs de surmonter leurs divisions et leurs conflits d’intérêts.
La loi a donc élargi les compétences de l’instance professionnelle d’autorégulation, le Conseil supérieur des messageries de presse, CSMP, et créé à ses côtés une autorité administrative indépendante, l’Autorité de régulation de la distribution de la presse, l’ARDP, qui intervient a posteriori pour rendre ses décisions exécutoires. Cette architecture bicéphale est sans doute un peu complexe, mais elle semble concilier l’impératif d’efficacité avec la tradition d’autorégulation de la filière. Il est donc proposé de renforcer les pouvoirs de régulation, et principalement ceux de l’ARDP.
Il reste beaucoup à faire, notamment en ce qui concerne les barèmes, dont la structure particulièrement opaque présente des anomalies majeures et n’apparaît pas compatible avec le maintien de l’équilibre économique d’ensemble de la filière.
Faut-il, ou non, conserver deux messageries ?
La fusion entre les deux messageries sera peut-être incontournable à terme, mais cette question ne relève pas de la loi, et on ne saurait fusionner deux acteurs qui ne le souhaitent pas. Le dialogue entre les deux messageries semble aujourd’hui apaisé, comme en témoigne la décision de créer un système d’information commun à toute la filière.
Sur d’autres dossiers, les négociations apparaissent plus difficiles, par exemple en ce qui concerne la création d’une société commune de moyens pour le décroisement des flux entre les niveaux 1 et 2. C’est pourquoi l’article 7 permet au Conseil supérieur des messageries de presse, le CSMP, si le bon fonctionnement de la distribution de la presse le justifie, d’accélérer la mise en commun des moyens, en créant au besoin – et je crois qu’il faudra le faire, madame la ministre – une société commune de moyens. Nous aurons l’occasion de débattre longuement de ce sujet lors de l’examen des articles.
Le titre II de la proposition de loi concerne l’Agence France-Presse. Il constitue la traduction législative de certaines des propositions qui figurent dans le rapport que j’ai eu l’honneur de remettre au Premier ministre le 14 avril 2014. Nous avons tous envie de célébrer l’AFP, ce fleuron, cette pépite, cette exception culturelle qui participe au rayonnement de la France et qui constitue un vecteur de notre influence dans le monde. Mais prenons garde que ce lyrisme ne nous aveugle sur les risques de précarisation et de paupérisation.
Afin de financer un plan d’investissement qui permette à ce champion national de prendre le virage de la modernité, le rapport propose la création d’une filiale technique de moyens, dont l’AFP serait l’investisseur majoritaire. Cette piste de financement apparaît conforme, tout à la fois à l’intérêt de l’Agence et de ses personnels, à l’impératif de maîtrise des finances publiques, aux règles de droit et aux attentes des apporteurs de fonds pressentis. La mise en oeuvre de cette proposition est en cours et ne relève pas de la loi.
Aujourd’hui les clients de l’Agence, en particulier la presse quotidienne française, sont majoritaires au sein de son conseil d’administration, ce qui est une singularité. La loi propose de moderniser la gouvernance de l’Agence. Ces modifications, si elles ne sont pas révolutionnaires, devraient permettre de mettre fin à des années de blocage.
Les administrateurs, placés en situation de conflit d’intérêts latent, pouvaient être tentés de faire prévaloir leur intérêt de clients sur les intérêts de l’Agence, au détriment d’une vision industrielle, centrée sur les besoins de long terme de l’AFP. Il est donc proposé de faire passer de huit à cinq le nombre de représentants de la presse quotidienne nationale. Il va de soi qu’ils siégeront toujours au conseil d’administration, où ils continueront de jouer un rôle important, mais parallèlement, il est proposé d’y faire entrer cinq personnalités qualifiées, nommées par le conseil supérieur de l’AFP. La présence de ces personnalités sera renforcée par celle de deux parlementaires qui auront participé à leur désignation.
Ces personnalités doivent contribuer à dynamiser les discussions du conseil d’administration, à en diversifier le recrutement et les formes d’expertise. Sélectionnées expressément en dehors des clients de l’Agence, elles auront vocation à veiller exclusivement à l’intérêt social de cette dernière.
Enfin la commission a adopté un amendement tendant à ajouter un troisième représentant du personnel, journaliste professionnel, aux deux que le conseil d’administration de l’Agence compte déjà.
L’objectif de cette rénovation pragmatique du conseil d’administration est qu’aucun collège de membres ne dispose à lui seul d’une majorité simple. Plus qu’aujourd’hui, il sera nécessaire aux diverses parties prenantes, toutes représentées au sein du conseil d’administration, de bâtir des compromis. Plus qu’aujourd’hui, les autres organes de gouvernance de l’AFP trouveront dans le conseil d’administration un véritable interlocuteur, vigie stratégique de l’Agence.
Enfin, j’avais relevé dans mon rapport la piètre performance du conseil d’administration en matière de représentation des femmes, puisqu’il ne compte actuellement que deux femmes sur seize administrateurs. La commission a donc adopté un amendement fixant un objectif contraignant de parité de la composition du conseil d’administration.
Le désinvestissement relatif du conseil d’administration et les spécificités de sa composition ont parfois laissé son président-directeur général sans interlocuteur et sans contre-pouvoir. L’histoire récente de l’AFP ne manque pas d’exemples de présidents ayant essayé de réformer l’Agence, sans le bénéfice, ni du temps, ni d’un examen serré en conseil d’administration. Aucun de ces projets de réforme n’a abouti, et plusieurs présidents de l’Agence ont vu leur mandat écourté.
Cette situation n’est pas satisfaisante et a pesé durablement sur la capacité de l’AFP à prendre les décisions fondamentales qui auraient permis sa modernisation. C’est pourquoi il est proposé de faire passer le mandat du PDG de trois à cinq ans. La commission a par ailleurs souhaité préciser que le PDG devra être nommé sur la base d’un projet stratégique évalué par le conseil d’administration.
Le titre III, enfin, tend à créer un nouveau statut pour les entreprises de presse d’information politique et générale qui souhaiteraient adopter une forme juridique permettant une gestion en partie désintéressée. L’appellation, initialement retenue, d’« entreprise citoyenne de presse d’information » pouvant laisser penser que les autres entreprises de presse ne seraient pas citoyennes, la commission lui a préféré la qualification d’« entreprise solidaire de presse d’information ». Cette appellation a le mérite de renvoyer à la notion d’économie sociale et solidaire dont s’inspire le statut proposé.
Il s’agit de créer les conditions de l’émergence de nouveaux entrants et de nouveaux modèles entrepreneuriaux pour les entreprises de presse. Je suis convaincu qu’elles peuvent trouver dans le statut d’entreprises à lucrativité limitée une troisième voie qui permette leur émancipation, à la fois des aides publiques et de la gestion par des actionnaires industriels, souvent étrangers aux problèmes de la presse.
Le statut d’entreprise solidaire d’information serait réservé aux éditeurs de presse d’information politique et générale, au sens de l’article 39 bis A du code général des impôts. La nécessité de faire évoluer la notion d’ « information politique et générale », pour tenir compte notamment des mutations liées au développement du numérique, fait aujourd’hui l’objet de débats importants. Le choix est ici fait d’une définition de l’information politique et générale plus large que celle retenue par le code des postes et des télécommunications. Un tel élargissement permet notamment d’y intégrer des publications et des services de presse dédiés à une thématique spécifique, comme l’environnement ou la santé, dont la contribution à l’intérêt général est indéniable.
Enfin, afin que ce nouveau statut ne soit pas une coquille vide, il est évident que sa création doit être complétée par la mise en place d’un volet fiscal destiné à rendre plus attractive la participation des lecteurs citoyens à des projets innovants ou la reprise d’entreprises en difficulté par le biais de financements participatifs.
Le défi pour nous est de discerner les possibilités de changement culturel ouvertes par les nouveaux objets techniques. La presse est condamnée à être en retard sur l’événement, mais elle doit être en avance sur ses conséquences culturelles pour notre société. Tel est, madame la ministre, mesdames et messieurs les parlementaires, l’esprit de la proposition de loi que j’ai l’honneur de vous présenter.
La presse doit transformer ses lecteurs intelligents en citoyens actifs, afin de riposter à l’émiettement des savoirs. La présente proposition de loi n’ambitionne évidemment pas de régler l’ensemble des problèmes de la presse. Elle procède néanmoins à des modifications indispensables à la mise en oeuvre des réformes dont le secteur a besoin. De nombreux amendements, venus de tous les bancs de l’hémicycle, ont permis d’améliorer le texte.
Il faut accélérer la transition, tout en évitant la rupture. Ni immobilisme, ni « bougisme » ou « grand soir », mais pragmatisme : tel est notre mot d’ordre. Mes chers collègues, le statu quo n’est pas une option ; la modernisation n’est pas forcément une ennemie.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je me félicite que nous puissions examiner aujourd’hui cette proposition de loi portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse.
Je tiens à remercier tout particulièrement Michel Françaix, rapporteur du texte, avec qui nous avons travaillé en très bonne intelligence, et qui s’est personnellement investi dans cette proposition de loi. Votre travail patient et déterminé en faveur de l’avenir de la presse de notre pays mérite d’être salué, monsieur le député. C’est grâce à vous et au travail très constructif qui a eu lieu en commission des affaires culturelles, dont je salue le président Patrick Bloche, que le texte a pu être étoffé et amélioré par l’adoption d’amendements issus de tous les groupes politiques.
Ce travail collectif, dont le résultat est l’adoption du texte à la quasi-unanimité de la commission des affaires culturelles, montre que l’avenir du secteur de la presse est un enjeu démocratique avant que d’être un enjeu économique. Cet enjeu doit nous rassembler, au-delà des clivages traditionnels.
Il faut le rappeler : la liberté d’expression et d’information dérange. Elle n’a rien d’une évidence, et en cela elle est fragile. La liberté de la presse n’est jamais un acquis, elle est au contraire un combat perpétuel. Un combat pour la liberté des journalistes, en France et dans le monde – et je veux rendre ici hommage aux reporters qui font parfois leur métier au péril de leur vie. Un combat pour l’exigence, la qualité et l’éthique, qui suppose, pour reprendre le célèbre reproche d’Armand Carrel à Émile de Girardin, de ne pas réduire « la noble mission du journalisme à la simple fonction de marchand de nouvelles ». Enfin c’est un combat contre toutes les tentations plus ou moins avouées de ceux qui, à travers les âges, ont voulu mettre l’information sous leur coupe.
Vous le savez, la liberté de la presse ne s’est pas faite en un jour. Elle est le fruit de conquêtes successives qui se confondent souvent avec l’histoire de notre démocratie. En 1789, c’est à travers l’article 11 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen qu’a été affirmé « l’un des droits les plus précieux de l’homme » : « la libre communication des pensées et des opinions », en vertu de la laquelle « tout citoyen peut parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi. »
Mais cette liberté, il ne suffisait pas de la proclamer, il a fallu aussi lui apporter les garanties et les moyens indispensables à son accomplissement, et d’abord un cadre juridique sécurisé. C’est la loi de 1881 qui a défini les règles essentielles sur lesquelles repose encore aujourd’hui le fonctionnement de la presse. En garantissant la double liberté, de gestion des entreprises de presse, d’une part, et d’expression des journalistes, d’autre part, la loi de 1881 s’est affirmée comme un fondement de la République. La presse, ce sont également des enjeux très concrets auxquels plusieurs mesures adoptées en 1944 et la loi Bichet de 1947 sont venues, au sortir de la guerre et de l’occupation, apporter, là aussi, des réponses fortes en termes de moyens matériels, d’impression et de distribution.
Le texte que nous examinons aujourd’hui s’inscrit pleinement dans la continuité de cet héritage, en apportant à la presse de nouvelles garanties et de nouveaux moyens adaptés aux enjeux actuels.
Ces enjeux sont considérables, car la presse doit relever aujourd’hui d’immenses défis si elle veut sauver son avenir. Ces défis, vous les connaissez : ils sont de deux ordres. Il s’agit d’abord d’un défi démocratique, eu égard à la défiance sans cesse accrue de nos concitoyens à l’égard des médias et des journalistes. Il s’agit aussi d’un défi économique et social, celui du bouleversement inédit du secteur et des métiers de la presse du fait de la révolution numérique.
Beaucoup parlent de crise de la presse. Je préfère parler de défis, car nous ne devons pas céder à la sinistrose et au fatalisme. Je regrette, comme vous, de voir certains titres de presse en difficulté, et le Gouvernement est mobilisé pour accompagner ces évolutions. Je déplore aussi un certain appauvrissement de l’information, accentué par les réseaux sociaux et les chaînes d’information en continu. Mais je vois aussi éclore une presse nouvelle, audacieuse, vivace, pointue, inventive, entrepreneuriale, et pas seulement sur internet car elle sait aussi réinventer le papier. Il ne faut pas oublier non plus que nos concitoyens disposent aujourd’hui d’un accès très large à une information d’une extraordinaire diversité.
Tout l’enjeu est aujourd’hui de maintenir et d’amplifier cette vivacité, tout en maintenant fermement une exigence de fiabilité, de qualité et d’éthique. C’est en effet cette exigence qui permet au journalisme et à l’information de ne pas devenir des activités comme les autres et de tisser un lien de confiance durable avec nos concitoyens. Voilà le défi que nous devons relever.
Cette proposition de loi apporte, comme je vous l’indiquais, de nouvelles garanties et de nouveaux moyens pour répondre à ces enjeux.
Le texte se décline en trois volets : le premier définit de nouvelles garanties pour la libre distribution de la presse sur le territoire ; le second donne de nouveaux moyens à l’Agence France-Presse pour s’affirmer comme un champion, un fleuron de l’information à l’échelle mondiale ; le troisième crée un nouveau statut d’entreprise solidaire de presse d’information.
Le titre premier de la proposition de loi apporte de nouvelles garanties pour la libre distribution de la presse sur le territoire. Le système coopératif de distribution de la presse est un principe fort du pluralisme de l’information dans notre pays. Il garantit à tout éditeur le droit d’être distribué et permet ainsi la mise en oeuvre effective de l’objectif constitutionnel de préservation du caractère pluraliste des courants d’expression.
Cependant ce système est confronté aujourd’hui, à tous ses niveaux, à une équation inexorable, du fait du déclin de la diffusion physique de la presse, qui fragilise les messageries – particulièrement Presstalis, qui est engagée dans une restructuration profonde, indispensable à sa pérennité – mais aussi les dépositaires, les diffuseurs et les éditeurs de presse.
Aussi, dans le respect des principes fondateurs hérités de la loi Bichet – égalité de traitement des titres, caractère coopératif du système, gouvernance paritaire –, le texte propose de compléter les avancées significatives apportées par la loi du 20 juillet 2011 relative à la régulation du système de distribution de la presse, par trois évolutions.
Premièrement, il renforce les logiques de solidarité coopérative au sein de la distribution de presse, en affirmant dans la loi les principes de coopération et d’équilibre financier général et en renforçant l’objectivité des modalités et des critères de solidarité, notamment à travers les barèmes des messageries.
Deuxièmement, le texte propose de conférer à l’Autorité de régulation de la distribution de la presse un pouvoir renforcé, propre à assurer une mise en place rapide des réformes indispensables au secteur, tout en maintenant le rôle représentatif et décisionnel du Conseil supérieur des messageries de presse. Je veux saluer à ce propos le travail remarquable accompli par ces deux institutions.
Troisièmement, le texte propose d’ouvrir de façon encadrée le dernier kilomètre de distribution de la presse aux éditeurs de presse, ce qui permettra la mise en oeuvre de mutualisations utiles entre réseaux de distribution.
Le titre II de la proposition de loi offre de nouveaux moyens à l’Agence France-Presse pour s’affirmer comme un champion de l’information à l’échelle mondiale.
L’Agence France-Presse est la seule agence de presse internationale non anglophone. Elle participe pleinement au rayonnement de la France et diffuse une information exacte, impartiale et digne de confiance, conformément à l’article 2 de son statut. Dans un contexte de mutation numérique et de concurrence internationale accrue, qui a vu récemment la création d’une agence chinoise, il faut donner à cette agence les moyens de s’affirmer pleinement.
C’est dans cette perspective que le Gouvernement avait chargé le député Michel Françaix d’une mission sur l’avenir de l’AFP. Le rapport rendu à l’issue de cette mission propose de renforcer la capacité d’investissement de l’Agence pour qu’elle puisse consolider son modèle et développer des produits innovants, à travers notamment la création d’une filiale de moyens. Je sais les craintes que la création de cette filiale a pu susciter. Pourtant une telle option ne comporte aucun danger pour l’Agence ; elle permettra bien au contraire de répondre efficacement à son besoin de financement.
Parallèlement, l’État accompagne le développement de l’AFP d’un traitement budgétaire particulièrement favorable dans le projet de loi de finances pour 2015, en finalisant la négociation d’un contrat d’objectifs et de moyens ambitieux et en achevant la refonte de la convention d’abonnement des services de l’État à l’AFP, ce qui n’avait pas été fait depuis 1958.
Les dispositions législatives que votre assemblée examine aujourd’hui ont pour objectif la modernisation de la gouvernance de l’Agence et sa mise en conformité avec le cadre communautaire. Elles parachèvent ainsi la consolidation du modèle original de l’AFP et sa sécurisation dans un cadre économique de plus en plus concurrentiel. Les évolutions de gouvernance proposées visent à offrir davantage d’ouverture, de parité, d’impartialité et de stabilité dans la conduite de l’Agence.
Par ailleurs, la clôture de la plainte pour aide d’État déposée par un concurrent de l’AFP auprès de la Commission européenne nous invite à aménager le statut de l’Agence dans le strict respect de l’esprit de 1957, notamment au niveau tarifaire et comptable.
Je sais la sensibilité de certaines de ces dispositions, qui ne sont cependant que des modalités de pérennisation de l’Agence. En effet, la mise en place d’une comptabilité séparée et la réforme du régime de faillite sont nécessaires pour respecter le cadre européen. La pleine conformité de l’Agence au droit communautaire constitue une sécurisation indispensable à son bon fonctionnement et à son expansion sur le marché européen, et je crois qu’il faut nous en réjouir. En effet, non seulement nous consolidons ainsi le modèle spécifique d’indépendance et de qualité éditoriale de l’Agence, mais nous lui permettons de se projeter dans le XXIe siècle en la dotant de tous les outils de développement et d’innovation qui lui seront nécessaires.
Enfin, le titre III de la proposition de loi crée un nouveau statut d’entreprise solidaire de presse d’information.
La création d’un nouveau modèle d’entreprise de presse est une formidable motivation pour les entrepreneurs de la presse d’aujourd’hui. Elle permettra d’apporter une solution à toutes celles et ceux qui ont des projets innovants dont la viabilité est compromise par la difficulté de lever les fonds nécessaires au démarrage et à la pérennisation de leur activité. Conquérir un public nouveau de lecteurs devenus plus exigeants, convaincre de la pertinence de son projet, développer un nouveau contrat de lecture sur des sujets d’information politique et générale, c’est cela le pluralisme de l’information aujourd’hui. C’est pourquoi il est plus que jamais indispensable de donner leur chance à de nouveaux acteurs dans le domaine de l’information des citoyens, notamment des jeunes.
Je sais que l’examen du texte par la commission des affaires culturelles a été l’occasion d’un débat nourri autour de la notion de presse d’information politique et générale, qui est au coeur de ce dispositif comme elle est au coeur du pluralisme des médias. Sa définition fait débat aujourd’hui au sein même de la profession, qui souhaiterait notamment l’adapter à la presse numérique. Le président de la Commission paritaire des publications et agences de presse, M. Jean-François Mary, a réfléchi à cette question après avoir consulté largement les professionnels. Il nous a indiqué quelques pistes de réflexion qui devront être intégrées à une réforme de plus grande ampleur des aides à la presse à laquelle je travaille. Mais à ce stade, la définition retenue par la proposition de loi est celle qui figure à l’article 39 bis A du code général des impôts, afin d’ouvrir ce nouveau statut à l’éventail le plus large des publications et sites de presse d’information politique et générale.
L’entreprise citoyenne de presse d’information, que la commission des affaires culturelles a souhaité rebaptiser « entreprise solidaire de presse d’information », sera le lieu des expériences nouvelles, des défis de l’imagination et de l’information pluraliste. Le choix de ce statut, qui s’inspire de l’économie sociale et solidaire, vise à permettre aux actionnaires de renoncer à une partie des bénéfices pour les réinvestir dans l’activité de la société. Ces entreprises demeureront néanmoins des entreprises commerciales. Elles opteront simplement pour un modèle qui renforce leur obligation de mise en réserve des sommes nécessaires à la pérennité de l’activité.
Le Gouvernement accompagnera ce nouveau statut par des mesures incitatives, de façon à le rendre aussi attractif que possible. Je souhaite que les particuliers comme les entreprises puissent apporter un soutien durable à ces acteurs émergents de l’information.
Enfin vos débats en commission ont permis l’introduction d’un quatrième volet, ce dont je me félicite. Vous avez en effet décidé de reconnaître de nouveaux droits aux journalistes.
Mesdames et messieurs les députés, depuis que j’ai été nommé ministre en charge du secteur de la presse, je dois vous avouer qu’il est un chiffre que je n’oublie pas : trente-neuvième, tel est le rang de la France en matière de liberté de la presse dans le classement mondial établi par Reporters sans frontières. Si on peut toujours contester sa méthodologie, il fait cependant apparaître depuis une décennie un recul que je crois dangereux et dont ne peut se satisfaire la patrie des droits de l’Homme.
C’est pourquoi je me félicite que vos débats en commission aient permis d’introduire la possibilité pour les journalistes d’accompagner des parlementaires se rendant dans des lieux de privation de liberté. Je ne peux que saluer cette avancée vers une plus grande liberté de la presse et, à travers elle, vers une transparence accrue quant aux conditions de détention dans notre pays.
Je voudrais remercier ici la garde des sceaux, Christiane Taubira, qui a permis cette évolution de notre droit.
Cette avancée est aussi pour moi l’occasion de vous dire solennellement que le Gouvernement n’a pas abandonné son ambition de vous proposer un texte sur la protection du secret des sources.
Je suis heureuse de vous annoncer qu’en lien avec la députée Marie-Anne Chapdelaine et les membres des commissions des lois et de la culture, le Gouvernement a décidé de reprendre le travail sur ce sujet.
Ce travail difficile et long, entrepris il y a un an, ne s’est, en réalité, jamais interrompu. Il doit notamment nous permettre de nous assurer de la constitutionnalité du futur texte. Il nous faut trouver une rédaction permettant de concilier notre ambition de mieux protéger les sources et le maintien d’un certain nombre de sécurités et de garanties relatives à la sécurité intérieure et aux agents qui y concourent.
Mais cette recherche d’une écriture équilibrée ne doit pas nous faire perdre de vue l’objectif politique poursuivi par cette majorité, qui correspond à un engagement fort du Président de la République et à un engagement démocratique majeur : la protection des sources des journalistes.
Mesdames et messieurs les députés, nous sommes ce soir au rendez-vous des engagements du Président de la République. Dans son cinquante et unième engagement, celui-ci avait, dans un même mouvement, mis en avant deux enjeux sans pour autant les lier : « Je préserverai l’indépendance de l’AFP et je renforcerai la loi sur la protection des sources ». Ce soir nous préservons, avec le Parlement, l’indépendance de l’AFP. Demain, nous renforcerons la protection des sources.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je me réjouis, en cette fin d’année, que nous puissions débattre de la proposition de loi sur la modernisation du secteur de la presse défendue par le groupe socialiste et dont l’initiative revient à notre excellent collègue Michel Françaix.
Permettez-moi de saluer ici, pour en avoir été le témoin, le travail au long cours accompli par notre rapporteur pour arriver à ce résultat. En effet, cette proposition de loi fait suite, en ce qui concerne celles de ses dispositions relatives à l’AFP, au rapport que Michel Françaix a remis au Premier ministre en avril dernier, après avoir passé plusieurs mois à se pencher sur l’avenir de l’Agence, alors même que son mode de financement faisait l’objet d’une remise en cause à Bruxelles.
La singularité de l’Agence et notre attachement collectif à cette « pépite », pour reprendre le terme de notre rapporteur, et à ceux qui font l’AFP, c’est-à-dire d’abord ses journalistes, nécessitaient que nous nous mobilisions et que nous légiférions afin de donner les moyens à l’AFP d’assurer son développement et donc son avenir.
Ainsi, alors même que l’AFP, première agence internationale de presse francophone, va fêter ses soixante-dix ans au mois de janvier prochain, nous nous penchons aujourd’hui, non seulement sur son avenir économique et financier, mais aussi sur l’avenir de sa gouvernance. Je ne reviens pas ici sur les dispositions précises du texte que notre rapporteur vient de présenter, si ce n’est pour me réjouir du travail fin et précis mené en commission – vous l’avez souligné, madame la ministre – concernant notamment la composition et les missions des organes de gouvernance, ainsi que la durée du mandat de leurs membres.
Au-delà, je souhaite rappeler combien nous sommes attachés à la spécificité de cette agence, dont l’indépendance nous est particulièrement chère, et à quel point nous sommes vigilants et concernés par son avenir, y compris celui de sa future filiale « AFP Blue », dont le conseil d’administration de l’AFP vient d’autoriser la création, même si elle ne figure pas dans le texte dont nous sommes saisis aujourd’hui.
Notre ambition est de permettre à l’AFP de financer ses investissements sans qu’il soit porté atteinte à son indépendance. Nous pouvons résumer notre action en une formule : « ni étatisation, ni privatisation ». La progression de la dotation de l’État pour 2015 est également le signe de cette attention particulière portée aux missions d’intérêt général de l’Agence.
Vous l’avez indiqué, monsieur le rapporteur : la proposition de loi comporte aussi des dispositions destinées à moderniser l’organisation du système de distribution de la presse papier, définie en 1947 par la fameuse loi Bichet, et qui connaît aujourd’hui des difficultés, qui ne sont pas nouvelles mais qui demeurent.
Accompagner la modernisation de la presse est aujourd’hui un devoir. Il ne s’agit pas de promettre un « grand soir », mais de faire émerger un modèle plus solidaire et plus efficace en termes industriels, et de renforcer la régulation du système coopératif de distribution de la presse papier, ce qui est en soi, dans le contexte de mutations que nous connaissons, une réforme indispensable dont dépend sans doute la survie du secteur.
Étant, depuis peu, président de la commission professionnelle des kiosquiers, je souhaite que l’on n’oublie pas ces professionnels qui sont au bout de la chaîne, qui vivent souvent dans une grande précarité et dont les conditions de travail se sont dégradées ces dernières années.
Enfin, et ce n’est pas négligeable, la proposition de loi crée un nouveau statut d’entreprise de presse, que je ne saurais qualifier à cet instant puisque nous réfléchirons ensemble, lors de l’examen des amendements, à la meilleure dénomination possible. Qu’on l’appelle « entreprise citoyenne de presse », « entreprise solidaire de presse », « entreprise participative de presse » ou autrement, ce qui nous importe avant tout, c’est que ce statut permettre l’ouverture de nouveaux horizons, l’éclosion de nouveaux modèles, en donnant une chance supplémentaire à des entreprises de presse qui font le choix d’investir leurs bénéfices dans leurs activités. Je salue à cet égard, madame la ministre, votre volonté affirmée de créer rapidement des incitations fiscales au développement de cette nouvelle forme d’entreprise de presse.
Je voudrais enfin évoquer une disposition ajoutée en commission, accueillie au sein de ce texte comme elle l’avait été précédemment dans le projet de loi renforçant la protection du secret des sources des journalistes, sans y être réellement rattachée. Je suis heureux que ce texte permette aux journalistes d’accompagner les parlementaires qui se rendent dans des lieux de détention.
Parce que le pluralisme, l’indépendance et l’existence même de la presse reposent sur les journalistes, je saisis l’occasion de la discussion de ce texte pour vous rappeler, madame la ministre, notre ferme volonté que le projet de loi renforçant la protection du secret des sources des journalistes puisse être au plus tôt débattu par notre assemblée. Nous avons récemment, avec Michel Pouzol, rapporteur pour avis de notre commission, réaffirmé ce souhait dans un courrier adressé au Premier ministre.
Vous m’avez cependant répondu par avance, madame la ministre, et vous avez raison de dire qu’avant d’établir un calendrier, il faut définir le contenu de ce futur projet de loi. Ici même, en 2010, nous avons voté une loi améliorant la protection des sources des journalistes, mais nous étions alors nombreux à estimer qu’elle n’allait pas assez loin, surtout au regard du droit belge, qui est pour nous une référence en cette matière. Il est temps de définir le contenu de ce futur projet de loi et de s’attacher à renforcer la protection des sources des journalistes si on veut que la France puisse enfin progresser en matière de liberté de la presse : on ne saurait tolérer plus longtemps que la patrie des droits de l’homme et du citoyen ne soit qu’au trente-neuvième rang dans ce domaine !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, je veux tout d’abord exprimer des sentiments contradictoires : à la fois une grande satisfaction de voir aborder la question de la presse au sein de notre assemblée et le regret de ne pas avoir à débattre d’une loi-cadre mais seulement de « diverses mesures de modernisation ». Nous avions pourtant matière, grâce à votre travail, monsieur le rapporteur, et votre intervention en a témoigné. J’ai également déposé une proposition de loi, élaborée en lien avec les salariés du secteur et leurs syndicats, à laquelle vous avez bien voulu apporter votre contribution, ce dont je vous remercie.
Avec la presse, en effet, nous touchons à un élément essentiel de notre vie démocratique. L’exercice de la liberté de la presse ou sa répression jalonne l’histoire de notre pays et participe de ses avancées démocratiques et populaires, ou a contrario de ses reculs.
Certes, à l’ère du numérique, nul ne souhaite remonter le temps, mais je veux simplement redire ici combien la presse a pu être un des ressorts essentiels de grands moments de notre histoire, combien les affrontements au sein d’une presse pluraliste ont pu nourrir au sein de notre nation de beaux et toniques débats idéologiques qui nous font parfois défaut aujourd’hui.
Aussi, nous ne pouvons regarder sans rien faire la presse d’information générale et politique s’enfoncer dans la crise. On le sait, cette crise a des causes multiples : baisse du lectorat, concentration, uniformisation et importance croissante du numérique. Cependant, comme le rapporteur, s’appuyant sur ce qui se passe aux États-Unis, l’a souligné en commission, l’existence du journal papier conditionne l’existence du journal numérique. Le dossier publié ce matin par le journal L’Humanité montre que les utilisateurs des réseaux sociaux sont de plus grands lecteurs que la moyenne, et que la lecture d’informations au format papier représente 61 % des lectures d’une même agence de presse.
Bénéficier d’une information en temps réel aux quatre coins de la planète est aujourd’hui possible, et c’est une immense avancée. Mais mesurons aussi que le diktat de l’instantané n’est pas forcément synonyme de connaissance véritable du monde réel, que le credo du tweet ne peut remplacer le travail journalistique de recherche de l’information, le contrôle des sources ni la mise à disposition de décryptages d’un événement. D’où l’importance de légiférer sur toutes ces questions !
La proposition de loi qui nous est soumise comporte des avancées qu’il faut saluer. Je pense notamment au renforcement du rôle de la Haute Autorité de régulation, à l’homologation des barèmes fixés dans le respect du principe de solidarité, mais également aux avancées en matière de représentation des personnels et de parité, introduites par la voie d’amendements votés en commission. Je me félicite évidemment de la création, à l’article 14, des sociétés de presse solidaires ; cependant, nous aurions pu aller un peu plus loin en les dotant d’un statut de société coopérative qui aurait permis une réelle participation des salariés à leur gestion.
Mais tout cela ne fait pas encore le compte. Je souhaite donc que notre débat se solde par de nouvelles avancées et qu’il permette d’apaiser les inquiétudes nées des dispositions relatives à l’AFP.
La loi Bichet, voté à la Libération, avait pour objectif de garantir le pluralisme de la presse en la libérant de la pression du marché. En 2011, la précédente majorité a remis en cause cet objectif, au point que l’existence de l’entreprise Presstalis fut alors menacée. Si la lutte de ses salariés a permis de déboucher sur un plan de survie, sa situation reste très fragile.
Notre assemblée s’honorerait de revenir sur ce détricotage et de reprendre le flambeau du système coopératif de la distribution de la presse en favorisant par la loi la mise en place d’une coopérative unique. En effet, si le paysage a évolué depuis la loi Bichet, les principes de solidarité et de coopération au service du bien commun et de la démocratie, qui sont au fondement de cette loi, restent d’actualité.
La coexistence de deux messageries, dont une seule est soumise à des obligations concernant la presse quotidienne, a conduit à ce que des magazines disposant de rentrées publicitaires importantes ne participent pas à l’effort de distribution d’une presse à faibles ressources.
L’existence d’une coopérative unique permettrait une réelle mutualisation des moyens, une régulation du système par l’État et donc l’égalité de tous les supports de presse. À mes yeux, un tel système garantirait le pluralisme en ce qu’il permettrait à tous les journaux, quelles que soient leurs ressources financières, d’être distribués, y compris sur le dernier kilomètre, et donc lus par celles et ceux qui le souhaitent. Vous êtes d’ailleurs conscient de ce besoin, monsieur le rapporteur, puisque l’article 7 envisage la fusion des deux messageries. Pourquoi attendre, puisque l’urgence est là ? C’est le sens de l’amendement déposé par les députés du Front de gauche.
Un autre amendement concerne les aides à la presse, grandes absentes de ce texte. M. le rapporteur nous a dit en commission qu’un texte de loi allait être déposé sur ce sujet. Il me semble important que Mme la ministre confirme dès maintenant que cette loi verra le jour en 2015. Il n’est certes pas simple de recentrer les aides à la presse. L’article 5 de ma proposition de loi de 2013 les accordait en priorité aux sociétés de journaux et de publications périodiques de la presse écrite et numérique présentant un caractère d’intérêt général quant à la diffusion de la pensée qui remplissaient les conditions suivantes : l’instruction, l’éducation, l’information politique et générale. Nous avons besoin d’avancer sur la définition de cette presse.
Concernant l’AFP, les salariés de l’agence ont exprimé leurs inquiétudes dans une adresse aux parlementaires et lors de leur journée de grève du 10 décembre. Ils estiment, non sans motif, que les dispositions qui nous sont proposées risquent de remettre en cause l’unicité de l’agence et le modèle qu’elle constitue à l’échelle internationale. En effet l’AFP n’a pas d’équivalent, tant par l’étendue de sa couverture générale que par la compétence de sa rédaction et les garanties qu’elle offre en termes de qualité et de pluralité de l’information.
Monsieur le rapporteur, vous avez qualifié l’AFP « d’exception culturelle ». Faisant droit à la plainte d’une agence allemande, la Commission européenne a décidé de faire passer cette exception culturelle sous les fourches caudines des critères libéraux, dans un secteur où ce n’est pourtant ni le marché, ni la concurrence, mais l’intérêt général qui devrait prévaloir. C’était l’objectif de la loi de 1957 portant statut de l’AFP. Ce texte, dans un savant dosage, définit ses missions et garantit son autonomie tout en assurant son financement par l’État client. L’AFP participe à l’indépendance des sources et fournit un accès au monde à l’ensemble des acteurs de l’information et des acteurs publics. C’est pourquoi il faut la préserver et lui donner les moyens de se développer, dans le respect de ses missions.
Monsieur le rapporteur, vous nous dites que, face aux exigences de l’Union européenne, cette proposition de loi est protectrice. Il est vrai que notre commission a adopté un amendement visant à préserver les deux premiers articles de la loi de 1957, qui fondent le statut de l’agence. Cependant la mise en place d’une double comptabilité vise, comme l’indique l’exposé des motifs, à « assurer le plein respect du droit de l’Union européenne en matière de concurrence ». C’est pour cela qu’il ne faut pas ratifier les traités !
Sourires sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Selon l’exposé des motifs toujours, « la séparation comptable est rendue obligatoire pour les activités ne relevant pas des missions d’intérêt général ».
Mais toutes les missions de l’agence relèvent de l’intérêt général ! Des contrats tels que les contrats de portage ne représentent pas plus de 1 % du budget de l’agence. Il s’agit donc, soit de faire une concession en trompe-l’oeil à destination de la Commission européenne, soit d’entrouvrir la porte à une gestion différenciée des activités. Cette question mérite d’autant plus posée que l’on projette de créer une filiale pour attirer les financements nécessaires à l’AFP, y compris d’origine privée.
Autre source d’inquiétude, l’article 12 retire à l’État toute responsabilité envers les créanciers de l’agence, là aussi à la demande de la Commission européenne. Je vous proposerai un amendement pour que l’Agence soit placée, en cas de faillite, sous la vigilance de notre Parlement. J’espère en effet que l’État, sans se laisser mettre des bâtons dans les roues par la Commission européenne, développera son soutien aux missions de l’AFP, dont notre démocratie a besoin.
Enfin, je réaffirmerai par le biais d’un amendement la nécessité d’inscrire rapidement à l’ordre du jour de notre assemblée le projet de loi renforçant la protection du secret des sources des journalistes. Vous nous assurez, madame la ministre, que nous en débattrons prochainement. Je me réjouis de cette très bonne nouvelle, pour moi mais surtout pour l’ensemble des journalistes.
C’est avec l’espoir que les préoccupations que j’ai exprimées seront prises en compte que j’aborde notre discussion. En l’état du texte, les députés du Front de gauche s’abstiendront sur cette proposition.
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je veux tout d’abord saluer le travail de notre rapporteur, Michel Françaix.
La presse écrite est un pilier de notre démocratie. Par sa pluralité, sa diversité, elle met en avant l’ensemble des courants de pensée qui animent notre pays. Chacun d’entre nous a ses préférences et c’est bien normal : qu’en serait-il de nos libertés si une seule voix exprimait ce qui fait la richesse de la France, le débat politique ?
Je veux citer ici Maximilien de Robespierre…
...qui disait, dans son discours sur la liberté de la presse : « Après la faculté de penser, celle de communiquer ses pensées à ses semblables est l’attribut le plus frappant qui distingue l’homme de la brute. Elle est tout à la fois le signe de la vocation immortelle de l’homme à l’état social, le lien, l’âme, l’instrument de la société, le moyen unique de la perfectionner, d’atteindre le degré de puissance, de lumière et de bonheur dont il est susceptible. »
La presse traverse une crise économique sans précédent mettant en péril un grand nombre de titres nationaux mais aussi de journaux de la presse quotidienne, qui voient leur lectorat s’éroder et leurs recettes publicitaires s’effondrer.
Ces titres, qui nous rattachent à nos territoires, sont l’émanation du lien démocratique qui lie les citoyens à la vie publique. Le numérique a bouleversé les usages, transformé la fonction de la presse, qui, en plus d’informer, « éditorialise », inspire des angles de réflexion et diffuse des débats dans notre société tout entière.
La proposition de loi défendue par Michel Françaix est attendue par l’ensemble des professionnels de la filière. Elle vise tout d’abord à réformer la distribution de la presse, secteur en crise qui compte deux acteurs majeurs, Presstalis et les Messageries lyonnaises de presse, les MLP. Elle propose ensuite une amélioration considérable du statut de l’AFP, notre agence mondiale de presse à vocation généraliste. Nous voulons ici rappeler notre attachement à la fois à la qualité de l’information qu’elle fournit et à l’ensemble de ses salariés. Enfin, elle crée le statut d’entreprise solidaire de presse d’information afin de permettre, demain, l’émergence de nouveaux modèles économiques dans le secteur de la presse.
Depuis de nombreuses années, et par manque de décisions claires, le système coopératif de distribution de la presse papier est dans une situation préoccupante. Cette proposition de loi tend à renforcer les principes de coopération et d’équilibre financier pour garantir la survie du système. Nous avons notamment proposé en commission de renforcer l’indépendance de l’Autorité de régulation de la distribution de la presse, l’ARDP, en confiant à l’Autorité de la concurrence la nomination de la personnalité qualifiée prévue par la proposition de loi.
Il est notoire que le système coopératif de distribution de la presse souffre à tous les niveaux d’une crise structurelle qui fragilise les messageries, les dépositaires et les diffuseurs, et de fait, empêche les lecteurs d’accéder à la totalité de la presse sur l’ensemble du territoire.
Cette conjoncture, qui menace gravement les intérêts fondamentaux de la filière, a suscité de profondes réformes. Leur conception et leur mise en oeuvre ont intensément mobilisé les éditeurs et les acteurs de la distribution, avec le concours actif des pouvoirs publics. Les éditeurs ont consenti de gros efforts, en dépit d’un contexte économique très difficile, pour en assurer l’exécution. Une restructuration de la filière doit maintenant être engagée.
La proposition de loi aborde donc un sujet capital pour la pérennité de l’économie de la presse papier : le renforcement de la régulation de la distribution de la presse. Notre volonté est d’accélérer la transition de ce secteur tout en évitant la rupture.
Au coeur de la proposition de loi que nous examinons, il y a la réforme de la gouvernance de l’AFP. Ce texte vise clairement à permettre le sauvetage de l’agence France-Presse, et au-delà à faire d’elle une agence unique au monde. Pour opérer dans les meilleures conditions le virage de l’ère numérique, l’AFP, troisième agence de presse mondiale, se doit de lancer une nouvelle vague d’investissements qui lui permettront de proposer des produits diversifiés, innovants et conformes à l’exigence de qualité grâce à laquelle elle est reconnue mondialement.
Ses instances de direction doivent également traduire cette modernisation.
Du fait de son statut et de son histoire, l’AFP est une entreprise d’intérêt national. C’est un fleuron parmi les grandes entreprises françaises, avec un potentiel de développement international que chacun a souligné, à condition qu’on lui donne la possibilité de prendre les décisions économiques susceptibles d’améliorer son efficacité.
Pour lui donner une plus grande indépendance, le mode de gouvernance de l’agence est modifié par des dispositions qui vont dans le bon sens, comme l’introduction de cinq personnalités qualifiées au sein de son conseil d’administration, le respect de la parité, l’allongement du mandat du président de trois à cinq ans.
L’AFP doit aussi prendre le virage du numérique et proposer des informations en plusieurs langues en trouvant le bon dosage entre le payant et le gratuit.
Cette proposition de loi garantit ainsi trois éléments majeurs : le fait qu’il n’y aura pas de licenciement parmi le personnel, le maintien du statut d’agence généraliste et la valorisation de l’exception culturelle française à l’international.
En effet, l’Agence France-presse n’est pas une agence comme les autres. À la différence des agences américaines ou anglaises, l’AFP est composée de 2 900 collaborateurs répartis dans 165 pays, qui rendent compte en six langues de la marche de la planète, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sous forme de vidéos, textes, photographies, multimédia et infographies. Ce réseau unique au monde permet d’assurer une couverture de fond de l’actualité internationale, bien loin de l’information superficielle et de la culture du buzz produites par la plupart des grandes agences de presse mondiales.
Aujourd’hui, après quatre siècles d’existence, la presse doit se diversifier et réinventer de nouveaux modèles. Avec le souci permanent de son indépendance, de sa pluralité et de son avenir, le législateur doit proposer un nouveau modèle entrepreneurial, une troisième voie qui sera viable dès lors qu’elle sera assortie d’un dispositif fiscal permettant à ces entreprises de trouver des partenaires financiers : ce modèle, c’est celui de l’entreprise solidaire de presse d’information, sur le modèle des entreprises de l’économie sociale et solidaire.
Dans un contexte difficile pour la presse écrite, où de nouvelles sources d’information naissent de nouveaux supports, en dehors des circuits classiques, il est indispensable de soutenir la vitalité de la presse d’information politique et généraliste, garantie par le traitement professionnel de ses équipes de journalistes. Les entreprises solidaires de presse seront plus fortes parce qu’elles réinvestiront leurs bénéfices dans leur activité.
Nous devons envoyer un message fort à toute la filière de la presse d’information en votant cette proposition de loi, voie vers la modernisation. Ce sera, n’en doutez pas, le choix des parlementaires du groupe socialiste et républicain.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste
Vous ne m’en voudrez certainement pas, monsieur le rapporteur, de dire que votre proposition de loi est le plus petit dénominateur commun à tous les problèmes de la presse. C’est néanmoins un texte nécessaire en ce qu’ il répond à l’une des préoccupations des éditeurs : la distribution, jadis secondaire et désormais prioritaire.
Il est nécessaire pour plusieurs raisons, dont la plus évidente est la véritable révolution structurelle qui bouleverse ce secteur et dont les effets sont ravageurs – je pense notamment à la disparition de nombreux points de vente, que des dispositions récentes tentent d’enrayer. Il ne s’agit pas de céder à un catastrophisme que vous avez raison de refuser, madame la ministre, mais il y a tout de même des éléments très préoccupants.
De nombreux rapports ont mis l’accent sur ce mal-être de la presse, le plus récent étant issue de la réflexion de M. Jevakhoff, dont vous vous êtes peut-être inspiré, monsieur le rapporteur, car nous croyons reconnaître quelques pistes.
Vous-même, madame la ministre, avez récemment fait part de votre souhait que la presse soit capable de définir un nouveau système de distribution solidaire et solide. Selon vous, si nous vous avons bien compris, ce système passerait par la poursuite de la réforme des messageries, La Poste continuant à faire face à ses obligations de service public en matière de transport de presse. Que penser alors de l’hypothèse, avancée par ce rapport, de la fusion des deux messageries, hypothèse que vous aviez déjà avancée en 2012, monsieur le rapporteur, dans votre avis sur le projet de loi de finances pour 2013 ?
D’autres estiment que la concurrence entre messageries aux missions différenciées – quotidiens et magazines –, demeure nécessaire. Le débat reste ouvert. La signature récente par les deux messageries d’un mémorandum sur le système d’information de la filière pourrait apparaître comme un engagement fort de part et d’autre, et une sorte d’encouragement à notre réflexion.
Restera à traiter la question du rôle exact de La Poste dans la filière, ainsi, bien sûr, que la fameuse question des coûts postaux. Cela nous renvoie au problème global des aides générales à la presse.
La diversité de ces questions, monsieur le rapporteur, laisse à penser qu’il faudra un jour revoir l’ensemble du dispositif. Dans cette proposition de loi, vous vous contentez d’exprimer la volonté de mieux réguler le système coopératif de distribution de la presse. Il est vrai que c’est lui qui a le plus besoin d’être réformé, en raison du manque de cohérence entre les différents acteurs oeuvrant dans ce secteur, éditeurs, associés, clients des messageries.
On pourrait par exemple envisager la possibilité pour la presse quotidienne nationale de bénéficier du réseau de distribution de la presse quotidienne régionale. En renforçant le rôle et les missions du Conseil supérieur des messageries des messageries, le CSMP, et en les articulant avec l’action de l’ARDP, qui devient une autorité indépendante, nous pouvons espérer sécuriser par cette gouvernance bicéphale les équilibres à respecter sans ajouter de contraintes supplémentaires en termes de délai.
Dans cet esprit, nous avons proposé des amendements, qui ont été acceptés par la commission à votre instigation, tendant à réduire les délais d’homologation des barèmes, votre proposition de loi créant une procédure d’homologation par le CSMP, rendue ensuite exécutoire par l’ARDP.
Nous sommes d’accord sur un point essentiel : la loi Bichet doit rester la véritable constitution du système coopératif, qui consacre le principe de la liberté de distribution des titres par leurs propres moyens, en imposant, dans le cas contraire, la solidarité des éditeurs dans la distribution ainsi que l’égalité et l’impartialité de traitement entre les différents titres.
Le CSMP se voit également doter de la capacité de rationaliser la distribution sur « le dernier kilomètre », appellation quasi poétique du point final de distribution. L’expérience montre qu’il est nécessaire d’utiliser le réseau de la presse quotidienne régionale dans les zones peu denses et là où les réseaux de distribution existent déjà. Agglomérer les synergies économiques au lieu de les superposer : sur ce point nous sommes tous d’accord.
Enfin, ce texte vise à favoriser la mise en commun des moyens des messageries, au point que l’article 7 évoque la création d’une société commune. Doit-on y voir là un moyen de faire pression sur Presstalis et les MLP pour qu’elles renforcent la mutualisation de leurs moyens, conformément aux préconisations supposées du rapport Jevakhoff ?Si oui, jusqu’à quel point ? J’ai noté votre prudence sur le sujet, et nous partageons cette réticence.
Votre proposition s’attarde enfin sur le destin de l’AFP. Avec cette agence, qui vient de fêter ces soixante-dix ans, la France dispose de l’un des rares géants de l’information au niveau mondial.
Nous nous devons donc d’accompagner son développement et sa volonté d’innovation. Vous modifiez dans ce but son mode de gouvernance, en augmentant le nombre des membres de son conseil d’administration, dont la composition est élargie à cinq personnalités qualifiées. L’objectif est de lui permettre de prendre en compte les nouvelles sources d’information, ainsi que de supprimer tout risque de conflits d’intérêts dû à la présence d’administrateurs qui sont aussi clients de l’agence en réduisant la représentation de la presse quotidienne au sein du conseil d’administration. Nous ne trouvons rien à redire à ce dispositif, pas plus qu’aux mesures visant à assurer la conformité de son statut avec le droit européen de la concurrence. La mission d’intérêt général de l’Agence est préservée, contrairement à ce que certains craignaient.
En revanche, l’ultime volet de votre proposition de loi paraît faire cavalier seul. Vous y proposez de reconnaître un nouveau type d’entreprise de presse, qualifié initialement d’« entreprise citoyenne de presse d’information ». Ce nouveau statut est destiné aux entreprises de presse d’information politique générale, les IPG, affectant leur bénéfice à une réserve statutaire qui doit leur permettre d’assurer leur pérennité. Nous avons bien compris que ce statut, inspiré par la presse en ligne, sera destiné au secteur numérique, tout en étant également ouvert à de petites entreprises de presse papier, telles celles éditant des hebdomadaires régionaux. L’intention est louable. Toutefois, si la qualification d’entreprise citoyenne, que nous avons modifiée depuis, sonnait bien, elle avait de quoi heurter les autres publications, qui ne se sentent pas moins citoyennes. Monsieur le président de la commission des affaires culturelles, sans vouloir me lancer dans une analyse sémantique, la citoyenneté est une notion trop vaste pour être enfermée dans une telle définition. La citoyenneté, c’est une attitude, un état d’esprit, une conviction, et nombreux sont ceux qui peuvent s’en prévaloir.
Notre commission a donc fait preuve d’une grande sagesse en décidant de modifier cette qualification. Certes l’appellation qui a finalement été retenue n’est pas celle que nous avons proposée, mais foin de coquetterie : nous ferons nôtre la proposition qui obtiendra la majorité des voix de l’Assemblée. II ne nous est pas interdit d’être créatifs, même s’il semble étrange de créer un nouveau statut alors que l’avantage fiscal qui le justifie n’existe pas encore. En attendant, les entreprises concernées auront l’obligation de constituer une réserve statutaire dont le montant sera fixé par la loi.
Le débat sur la notion d’information politique générale ne sera pas sans incidence sur la redéfinition des modalités des aides de l’État à la presse, qui devrait intervenir dans quelques mois afin de les rendre plus cohérentes et surtout plus lisibles. Le sujet est d’autant plus crucial depuis le décret du 23 juin dernier, qui réserve à partir du 1er janvier 2016 le soutien du fonds stratégique pour le développement de la presse aux publications de presse et services de presse en ligne d’information politique et générale. Je ne le crois pas qu’on tranchera ce débat ce soir et je regrette l’imprécision avec laquelle l’article 14 définit la notion d’IPG. Ce troisième volet ne serait-il pas au fond, madame la ministre, une pure opération de communication ? Cette troisième voie, comme la qualifie Michel Françaix dans son rapport, est-elle vraiment nécessaire ?
En dépit de cette interrogation, le groupe UMP ne s’opposera pas pour autant à la proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la liberté de la presse, son indépendance et son pluralisme sont intrinsèquement liés à la démocratie. La presse est en effet aussi essentielle pour l’équilibre des pouvoirs qu’elle est indispensable à la vitalité du débat citoyen.
La presse est également un produit économique confronté à une crise profonde : pénalisées par la faiblesse du réseau de distribution, par des coûts d’impression et de diffusion élevés, par l’absence de stabilité et de visibilité financières, les entreprises de presse sont aujourd’hui également fragilisées par la concurrence du numérique et par l’émergence de nouveaux formats plus compétitifs.
Notre groupe estime qu’il est par conséquent essentiel de veiller à ce que la presse puisse continuer d’exercer ses missions fondamentales, tout en s’adaptant à un environnement économique, social et culturel bouleversé par de profondes mutations. Tel est l’objectif auquel concourt la présente proposition de loi qui, à défaut de révolutionner le monde de la presse, permettra néanmoins d’accompagner ses nécessaires évolutions. Il va sans dire que nous aurions souhaité que la majorité privilégie une réflexion globale sur un modèle de développement économiquement viable et pérenne pour la presse et qu’elle adopte une approche globale cohérente qui permette à la presse de réussir son adaptation aux défis du XXIe siècle.
Si elle ne constitue pas la grande réforme attendue, cette proposition de loi nous semble équilibrée et les mesures qu’elle prévoit pragmatiques. Les objectifs en sont clairs : accélérer la régulation du système de distribution de la presse papier ; adapter la gouvernance de l’Agence France Presse afin qu’elle puisse valoriser son savoir-faire à l’échelle mondiale ; soutenir les acteurs de la nouvelle économie pour favoriser le pluralisme de la presse.
Le texte vise en premier lieu à renforcer la régulation du système coopératif de distribution de la presse vendue au numéro pour garantir sa pérennité à court terme. Le maintien du système actuel, caractérisé par des barèmes opaques et des iniquités fortes, était incompatible avec l’équilibre économique de la filière.
Il sera institué une procédure d’homologation du barème des tarifs des deux sociétés coopératives de messageries de presse par le Conseil supérieur des messageries de presse, rendue exécutoire par l’Autorité de régulation de la distribution de la presse, dont les champs de compétences sont définis. À cet égard, si nous nous félicitons que l’indépendance des réseaux extérieurs, notamment ceux de la presse quotidienne régionale, ait été confortée, nous proposerons qu’il soit précisé sans ambiguïté que le champ de compétences du Conseil supérieur des messageries de presse et de l’Autorité de régulation de la distribution de la presse vise bien le seul système coopératif. Le rôle singulier de la presse quotidienne régionale, qui constitue le principal vecteur d’information du pays, doit être absolument renforcé.
Le deuxième objectif de cette proposition de loi est de faire entrer de plain-pied l’Agence France-presse dans le XXIe siècle, en faisant prendre à sa gouvernance le virage de la modernité. Cette modernisation s’articule autour de deux axes forts : d’une part, ouvrir le conseil d’administration pour conforter sa dimension stratégique ; d’autre part, solidifier le Conseil supérieur, garant de l’exigence éditoriale de l’Agence. Notre groupe tient à saluer les avancées permises par nos travaux en commission : celle relative à la parité, qui sera la règle pour la constitution du conseil d’administration et du Conseil supérieur, et celle garantissant la participation de la rédaction à la prise de décision du Conseil supérieur.
Nous tenons également à saluer l’amendement adopté à l’initiative de notre collègue Marie-George Buffet, qui prévoit que le conseil d’administration pourra valider les priorités stratégiques du président-directeur général avant de lui accorder sa confiance. Ce processus, analogue à celui qui régit la nomination du président-directeur général de l’audiovisuel public, sera un gage d’indépendance pour l’Agence France-presse, qui est, nous le savons toutes et tous, incontournable dans le traitement et la diffusion de l’information.
Enfin, cette proposition de loi envisage la création d’un statut d’entreprise solidaire de presse d’information. Il s’agit ici de créer les conditions de l’émergence de nouvelles entreprises de presse, inspirées du modèle des entreprises de l’économie sociale et solidaire, cher à notre collègue Francis Vercamer et qui participe de la vitalité de notre économie. Nous nous réjouissons que l’appellation initiale d’entreprise citoyenne de presse d’information, impropre, inadaptée et inopportune, ait été modifiée. Une telle appellation aurait créé une confusion regrettable : la presse est citoyenne par essence, quel que soit le mode de gestion des entreprises. Je salue par conséquent le consensus qui s’est dessiné autour de cette question, lors de nos travaux en commission, et je souhaite, au nom du groupe UDI, que cet équilibre soit préservé en séance publique.
J’appelle néanmoins l’attention de la représentation nationale sur un sujet qui me semble de toute première importance. La création de ce statut d’entreprise solidaire de presse d’information s’accompagnera nécessairement de mesures fiscales incitatives, afin de rendre plus attractif le choix de ce statut. Ce levier fiscal permettrait en effet de rendre possibles la prise de participation du lectorat dans des projets innovants ou la reprise d’entreprises en difficulté grâce au financement participatif. Il me semble par conséquent utile que ce nouveau statut puisse bénéficier d’un avantage fiscal. Cela ne signifie pas pour autant que l’inscription dans la loi d’août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse de la notion d’information politique générale, au sens de l’article 39 bis A du code général des impôts, nous paraisse adaptée. En effet, la définition de la notion d’information politique générale relève à la fois du code général des impôts et du code des postes et télécommunications, justifiant par là le bénéfice de dispositifs dédiés.
La création d’une nouvelle catégorie, en concurrence avec les deux périmètres existants, serait selon nous de nature à engendrer de la confusion. Nous proposerons par conséquent de supprimer cette référence, dans l’attente d’une refonte globale des aides à la presse, qui permette de soutenir davantage la presse quotidienne régionale, laquelle a perdu 800 000 lecteurs en cinq ans, comme je l’avais relevé l’an dernier dans mon rapport, et de mieux cibler les aides, afin de favoriser la modernisation du secteur de la presse.
Nous espérons que notre assemblée fera preuve d’une attention bienveillante à l’égard de nos propositions. Pour notre part, nous sommes prêts à soutenir cette proposition de loi, sous réserve que son équilibre ne soit pas bouleversé.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, la liberté de la presse demeure un enjeu de démocratie, et pas uniquement là où les libertés d’opinion et d’expression ne sont pas garanties. Même dans les pays où cette liberté semble acquise, un devoir de vigilance s’impose. En France, nous devons ainsi veiller perpétuellement à ce que ces principes fondateurs de notre démocratie ne souffrent d’aucune remise en question. On pense à la censure, bien évidemment, mais n’oublions pas que, pour permettre à ces libertés d’être effectives, nous avons besoin d’une presse diverse et plurielle, qui vive et se déploie sur l’ensemble de notre territoire.
C’est pourquoi je ne peux m’empêcher d’être inquiète face aux difficultés que traverse la presse : garantir la pluralité de l’offre en matière d’information relève d’une nécessité démocratique. Or, pour pérenniser un tel pluralisme, les mutations économiques et technologiques auxquelles la presse papier est confrontée exigent un changement d’approche radical, notamment dans la façon dont nous aidons ce secteur. On ne peut en effet continuer à se satisfaire de quelques pansements qui permettent temporairement de maintenir le système. Les pansements n’ont de sens que si, parallèlement, tous les acteurs concernés s’attaquent à la racine des problèmes et envisagent ensemble les évolutions à mener. J’entends par là les éditeurs de presse, les diffuseurs, les points de vente, mais aussi les pouvoirs publics qui doivent, dans la concertation, décider sereinement des changements à opérer, afin de faire face aux mutations inéluctables et à celles qui sont déjà en cours. Personne ici ne contredira les chiffres, malheureusement bien connus et qui ont été rappelés au cours des débats : ceux qui mesurent la baisse des ventes de la presse papier, en lien direct avec la diminution du nombre des lecteurs, mais aussi les disparitions de kiosquiers ou la mauvaise santé des messageries.
Lors des discussions en commission sur l’avenir de la presse, nous étions unanimes à reconnaître que l’ère du numérique pose la question de la pertinence du modèle de soutien à la presse, d’autant plus légitimement que les rapports concluant à la nécessité de remettre à plat le système actuel sont nombreux.
Michel Françaix avait pointé cette nécessité dès l’examen du projet de loi de finances pour 2013. Certes il y a eu des évolutions depuis, mais je continue de regretter le manque de lisibilité et de pertinence du système actuel. Est-il nécessaire de rappeler que 80 % des aides à la presse prévues dans le PLF vont aux canaux de distribution, ou encore que la presse numérique bénéficie de moins de 10 % des aides budgétaires ?
C’est pourquoi je regrette que cette proposition de loi n’aille pas plus loin dans la voie d’une réforme structurelle des aides à la presse. Cette remise à plat devra être menée en prenant en compte les médias dans leur globalité : on ne peut plus se cantonner à un système d’aide prenant pour critère le type de support. C’était le sens de notre soutien à l’harmonisation des taux de TVA applicables à la presse papier et à la presse électronique, afin d’assurer l’égalité de traitement entre média papier et numérique. Avec l’arrivée du numérique, les frontières entre média papier et audiovisuels tendent à s’effacer. Il ne s’agit pas de nier le fait que les besoins et les problèmes de la presse papier et ceux de la presse numérique ne sont pas les mêmes, mais au regard de l’essor du numérique et au vu du retard de la France dans ce secteur, il me semble absolument nécessaire d’interroger les principes qui régissent notre politique de soutien. Le numérique offre d’ailleurs de nouvelles possibilités, notamment en matière d’interaction avec les citoyens, qu’il serait intéressant de soutenir.
Si cette proposition de loi ne répond pas à notre demande de remise à plat, elle comporte néanmoins plusieurs avancées.
Celles-ci concernent d’abord les messageries. Ces dernières connaissent des difficultés qu’on ne doit pas sous-estimer, la liberté de la presse supposant la garantie de son acheminement vers le lecteur. C’est l’objet de la loi Bichet du 2 avril 1947, déjà évoquée, qui organise la distribution de la presse et donne ainsi toute sa force au principe constitutionnel de la liberté de la presse en empêchant toute discrimination dans la distribution des titres publiés. Les modifications apportées ici respectent bien entendu l’esprit de cette loi ; elles le renforcent même, puisqu’elles visent à accompagner les deux coopératives dans leur mutation pour les amener à se compléter davantage et à moins se concurrencer, de façon à assurer la pérennité du système de distribution. Il s’agit de renforcer la mutualisation et la solidarité entre ces entreprises, tout en responsabilisant davantage l’ensemble des parties prenantes.
Mais cette mutualisation ne doit pas se faire au détriment des citoyens. Ces évolutions ne doivent pas avoir d’impact sur le coût de la presse. Je pense à l’épineuse question des barèmes, mais aussi aux conséquences possibles des efforts de rationalisation, y compris sur le dernier kilomètre. C’est pourquoi nous avions proposé en commission d’assurer la représentation des consommateurs au sein de l’ARDP. Cette proposition n’a pas été retenue, mais j’espère que cet enjeu sera pris en compte.
La création du statut d’entreprise solidaire de presse d’information est une autre avancée de cette proposition de loi. J’ai indiqué en commission qu’un tel statut aurait probablement permis d’éviter, chez moi, à Amiens, la regrettable fermeture du Télescope, site d’information régional en ligne qui contribuait activement au pluralisme local.
Car ce statut sera aussi et avant tout une façon de soutenir le pluralisme en matière d’information. Aujourd’hui, trop peu de nouveaux éditeurs parviennent à émerger. J’espère que ce nouveau statut apportera un vrai changement en permettant aux pure players de se développer et à la France de rattraper ainsi son retard en matière de presse numérique. Nous soutenons donc cette initiative qui devrait favoriser un financement stable de ces médias, et nous attendons d’en savoir plus sur les incitations fiscales annoncées pour accompagner ce statut.
Je salue aussi la volonté de s’inspirer du modèle de l’économie sociale et solidaire. Cela ne doit pas surprendre, chacun connaissant l’engagement des écologistes en faveur du développement de ce secteur qui représente un modèle d’avenir. Mais pourquoi limiter ce statut, à propos duquel nous appelons par ailleurs à plus de clarté, aux entreprises en ligne et à la presse d’information politique et générale ? Pourquoi restreindre ainsi la diffusion des valeurs de l’ESS ? D’autres sites peuvent être tout aussi innovants et intéressants que les sites d’information politique et générale, ou IPG. Ce statut pourrait aussi intéresser certaines entreprises de la presse quotidienne, régionale ou nationale, qui connaissent des difficultés. D’ailleurs certains salariés expriment la volonté de reprendre leur entreprise. La récente reprise du groupe Nice-Matin par ses salariés…
… illustre cette demande qui, de plus en plus, apparaît comme une réponse pertinente aux difficultés économiques de la presse.
C’est pourquoi mon groupe souhaite l’extension à l’ensemble des entreprises de presse de la procédure d’information des salariés prévue par la loi sur l’ESS en cas de difficultés économiques : je défendrai un amendement en ce sens. Puisque cette proposition de loi a notamment pour objectif de remédier aux difficultés qui touchent la presse papier, pourquoi ne pas doter cette dernière d’un outil favorisant les opportunités de cession d’un titre à ses salariés ? Ce serait se priver d’une opportunité supplémentaire d’accompagner les transitions en cours dans ce secteur.
Enfin, concernant l’AFP, je souhaite avant tout relayer les craintes des représentants des salariés. Cette proposition de loi et les modifications du statut de l’agence qu’elle contient interviennent dans un contexte marqué par l’incertitude, toujours inquiétante pour des salariés attachés à leur entreprise, qu’il s’agisse des négociations en cours sur le futur contrat d’objectifs et de moyens, de l’absence de publicité de la lettre de cadrage de la Commission européenne ou encore des conséquences de la création d’une nouvelle filiale technique. Les salariés s’inquiètent du risque de fragilisation de l’agence : il est impératif d’entendre ces inquiétudes et de s’assurer que ses missions ne seront pas à terme menacées, mais bel et bien pérennisées.
Des garanties claires sont notamment attendues quant aux effets possibles de la création de la filiale technique de moyens. L’inscription à l’article 13 du principe de la séparation comptable, obtenue en commission, est un premier pas dans ce sens. Cependant, une partie des personnels continue à craindre pour son statut et s’inquiète du risque de perte de l’outil technique en cas de problème financier. Démunie de cet outil technique, l’agence verrait son avenir mis en péril. Il est en conséquence impératif que le positionnement de l’État, qui jusqu’ici jouait le rôle de garde-fou, soit précisé.
Le flou qui entoure la définition des missions d’intérêt général de l’Agence est tout autant problématique.
Ces nouvelles dispositions ne doivent en aucun cas brider le développement de l’AFP à l’international. Elle doit pouvoir diffuser une information objective et exhaustive, aussi bien en France que dans le reste du monde car c’est un de ses points forts qui contribue à sa notoriété et à son excellence.
Si une partie des syndicats nous a indiqué que des engagements rassurants ont été obtenus quant aux relations entre l’AFP et sa future filiale technique, nous n’avons pas le droit d’ignorer les craintes qui demeurent. Je relaie ici ces doutes et ces inquiétudes afin que des engagements fermes soient pris et réaffirmés régulièrement.
Quant aux dispositions relatives à la gouvernance de l’agence, elles ne sont pas seulement nécessaires ; elles doivent aussi être pour elles une opportunité de se moderniser.
Si nous nous réjouissons que la commission ait adopté nos amendements sur la parité et sur le renforcement de la représentation des rédactions dans la gouvernance de l’agence, nous considérons qu’il faut aller plus loin dans la rénovation de la gouvernance. Il est essentiel que les compétences des membres du conseil d’administration et du Conseil supérieur puissent faire écho aux nouvelles orientations stratégiques de l’AFP relativement aux contenus numériques et audiovisuels. C’est pourquoi nous proposerons que les acteurs qui sont à la pointe de ces enjeux soient représentés dans les structures de gouvernance de l’agence : un membre du Conseil supérieur serait désigné par le Conseil national du numérique et l’un des cinq représentants des directeurs d’entreprises françaises de presse que compte le conseil d’administration serait spécifiquement issu de la presse d’information en ligne.
Enfin, mon groupe soutient, bien entendu, l’ouverture aux journalistes du droit d’accompagner des parlementaires dans les établissements pénitentiaires, les zones d’attente et les centres de rétention. Nous proposons de renforcer encore ce droit, gage de liberté de la presse, en l’étendant aux centres éducatifs fermés et en reconnaissant aux journalistes le droit de filmer, d’enregistrer et de photographier, c’est-à-dire la possibilité d’exercer leur métier,…
…enfin en facilitant leur accès aux établissements pénitentiaires même sans la présence d’un parlementaire.
Sous les réserves que j’ai exprimées concernant l’AFP, le groupe écologiste votera majoritairement ce texte.
Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, M. le rapporteur l’a rappelé, cette proposition de loi n’a pas pour objectif de traiter l’ensemble des problèmes auxquels la presse est confrontée. Ainsi, il ne nous est pas proposé de revoir la pertinence de notre système d’aides à la presse, selon moi obsolète ou pour le moins peu adapté aux réalités actuelles. Nous n’examinerons pas non plus la manière dont ces aides sont distribuées, pas plus que nous ne débattrons de la nécessaire clarification de la définition de la presse d’information générale et politique, du rôle du numérique dans l’information citoyenne, de la liberté des rédactions ou encore de la protection des sources. Je suis heureux de vous avoir entendu dire ce soir, madame la ministre, que cela ne saurait tarder. Toutes ces questions sont importantes, mais elles méritent des débats spécifiques qui ne sont pas à l’ordre du jour de cette séance.
Cette proposition de loi traite de trois sujets : l’AFP, la création d’un nouveau statut d’entreprise solidaire de presse d’information et le système de distribution de la presse papier. Je tiens à dire d’emblée que le groupe RRDP considère que ce texte est utile.
Les dispositions relatives à l’AFP sont positives. Elles visent à améliorer la gouvernance de l’agence, à lui donner plus d’indépendance et à lui permettre de se moderniser. Notre agence doit en effet être confortée. La France peut s’enorgueillir de disposer d’un tel outil, qui contribue à la pluralité dans un contexte de mondialisation de l’information. Il faut cependant que ces propositions soient discutées et mises en oeuvre avec les salariés de l’AFP.
Concernant la proposition de créer un statut d’entreprise solidaire de presse d’information, le groupe RRDP exprime sa très vive satisfaction. Ce nouveau statut devrait favoriser l’émergence de nouveaux acteurs dans ce secteur et d’améliorer encore le pluralisme indispensable au dynamisme de notre démocratie.
Je m’attarderai davantage sur les dispositions relatives à la distribution de la presse papier puisque qu’elles constituent l’essentiel de la proposition de loi.
Les difficultés rencontrées par la presse papier imposent des mesures urgentes dans ce domaine. C’est une évidence, qui n’est contestée ni par les patrons de presse ni par les syndicats. La baisse de la diffusion a atteint 25 % en dix ans. Elle paraît de surcroît inexorable, tant les habitudes de nos concitoyens ont changé, du fait notamment du développement des nouvelles technologies. Même si la presse papier subsiste, tout porte à croire que la baisse de sa diffusion se poursuivra : les professionnels en ont pris acte.
Si l’ensemble du secteur de la presse fait face à des évolutions technologiques, celui de la presse papier s’en trouve, lui, totalement bouleversé. Cette situation justifie de nouvelles mesures, parmi lesquelles la réforme du système de distribution, sujet sur lequel se concentre la proposition de loi. Une meilleure régulation du système permettant une mutualisation des moyens résoudra l’un des problèmes majeurs du secteur. Dans mon avis sur les crédits de la presse du projet de loi de finance, je suggérais que l’État conditionne ses aides à une meilleure mutualisation du système de distribution, en portant une attention toute particulière aux quotidiens à faibles recettes publicitaires et en accompagnant le secteur sur le plan social.
Enfin, si je partage l’essentiel des propositions de ce texte, je reste convaincu que la presse, et l’information d’une manière générale, est en pleine mutation. L’information est au coeur de nos sociétés. Nous sommes plus nombreux, plus pressés, plus connectés et plus curieux. Une information citoyenne de qualité est indispensable à la vivacité des démocraties, à une analyse citoyenne pertinente des évolutions de notre monde. À ce titre, la presse représente un secteur d’avenir. Mais elle ne peut se réduire à la presse écrite, comme celle-ci ne peut se réduire à la presse papier. Le développement du numérique est donc une chance pour le secteur, chance que la proposition d’une troisième voie, à travers le statut d’entreprise solidaire de presse d’information, doit transformer en réalité. En facilitant l’émergence de nouveaux titres et de nouveaux acteurs, ce nouveau statut contribuera au pluralisme, et c’est pourquoi il faut encourager cette démarche.
En France, comme dans beaucoup d’autres pays occidentaux, nombre de citoyens doutent des institutions, des partis politiques, des syndicats, et parfois de la presse, qu’ils ne trouvent pas toujours suffisamment indépendante des pouvoirs politiques ou des pouvoirs d’argent. L’émergence de nouveaux titres permettra d’éviter le train-train d’une information parfois trop convenue sur les grandes questions qui se posent à notre monde, par exemple sur la crise économique que le monde traverse.
La pluralité de l’information et la qualité de la presse sont des sujets essentiels qui méritent un débat approfondi. Je ne doute pas que nous l’aurons en d’autres occasions. Vous nous en avez fait la promesse, madame la ministre, et je m’en réjouis. D’ici là, vous l’aurez compris, le groupe RRDP votera cette proposition de loi
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous ne pouvons que nous féliciter de cette proposition de loi qui tend à moderniser le secteur de la presse, donc à le consolider.
La déclaration des droits de l’homme et des citoyens le proclame : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement ». Cette liberté inaliénable doit cependant bénéficier de moyens suffisamment importants pour donner vie à une information de qualité. C’est pourquoi la présente proposition de loi vise à la confronter à la réalité économique du XXIe siècle, laquelle impose de récolter et diffuser rapidement les informations.
Je me permettrai de partir du constat de notre excellent rapporteur : l’information est pensée comme un bien public, mais produite comme une marchandise.
La presse écrite est foisonnante, et cette richesse doit impérativement être préservée. On recense aujourd’hui 4 726 titres, mais seulement 500, soit un neuvième, répondent à la qualification de « presse nationale ou locale d’information générale et politique » ; la plupart sont à la recherche d’un équilibre budgétaire. Pour y parvenir, le meilleur moyen serait que leur lectorat augmente ; l’information ne peut s’épanouir dans le cadre d’un libéralisme débridé ou d’un système d’aides publiques dont on connaît les dysfonctionnements. Tel était d’ailleurs le sens de la question écrite posée il y a quelques mois par Marcel Rogemont à la ministre de la culture et de la communication : est-il normal que le montant de l’aide publique soit trois fois plus élevé pour un magazine à sensation que pour un mensuel d’information politique digne de confiance ?
Le titre I du projet de loi, relatif à la distribution de la presse, précise les champs de compétence des deux instances indépendantes de maîtrise et de contrôle du système, confirmant le choix d’une régulation bicéphale.
Le décroisement des flux du niveau 1 sera sans doute de nature à engendrer des économies d’échelle, dans une conjoncture qui voit les coûts de transport peser toujours davantage sur le prix de la presse. Le dispositif prévoit également la possibilité de recourir à des réseaux locaux de distribution et l’homologation des contrats de distribution conclus dans ces conditions.
Je voudrais préciser en deux mots le contexte dans lequel sont prises ces mesures.
À la suite de l’annonce en juillet 2013 de la réforme des aides à la presse, les conditions d’attribution de l’aide au portage ont été modifiées par le décret du 24 septembre 2014, l’objectif étant de rendre cette aide plus incitative, de favoriser le portage multititres et de mettre fin au conflit entre les éditeurs de presse quotidienne nationale et de presse quotidienne régionale.
D’autre part, il est prévu que le montant de la compensation versée à la sécurité sociale par le budget général dans le cadre du dispositif d’exonération de charges patronales des rémunérations des vendeurs-colporteurs et porteurs de presse, qui vise à développer un réseau structuré de portage, augmente en 2015, à hauteur de 22,5 millions d’euros.
J’évoquerai rapidement le titre II, relatif à l’Agence France-presse, en laissant le soin de l’expertise à Michel Françaix.
La création d’une filiale technique devrait permettre à l’AFP de rester dans la course mondiale à l’information, tout en lui garantissant les moyens nécessaires pour délivrer une information fiable et de qualité. La dotation, sous forme de prêt, de cette nouvelle société, éligible au programme des investissements d’avenir et soutenue par des établissements financiers publics, sera un gage de pérennité pour l’AFP. De plus, cette filiale lui procurera de nouvelles ressources par le biais de ses prestations.
Le statut d’entreprise citoyenne de presse d’information, dont la création est prévue par le titre III, concerne la presse en ligne, qui dispose souvent de compétences mais manque de capitaux. L’objectif est de donner une chance à ces nouveaux médias qui répondent à une demande sociale. Il s’agit de faire vivre ces véritables laboratoires d’idées que sont ces nouveaux vecteurs d’information. Il convient de leur donner les moyens de diffuser une information fiable dans un paysage numérique qui tend à confondre les échanges sur les réseaux sociaux et le travail journalistique, qui vise à diffuser une information vérifiée, objective et formalisée.
L’application depuis cette année du taux de TVA super-réduit est un premier pas dans cette direction. Il reste que cette presse a besoin de capitaux. Le statut d’entreprise citoyenne leur permettra, en utilisant un modèle de gestion emprunté à l’économie sociale et solidaire, d’attirer les investisseurs intéressés par des avantages fiscaux.
Mesdames, messieurs, Victor Hugo écrivait que « la liberté commence où finit l’ignorance ». Je propose que nous fassions nôtres ces propos et qu’au travers de cette proposition de loi, nous affirmions qu’être mieux informé, c’est être libre.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur, chers collègues, la proposition de loi portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse, ou proposition de loi Françaix, que nous examinons aujourd’hui en première lecture, a été déposée par les députés du groupe socialiste le 17 septembre dernier. Elle contient des dispositions qui avaient été proposées par Michel Françaix dans son rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2013.
Le Gouvernement avait par ailleurs confié une mission d’expertise conjointe sur l’avenir du schéma de diffusion de la presse écrite à l’inspection générale des finances, à l’inspection générale des affaires culturelles et au Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies. Ce rapport, remis l’été dernier aux ministères concernés, n’a pas été rendu public, mais d’après certaines fuites, il dresserait un constat alarmant : entre janvier et octobre 2014, la baisse de la diffusion de la presse quotidienne national atteindrait 9,6 % et celle de la presse quotidienne régionale 6 % ; le rapport serait en outre très critique envers plusieurs acteurs du secteur.
La présente proposition de loi était donc nécessaire, mais, au regard des enjeux, elle ne paraît guère révolutionnaire, comme l’a fait remarquer mon collègue Christian Kert en commission. Elle bénéficie toutefois de l’onction du Gouvernement, qui a engagé le 12 décembre la procédure accélérée.
Trois grands sujets y sont abordés.
Certaines de ces dispositions sont relatives à la distribution de la presse. L’Autorité de régulation de la distribution de la presse est appelée à jouer un rôle pivot dans ce secteur : elle devient une autorité administrative indépendante et voit ses pouvoirs de régulation renforcés.
D’autre part, les compétences du Conseil supérieur des messageries de presse sont étendues : chargé d’homologuer les barèmes des messageries, il lui reviendra de facto d’assurer le respect des principes d’égalité et de solidarité entre les éditeurs, notamment dans la distribution de la presse quotidienne, structurellement déficitaire. Il pourra également définir les bonnes pratiques en matière d’exercice de la profession d’agent de vente, notamment des vendeur-colporteurs. Enfin, il pourra autoriser les éditeurs de presse à traiter la question du « dernier kilomètre », en dehors du système coopératif des messageries.
Des amendements que j’avais cosignés avec mon collègue Christian Kert, porte-parole du groupe de l’UMP sur ce texte, ont été adoptés en commission afin de raccourcir les délais de décision concernant les barèmes.
Le deuxième sujet est celui de la gouvernance de notre « champion national », l’AFP. Le texte reprend les préconisations du rapport sur l’avenir de l’Agence France-presse que Michel Françaix, député de l’Oise, avait remis au Premier ministre au printemps 2014.
Lors de l’examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2015, vous aviez, madame la ministre, annoncé votre soutien à cette proposition, que vous jugiez « extrêmement importante » pour l’AFP ; vous aviez estimé qu’il était impératif d’en respecter le calendrier, conformément aux engagements pris par la France auprès de la Commission européenne.
La proposition de loi propose notamment de porter de trois à cinq ans le mandat du président-directeur général de l’AFP et d’en ouvrir le conseil d’administration à des personnalités qualifiées, sans lien avec les clients de l’agence.
Elle tend aussi à mettre en conformité le statut de l’AFP avec le droit européen de la concurrence, à la suite de la clôture de la plainte pour aide d’État déposée par un concurrent de l’AFP auprès de la Commission européenne. Il s’agit, plus précisément, de préciser que « la responsabilité de l’État ne peut se substituer à celle de l’AFP envers ses créanciers » et que « les activités de l’AFP ne relevant pas de ses missions d’intérêt général doivent faire l’objet d’une comptabilité séparée ». Dont acte.
Nous soutenons l’ensemble de ces mesures visant à défendre et conforter ce « géant de l’information », selon les mots de Christian Kert.
En revanche, nous sommes plus circonspects s’agissant du troisième volet de la proposition de loi, qui crée un nouveau statut d’éditeurs de presse. Notre orateur vous a d’ailleurs fait part de ses interrogations en commission. Nous avons bien compris que ce nouveau statut était en réalité destiné au secteur numérique et visait à encourager l’émergence de pure players, tout en étant ouvert à de petites entreprises de presse écrite, comme les hebdomadaires régionaux. Toutefois, le nom initialement choisi d’« entreprise citoyenne » nous semble maladroit, inapproprié, résultant uniquement d’une volonté d’affichage. En commission, nous en étions restés à la dénomination d’« entreprise solidaire de presse » ; nous préférerions, pour notre part, l’adjectif « participative ». La discussion nous permettra peut-être de revenir sur ce point.
De même, un travail plus approfondi avait été demandé par le président Bloche, deux codes – le code des postes et des communications électroniques et le code général des impôts – étant en concurrence pour la définition de la notion d’information politique et générale. Où en êtes-vous, monsieur le rapporteur ?
On s’attendait à ce que cette proposition de loi serve de véhicule à des cavaliers législatifs. Mais comment s’opposer à l’amendement tendant à permettre aux parlementaires visitant des prisons d’être accompagnés par des journalistes, disposition qui avait été enterrée avec le projet de loi relatif à la protection du secret des sources des journalistes ?
Toutefois, pour avoir procédé à une visite inopinée de la prison de la Santé avec mes collègues des Cadets-Bourbon en juin 2013, je considère qu’un député peut faire son travail correctement sans nécessairement alerter la presse !
Comme l’a titré Le Lab d’Europe 1, vous avez donc changé de cheval pour faire passer votre proposition. Je noterai juste qu’il s’agissait à l’origine d’une idée de Pierre Botton, reprise par l’association « Les prisons du coeur », dont la pétition avait recueilli en 2012 près de 300 signatures de députés de tous bords. Considérant que les journalistes avaient un rôle à jouer pour rendre compte de la condition pénitentiaire, nous avons décidé de soutenir cet amendement.
En conclusion, cette proposition de loi était nécessaire : la presse traverse en effet une crise profonde et nous devons veiller à ce qu’elle continue d’exercer ses missions fondamentales, tout en l’aidant à mener à bien sa mutation. Tel est l’objet de ce texte que nous soutiendrons, à condition que des dispositions nouvelles ne viennent pas en perturber l’équilibre.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.
La loi « Bichet » fonde la distribution de la presse sur un principe coopératif : solidarité entre les éditeurs, solidarité entre la presse quotidienne et les magazines. Pour renforcer ces solidarités, des tarifs postaux spécifiques et l’application du taux super-réduit de TVA ont été décidés.
Malgré cet environnement favorable, la coopérative Presstalis, qui doit se réformer profondément, court sans cesse après un équilibre que les Messageries lyonnaises de presse, jour après jour, détériorent. Depuis peu se dessine le chemin qui devrait conduire à une certaine solidarité : il passe par l’établissement d’une péréquation entre les deux coopératives, conformément à l’esprit de la loi Bichet. Dès lors, tout ce qui concourra au rapprochement des deux institutions sera salutaire pour la presse.
Je salue également le travail de notre rapporteur, qui vise à assurer une plus grande efficience grâce à une meilleure coordination des instances de régulation.
Madame la ministre, puisque vous venez d’évoquer la question des aides à la presse, je veux saisir cette occasion pour vous poser une question intéressant un éditeur de presse dont chacun s’accorde à reconnaître l’importance de la contribution à une information citoyenne : il s’agit du Monde diplomatique, dont les articles permettent de prendre du recul vis-à-vis du tumulte « affectivo-médiatique ». Vous paraît-il normal que ce mensuel reçoive de la collectivité publique une aide très inférieure à ce que reçoivent certains magazines dont l’intérêt civique est bien plus faible ?
De surcroît, ce même éditeur publie une revue, Manières de voir, qui, pour des raisons de sommaire, ne bénéficie d’aucune aide. Pourtant, l’intérêt de cette publication est incontestable. Quand allez-vous privilégier les publications d’information citoyenne par rapport à celles consacrées aux loisirs ou à la vie des stars ?
La réforme des aides de la presse que vous avez annoncée doit-elle éveiller en nous quelque espoir ?
L’article 1er est adopté.
L’article 2 est adopté.
Il s’agit de réaffirmer le champ de compétence du Conseil supérieur des messageries de presse et de l’Autorité de régulation de la distribution de la presse et de consacrer le caractère d’autorité administrative indépendante de cette dernière.
Monsieur le rapporteur, j’ai été surpris, en commission, que vous ne soyez pas sensible à mon raisonnement qui partait du principe qu’il convient de préciser que l’extension de compétences de ces deux instances ne vaut que dans le cadre du système coopératif. Je n’ai peut-être pas assez insisté sur le fait que, à défaut, cet article irait à l’encontre du caractère constitutionnel de la liberté de la distribution de la presse – peut-être mon insistance de ce soir vous permettra-t-elle de réviser votre position.
Christian Kert a dit ce que j’allais vous dire, puisque mon amendement va exactement dans le même sens que le sien. Je n’ajouterai donc rien.
Christian Kert me permettra de dire qu’en matière de réformes, il lui arrive parfois aussi de ne pas être révolutionnaire.
De quoi s’agit-il, très simplement ? Il faut noter que la presse quotidienne régionale est représentée au Conseil supérieur des messageries de presse. Deux membres dudit Conseil sont là pour vérifier que celui-ci s’occupera bien des dossiers dont il doit s’occuper. Dès lors, les inquiétudes exprimées… Les intéressés me l’ont d’ailleurs dit : « Si on a ça en plus, c’est bien ! »
Dans le même temps, il y a une contradiction avec ce que vous dites à d’autres moments : pour le dernier kilomètre, il faudra faire un petit peu autrement, parce qu’il faudra être moderne et efficace. C’est ce que vous disiez tout à l’heure, lorsque vous indiquiez que, pour le dernier kilomètre, il faut aller plus vite, ce qui, d’une certaine façon, veut dire que la presse régionale va intervenir dans des endroits dont Mme Buffet me rappellera qu’il ne faut pas qu’elle y intervienne.
Je pense donc que ces amendements n’apportent rien. Vous avez déjà la garantie que l’on s’occupe du système coopératif et pas du reste. Je suis presque autant que vous amoureux de la presse régionale, vous pouvez donc les rassurer s’ils ont la moindre inquiétude.
Je souscris à l’argumentation qui vient d’être présentée par le rapporteur, et je voudrais ajouter un certain nombre de choses.
Tout d’abord, ce sont les fondements mêmes du système de la distribution de la presse qui sont ici en jeu. Les deux amendements présentés visent en réalité à limiter le champ de l’intervention de l’Autorité de régulation de la distribution de la presse et du Conseil supérieur de messageries de presse et à la circonscrire à la simple régulation du système coopératif. Or cette logique est tout à fait à rebours de la volonté réformatrice dont cette proposition de loi procède.
Elle contredit même, en réalité, le droit actuellement en vigueur et les pratiques de la profession. Aujourd’hui déjà, les missions de l’ARDP et le CSMP s’exercent sur l’ensemble du système de distribution de la presse au numéro. Certes, la régulation porte en premier lieu sur ce qu’on appelle le niveau 1, qui concerne exclusivement les messageries, mais elle concerne aussi les deux autres niveaux, le niveau 2, qui concerne les agréments et les schémas directeurs des dépositaires centraux, et le niveau 3, qui concerne l’agrément des agents de la vente et l’implantation des diffuseurs par la commission du réseau du CSMP. Sur les niveaux 2 et 3, tous les titres sont concernés, qu’ils soient dans le système coopératif ou non. Par ailleurs, je vous rappelle que le Syndicat de la presse quotidienne régionale est membre du bureau du CSMP, alors même que les titres de la presse quotidienne régionale ont fait le choix de l’article 1 de la loi Bichet et ont leur propre système de distribution hors du système des coopératives.
La proposition de loi, dans son article 7 adopté en commission, donne compétence au CSMP pour définir les conditions de distribution de la presse quotidienne nationale par la presse quotidienne régionale sur le dernier kilomètre sans que les entreprises de presse en question aient à adhérer à une coopérative ou à constituer entre elles une nouvelle coopérative. Cette nouvelle compétence s’exerce bien au-delà du champ du système coopératif, et je crois qu’il serait tout à fait contradictoire d’insérer dans le texte une disposition qui rendrait impossible cet exercice.
Et puis, si vous me le permettez, j’ajouterai un simple mot pour répondre à M. le député Rogemont et également aux interrogations de Mme la députée Buffet, sur les aides à la presse. Je ne vais pas répondre sur le titre que vous évoquiez en particulier, monsieur Rogemont, je le ferai de manière plus générale, puisque vous m’interpellez sur un sujet complexe dont je crois qu’il doit être appréhendé de manière globale. En matière d’aides à la presse, il nous faut garder à l’esprit le souci de ne pas fragiliser ce secteur, dont toute la discussion générale nous a montré à quel point il était déjà fragilisé. Il ne faut pas fragiliser non plus La Poste, opérateur essentiel de cette mission de service public qu’est l’acheminement de la presse. Et puis un certain nombre de travaux sont en cours qui portent sur l’information politique et générale – je le rappelais tout à l’heure dans mon discours. Je travaille également à une révision d’ensemble des dispositifs d’aide à la presse, selon un calendrier qui devrait permettre d’aboutir au cours du premier semestre de l’année 2015. Ainsi que je l’ai dit en introduction, je souhaite remettre à plat ces aides à la presse et procéder à une véritable révision, dans le sens que vous évoquez.
L’article 3 est adopté.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 29 de la commission.
L’amendement no 29 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 4, amendé, est adopté.
Article 4
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 27 de la commission.
L’amendement no 27 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 4 bis, amendé, est adopté.
Les articles 5 et 6 sont successivement adoptés.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 31 du Gouvernement, portant article additionnel après l’article 6.
Je voudrais d’abord vous présenter mes excuses, mesdames et messieurs les parlementaires, pour la mauvaise manière qui vous est faite, la présentation aussi tardive d’un amendement, mais c’est pour la bonne cause, je vais l’expliquer.
La proposition de loi a supprimé, à l’article 18-5 de la loi no 47-585 du 2 avril 1947, le financement de l’ARDP par les sociétés de coopératives de messageries de presse. L’ARDP devient donc une autorité administrative indépendante, dont le financement a vocation à être assuré par l’État. Vous le savez, l’ARDP est garante du bon fonctionnement des messageries. Elle est juridiquement indépendante, pour garder le recul nécessaire vis-à-vis des acteurs, et elle doit aussi l’être financièrement : elle ne peut pas dépendre du financement du secteur, comme c’est le cas aujourd’hui. Cet amendement a pour objectif d’assurer la transition vers ce nouveau mode de financement et de différer au 1er janvier 2016 l’entrée en vigueur de cette disposition.
Favorable. J’en profite pour dire que cette évolution est un progrès : désormais, l’ARDP aura son propre budget, qui lui offrira un espace de liberté. On ne pourra donc pas prétendre qu’il y a un mélange des genres avec l’autre instance de régulation.
J’en profite, même si ce point ne figure pas dans la proposition de loi que nous examinons, pour dire qu’il faudrait peut-être donner le plus rapidement possible à l’ARDP des locaux qui lui permettent de ne pas être tout à fait côte à côte avec le CSMP. Il leur arrive parfois de partager leur secrétariat, mais il n’est pas tout à fait sûr que ces deux instances aient toujours envie de dire la même chose et de prendre les mêmes rendez-vous.
L’amendement no 31 est adopté.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement no 6 .
Le rapporteur m’a déjà prévenue qu’il émettrait un avis défavorable, puisqu’il a répondu à M. Kert qu’il se situerait peut-être à égale distance de nos deux propositions.
Je voulais juste appeler l’attention sur l’alinéa 3, qui insiste sur la possibilité qui serait offerte, pour des zones géographiques déterminées, de recourir à des réseaux locaux sans adhésion à une société coopérative de messageries de presse commune. Je crains que cette ouverture ne soit un peu dangereuse. On ne parle pas, là, de dernier kilomètre, on parle de « zones géographiques déterminées ». Je voulais donc substituer aux mots « sans adhésion » les mots « si elles sont adhérentes ».
Sur le principe, je suis assez d’accord, pour ma part, avec ce que dit Mme Buffet. De quoi s’agit-il en fait, avec cette régulation ? Il s’agit de promouvoir quatre principes qui n’étaient pas toujours assez mis en avant : la solidarité, car il faut aller plus loin en cette matière ; la mutualisation, comme notre collègue Rogemont l’a dit tout à l’heure ; le contrôle ; la transparence. À partir du moment où ces quatre points peuvent fonctionner ensemble, la question de savoir si on a une vision bicéphale de l’ensemble des coopératives est totalement différente.
Dans un premier temps, peut-être ne va-t-on pas assez vite, mais c’est quand même maintenant que ces deux coopératives commencent à travailler ensemble. C’est ça qui est assez drôle : on a perdu quatre années au cours desquelles il ne se passait rien, et on n’en parlait pas trop, et, maintenant, elles commencent à travailler ensemble. J’ai tendance à dire : « Chiche ! » Et voyons si on va pouvoir les entraîner à aller plus loin.
Voilà pourquoi, à mon grand regret, j’émets, à la suite de cet examen en commission, un avis défavorable.
Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. Comme cela a été dit par le rapporteur, le système coopératif entre les titres et entre les familles de presse fonctionne aujourd’hui avec plusieurs coopératives de distribution, et, depuis 1947, la loi laisse aussi la possibilité à un éditeur de prendre en charge sa propre diffusion.
La modification proposée aux alinéas 2 et 3 de cet article vise à offrir un nouveau cadre de distribution sur l’ensemble du territoire pour les titres de presse quotidienne nationale qui souhaiteront conclure des accords de distribution avec les titres de la presse quotidienne régionale afin d’accomplir les derniers kilomètres vers les points de vente en réalisant, je crois, des économies substantielles sur les frais de transport. Cette possibilité ne remet pas en cause les principes coopératifs fondateurs de la loi Bichet. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable.
L’amendement no 6 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement no 2 .
Nous poursuivons le même débat.
J’ai noté dans mon intervention l’importance du 13 ° que l’article 7 tend à insérer à l’article 18-6 de la loi du 2 avril 1947, selon lequel « si le bon fonctionnement de la distribution de la presse le justifie, [le Conseil supérieur des messageries de presse] détermine les conditions de la mise en commun de moyens par les messageries, au besoin en créant une société commune ». Lorsque nous avons des discussions, chacun reconnaît que la concurrence qui s’est exercée toutes ces dernières années entre les deux coopératives a été extrêmement mortifère. Encore récemment, des magazines ont quitté l’une pour l’autre, et celle qui a la charge des quotidiens nationaux, Presstalis est de nouveau en difficulté.
Je comprends bien que ce travail en commun, que cette mise en commun sont encouragés, mais mon amendement vise à ce qu’un discours clair soit tenu, qui affirme la nécessité d’un tel rapprochement, tout simplement pour que la distribution par les coopératives de messagerie ait un avenir. Sinon, Presstalis mettra un jour la clé sous la porte.
Je suis encore en harmonie avec les propos qui viennent d’être tenus, mais racontons l’histoire.
Il y avait deux coopératives. Au lieu de jouer la solidarité, elles passaient leur temps – il s’agissait surtout des Messageries lyonnaises de presse – à vendre leurs produits 30 % en dessous du prix pertinent. Soit l’autre – Presstalis – perdait son client, soit elle devait réduire ses propres prix de 35 %. Au bout du compte, puisque les prix n’étaient absolument pas raisonnables, le montant des aides à la presse était multiplié par deux. Il faut dire les choses comme elles sont : ceux qui auraient dû décider, les éditeurs de presse, étaient moyennement responsables.
Aussi le secteur était-il en crise. Voilà pourquoi, à un moment donné, nous avons dit qu’il fallait une régulation.
Cette régulation se met en place depuis un certain temps, et, apparemment, ne fonctionne pas mal. Mais, Mme Buffet a raison, rien ne nous dit ce qu’il en sera dans trois mois. Il faut donc aller plus vite, il faut donner au régulateur plus de moyens pour vérifier que tout le monde joue le jeu et il faut que cette société commune de moyens réussisse. Je serai le premier, dans un an, à dire, si elle ne fonctionne pas, qu’il faut peut-être réfléchir à nous acheminer plus vite vers une fusion, mais je m’y refuse pour l’instant. On ne peut évidemment pas forcément les gens à fusionner s’ils ne le veulent pas, mais on pourra reposer la question du fonctionnement, et déterminer les conditions dans lesquelles l’État apportera son aide.
J’émets donc, aujourd’hui, un avis défavorable, mais, sur le fond, effectivement, il faut mener cette réflexion, il faut s’assurer, à chaque instant, que cela se passe bien. On aurait grand tort de ne pas le faire. On régule, on régule, mais on n’a pas assez régulé et il ne faut pas venir nous dire – j’ai vu d’autres amendements qui allaient dans ce sens – que la régulation ne doit pas avoir trop de pouvoirs. Si ! Il faut quand même qu’elle en ait pas mal, pour éviter, peut-être, la fusion.
Défavorable. Il faut, à mon sens, préciser que ce qui est important dans cette proposition de loi, c’est qu’elle réaffirme très clairement le principe de solidarité de la distribution de la presse et que, par ailleurs, imposer par la loi une société unique de messagerie serait incompatible, précisément, avec les principes de liberté et de solidarité de la distribution de la presse. Ajoutons peut-être, également, que le droit applicable aux coopératives implique la liberté des membres de fonder une ou plusieurs coopératives et qu’imposer par la loi une société coopérative de messageries unique, dotée d’une mission de service publique, serait contraire au droit de la concurrence, tant national qu’européen.
L’amendement no 2 n’est pas adopté.
Article 7
L’article 7 est adopté.
L’article 8 est adopté.
L’amendement no 25 vise à supprimer la dernière phrase de l’alinéa 4 de cet article 9. Il s’agit de supprimer la possibilité de suspendre pendant deux mois le délai accordé à l’ARDP par l’article 18-13 de la loi du 2 avril 1947 – dite loi Bichet – lorsqu’elle souhaite utiliser son pouvoir de réformation des décisions du CSMP. Un délai aussi long est en effet incompatible avec la réalité économique du secteur. La suppression de cet alinéa nous semble être la solution la plus pertinente, bien que M. le rapporteur ait donné, en commission, un avis défavorable.
L’amendement no 26 est un amendement de repli : il vise à réduire la durée maximum de suspension de deux mois à un mois.
Là encore, nous sommes confrontés à une contradiction. Nous voudrions que les choses aillent plus vite, mais l’ARDP nous dit : « nous sommes parfois confrontés à des dossiers tellement complexes qu’il nous faut le temps de mener une étude juridique plus longue, d’autant plus que nous ne sommes que quatre personnes. » Leur donner trois ou quatre mois pour cela, ce serait en effet trop long. Nous avons décidé, en commission, de rester à mi-chemin : c’est pourquoi nous avons choisi de leur donner deux mois pour réaliser les études nécessaires. Il me semble que cette solution intermédiaire – je dirais même : centriste (sourires) – est acceptable pour tous. L’avis de la commission est donc défavorable.
Comme nous l’avons rappelé tout à l’heure, l’ARDP dispose de peu de moyens propres : elle peut donc avoir besoin d’un délai supplémentaire pour faire des consultations et élaborer sa décision. Limiter la suspension du délai à deux mois permet de ne pas rallonger excessivement le processus. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L’article 9 est adopté.
L’article 10 est adopté.
Il est nécessaire d’assurer la pérennité de l’AFP, sans quoi les scoops ne viendraient que d’internet, la plupart du temps sans aucune vérification, ouvrant le champ à des manoeuvres de déstabilisation. L’AFP est d’autant plus nécessaire que le nombre d’agences de presse généralistes diminue fortement ; or sans informations vérifiées, il est très difficile de porter sur le monde qui nous entoure un regard distancié et aiguisé.
C’est pourquoi, tout en respectant l’indépendance et l’impartialité de l’AFP, ce texte propose d’élargir la composition de son conseil d’administration afin, selon les termes de l’exposé des motifs, de « diversifier les points de vue qui s’y expriment ». Concrètement, il s’agit de réduire le nombre de représentants des éditeurs de presse et d’intégrer des personnalités qualifiées – je dirais même : des personnalités vraiment qualifiées, car il ne faut pas que le conseil d’administration de l’AFP devienne un terrain réservé pour les grands commis de l’État à la retraite – nommées par le conseil supérieur de l’AFP.
De même, le rallongement de la durée du mandat du président-directeur-général de trois à cinq ans renouvelables est une bonne chose : on ne gère pas de telles institutions dans un temps trop compté. On pourrait appliquer le même raisonnement à d’autres secteurs que la presse : j’ai moi-même défendu ces positions pour l’audiovisuel public. Bien entendu, les nominations au sein d’institutions majeures du paysage culturel français doivent se faire dans la transparence, pour sélectionner le candidat le plus compétent, mais il faut aussi que les mandats soient suffisamment longs pour assurer une bonne gestion du service public.
La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement no 13 .
Cet amendement vise à modifier la composition du conseil supérieur de l’AFP, garant des obligations fondamentales de l’agence, qui figurent à l’article 2 de la loi du 10 janvier 1957. Ces obligations s’appliquent aussi aux médias vidéo et aux réseaux numériques. Par cet amendement, nous proposons qu’un membre du conseil supérieur de l’AFP soit désigné par le conseil national du numérique. Les contenus numériques et audiovisuels figurent parmi les nouvelles priorités de l’AFP : il serait donc cohérent d’adapter la composition de son conseil supérieur.
Cet amendement a été rejeté par la commission. Nous ne voulions pas qu’un représentant des consommateurs soit présent au conseil supérieur de l’AFP ; nous ne voulions pas non plus qu’il y ait un représentant du CSA, car nous pensons que ces deux institutions ne doivent pas être liées ainsi.
Il me semble cependant que pour le conseil national du numérique, les choses sont différentes ; certes, la commission a rejeté cet amendement, mais…
…je suis décidé à donner, à titre personnel, un avis favorable – je ne sais pas si mes collègues me suivront. Je considère en effet que la présence d’un représentant du conseil national du numérique serait plutôt une bonne chose. Je répète que je suis défavorable à toutes les autres suggestions que j’ai mentionnées : il ne faut pas que des représentants des consommateurs soient présents au conseil supérieur de l’AFP.
Je suis tout à fait d’accord avec les objectifs avancés par les auteurs de cet amendement. Il serait bon que les compétences numériques soient mieux représentées au conseil supérieur de l’AFP. Il y aurait peut-être d’autres moyens d’ y parvenir que de nommer une personne supplémentaire à ce conseil ; quoi qu’il en soit, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée pour cet amendement.
Je suis d’accord avec l’avis de M. le rapporteur : compte tenu de l’importance du numérique pour le développement de la presse, il me semble que la présence, au conseil supérieur de l’AFP, d’un membre désigné par le conseil national du numérique, serait tout à fait pertinente.
D’autres propositions avaient été faites pour ajouter des membres au conseil supérieur de l’AFP. Je précise que l’adoption de cet amendement ne signifierait pas que l’avis de la commission a changé concernant ces propositions. Je me rallie donc, au nom du groupe SRC, à la proposition de M. le rapporteur.
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Je suis sincèrement désolé d’apporter une note dissonante à cette belle harmonie !
Tout d’abord, je me veux le gardien de l’avis de la commission, qui s’est prononcée défavorablement à cet amendement. Nous voulons tous que la dimension numérique soit présente à l’AFP. C’est une évidence : pour se développer à l’avenir, l’AFP doit se lancer pleinement dans la révolution numérique.
Si cet amendement était adopté, cela ne me poserait pas de problème, mais un point m’étonne : un membre du conseil supérieur de l’AFP, qui est une haute autorité indépendante, serait nommé par le conseil national du numérique – instance que je connais très bien, et accomplit un travail fantastique – qui n’est qu’un conseil consultatif.
Ce serait, à mon avis, très paradoxal. En général, c’est plutôt l’inverse : les hautes autorités indépendantes nomment des personnalités au sein de conseils consultatifs. Vous proposez qu’un conseil consultatif comme le conseil national du numérique désigne une personnalité pour siéger au sein d’une haute autorité indépendante : je vous le dis sincèrement, sur le principe, cela me pose problème. Si vraiment nous voulons donner une dimension plus numérique au conseil supérieur de l’AFP, il faut trouver une autre solution, car le schéma que vous proposez ne me satisfait pas. Encore une fois, pardonnez-moi cette note dissonante, mais je devais rappeler cet obstacle, qui a motivé l’avis défavorable de la commission.
Je félicite M. le président de la commission pour son intervention, car j’ai moi-même voté contre cet amendement en commission, compte tenu des arguments avancés par M. le rapporteur. Comme l’a dit M. le président de la commission, si vraiment nous voulons que le numérique soit représenté au conseil supérieur de l’AFP, il nous faut trouver un autre moyen.
Monsieur le président, je vous demande une courte suspension de séance.
La séance, suspendue à vingt-trois heures quarante, est reprise à vingt-trois heures quarante-cinq.
Nous voulons tous la même chose, mais la méthode n’est peut-être pas la bonne. Il serait bon de réfléchir à cette question, d’y travailler à nouveau, pour que la demande de M. Pompili puisse être satisfaite, mais par un autre biais. Cette proposition ne paraît pas, en effet, être la plus intelligente…
Pardonnez-moi : c’est moi qui ai commis une bêtise en me prononçant en faveur de votre amendement. Ce n’est pas votre intention qui pose problème, mais la formulation concrète de cet amendement. Puisque vous avez l’assurance que nous reviendrons sur cette question en deuxième lecture, je vous suggère de retirer cet amendement. Ce serait là une solution acceptable pour nous tous.
L’intérêt de la navette, c’est de permettre à ce type de discussion de se poursuivre. Cela permet d’approfondir les sujets qui n’ont pu l’être en première lecture. Je souhaite vraiment que le numérique soit présent au conseil supérieur de l’AFP, mais je suis d’accord pour que l’on prenne le temps d’y travailler tranquillement. Je retire donc cet amendement.
L’amendement no 13 est retiré.
La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement no 14 .
J’en viens au conseil d’administration de l’AFP. Il compte aujourd’hui parmi ses membres cinq représentants des directeurs d’entreprises françaises de presse. Par cet amendement, nous souhaitons que l’un d’entre eux soit un représentant des directeurs d’entreprises françaises de la presse d’information en ligne désigné par les organisations professionnelles les plus représentatives. Je répète que le numérique constitue l’une des nouvelles orientations stratégiques de l’agence. Il importe donc de favoriser ces orientations en intégrant les entreprises de presse en ligne, très novatrices en la matière, et qui pourraient être moteur.
En dernier ressort, le conseil supérieur, qui compte deux parlementaires, aura à choisir ces cinq personnalités. Il est donc évident que, parmi les personnalités recherchées, certaines représenteront l’international, d’autres devront réfléchir à ce que sera la presse dans dix ans, et il y aura toujours une place pour le numérique. Ce n’est pas au législateur de déterminer le nombre de représentants du numérique. De la même manière, la presse régionale a demandé d’inscrire dans la loi qu’il y aura quatre représentants de la presse régionale et un de la presse nationale, la presse nationale demandant quant à elle que la proportion soit de trois et deux.
Il est évident que l’esprit de la loi est d’ouvrir largement le conseil d’administration et que le numérique devra y avoir toute sa place. Dans cinq ans, vous regretterez peut-être qu’il n’y ait qu’un représentant, car vous en voudrez trois.
Il faut garder à l’esprit que, parmi les cinq représentants, certains viendront d’autres horizons que la presse régionale ou nationale. La présence d’un député et d’un sénateur devrait garantir cette ouverture. Avis défavorable.
Avis défavorable. J’ajoute aux propos du rapporteur que les entreprises françaises de la presse d’information en ligne ne sont pas une catégorie reconnue juridiquement.
Il est donc d’autant plus complexe de désigner une personne représentant cette catégorie.
Par ailleurs, il est dommage d’opposer à nouveau la presse en ligne et la presse papier. En réalité, toute la presse quotidienne nationale est composée de médias multisupport, qui sont à la fois en ligne et papier.
J’entends bien ce qui vient d’être dit. Certes, il est ennuyeux de figer dans la loi la composition d’un conseil d’administration, mais je demande simplement un minimum de représentation. Quand les parlementaires auront à désigner les membres du conseil d’administration, ils pourront ajouter d’autres représentants de la presse en ligne.
Aujourd’hui, la loi n’offre aucune garantie de représentation de la presse en ligne. Or, il s’agit d’une réalité très importante dans le monde des médias. Ce secteur est aujourd’hui insuffisamment aidé et accompagné. Il n’est qu’à constater, dans le PLF, que les aides accordées à la presse en ligne sont sans commune mesure avec celles octroyées aux autres médias.
Si nous ne posons pas aujourd’hui quelques actes fondateurs, si nous ne poussons pas un peu à la roue, j’ai peur que la situation n’évolue pas suffisamment, malgré toutes les bonnes intentions affichées dans la présente proposition de loi, lesquelles sont certainement sincères. Je maintiens donc cet amendement.
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Je serai très rapide, car Mme la ministre, de façon très synthétique, a décrit le plus clairement possible la réalité des entreprises de presse d’aujourd’hui – et encore plus de demain –, à savoir le multisupport, la combinaison du papier et de la dématérialisation. La meilleure preuve, c’est que nous avons été amenés dans cet hémicycle – nous avons sans doute mis trop de temps – à étendre à la presse d’information en ligne le bénéfice du taux super-réduit de TVA à 2,1 % appliqué à la presse papier. Les difficultés provenaient avant tout des réticences de la Commission européenne à ce que nous légiférions dans ce domaine. D’ailleurs, Mme la ministre est mobilisée pour convaincre la commission.
Cette harmonisation fiscale traduit une réalité commune. Puisque nous écrivons la loi, non pas seulement pour le moment présent, mais pour les années à venir, nous devons abandonner cette distinction qui, à vrai dire, a de moins en moins de justification.
Mme la ministre a très clairement expliqué les choses, mais nous devons tous être d’accord. Il n’existe pas aujourd’hui de presse seulement numérique. Je tiens à vous dire qu’aux États-Unis, à chaque fois qu’un journal a abandonné le papier pour le numérique, il est mort dans les deux mois, car la marque vit par l’édition papier.
En revanche, les représentants des nouvelles formes de numérique, comme le syndicat de la presse indépendante d’information en ligne – le SPIIL –, qui fait très bien son travail, ont raison de dénoncer l’absorption par la presse papier de toutes les aides – c’est d’ailleurs l’objet de la troisième partie de la proposition de loi. Pour l’heure, il est vrai que leurs projets ne sont pas reconnus comme ils le devraient.
Pour autant, il ne me paraît pas judicieux de vouloir favoriser aujourd’hui le numérique seul, la combinaison du papier et du numérique, ou le papier seul. Évidemment, le numérique devra, à l’avenir, être intégré dans les réflexions, mais il n’existe pas aujourd’hui de presse seulement numérique, en dehors des trois ou quatre cas que l’on pourra examiner tout à l’heure.
Vous avez eu parfaitement raison de citer l’exemple d’Amiens : il est rageant qu’une entreprise de ce type, qui avait tout pour réussir, n’ait pas eu les investissements minima nécessaires. J’espère qu’on y parviendra à l’avenir. Cette proposition de loi est destinée à ce type d’entreprise, qui a besoin d’investisseurs, non pas pour des sommes colossales, mais pour passer les trois premières années, qui sont les plus difficiles. Je suis très favorable – nous le verrons tout à l’heure – à aider les entreprises qui développent uniquement le numérique. Pour le reste, il est très difficile de ne pas considérer comme numérique un journal qui combine papier et numérique.
Vous connaissez bien la différence entre le numérique et les autres supports. Lorsque le numérique est payant, il s’agit de vrai numérique. Quand il n’est pas encore payant, il est considéré comme du papier qui en vient au numérique – cela explique d’ailleurs pourquoi il est difficile de récupérer les recettes liées à la publicité. Il faudra évidemment favoriser la représentation du numérique, mais il va de soi qu’il sera représenté. Définir un représentant pour le seul secteur numérique n’apporterait rien, à l’heure actuelle.
L’amendement no 14 n’est pas adopté.
L’amendement no 28 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 11, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement no 3 .
Tous les orateurs ont rendu hommage à la qualité de cet outil que constitue l’AFP. Chacun a reconnu la qualité de sa rédaction, la diversité de son champ de compétences et son originalité. En commission, nous avons maintenu, et je m’en félicite, la rédaction initiale des articles 1er et 2 et nous avons repoussé l’idée d’une comptabilité séparée pour les activités ne concernant pas les missions essentielles de l’AFP, même si le problème demeure.
Mon amendement concerne la question de la faillite. Nous passons de la loi de 1957, qui rend l’État responsable de la situation financière de l’AFP, à un article qui soumet l’AFP au droit commun régissant les faillites, au motif que les dispositions prévues par la loi de 1957 n’étaient pas conformes à la Constitution – on a mis du temps à s’en apercevoir, mais j’accepte cet argument. Surtout, la modification des règles de mise en faillite de l’AFP répond à une exigence de la Commission européenne.
Mon amendement ne vise pas à revenir aux dispositions prévues par la loi de 1957, puisqu’elles sont inconstitutionnelles. Il prévoit qu’en cas de difficultés financières de l’AFP, le Gouvernement remette au Parlement un rapport afin qu’un débat soit organisé pour remédier à la situation.
L’objectif de ces dispositions sur l’AFP est de protéger l’agence et ses salariés. Pouvez-vous me citer le nom d’une seule agence de ce type dans le monde qui ne procède pas, actuellement, à des licenciements ? Voulez-vous, ma chère collègue, que je vous parle des licenciements menés actuellement par l’agence de presse anglaise, qui se spécialise dans le domaine de la bourse, ou encore de l’agence américaine ? Je ne me plains pas, bien sûr, qu’il en aille différemment en France.
Les débats que nous avons eus tout à l’heure – au cours desquels je n’ai pas voulu intervenir – ont bien montré que la création de la filiale engendrait des inquiétudes. Pourtant, cela ne devrait pas être le cas, car il s’est agi d’une filialisation de moyens, et non de personnel. Le personnel, je le répète, est resté dans l’agence. Je m’étais d’ailleurs engagé à ce qu’une solution soit trouvée, ce à quoi l’on m’a rétorqué que je n’y parviendrai pas. Or, on y est arrivé, ma chère collègue. Dans dix ans, bien sûr, la situation aura peut-être changé ; il n’est d’ailleurs pas impossible qu’elle ait évolué dans le bon sens.
Quel est notre rôle en la matière ? Il ne faut rien faire qui contrarie Bruxelles de manière définitive. Je rappelle que nous avons eu gain de cause dans l’affaire qui nous a opposés à l’agence allemande, qui avait porté plainte contre la France pour concurrence déloyale. Dès lors, ne nous éloignons pas de la solution trouvée, qui nous permet d’obtenir ce que nous souhaitons ; ne lançons pas ce débat sur la filiale de l’agence, qui pourrait réveiller les craintes sur certains aspects de la question.
À mon sens, sur 95 % des points dont nous discutons, nous avons renforcé l’AFP. C’est sûrement la seule agence au monde qui n’aura pas à demander à des salariés, dans les années qui viennent, de partir.
Avec ce texte, nous donnons à l’AFP les moyens de continuer à être ce qu’elle est : une entreprise à la fois unique et comme les autres, qui doit faire preuve de capacité d’adaptation.
Quand j’étais beaucoup plus jeune, c’était en 1982, j’ai été chargé de mission du Président de la République, François Mitterrand. La situation était alors très simple : l’AFP allait mourir, car elle ne disposait pas des moyens nécessaires en matière de photographie. Du jour au lendemain, cela s’est fait sans Bruxelles, il a été considéré que l’agence ne serait plus seulement le petit télégraphiste, qui publiait les meilleurs communiqués de la place, et qu’il fallait investir dans les activités de photographie.
Aujourd’hui, l’AFP est confrontée à d’autres problèmes ; nous sommes les mieux placés sur le plan des communiqués de presse, mais en matière de vidéo, ou de sport, par exemple, nous avons pris beaucoup de retard, faute d’investissements. Investir dans la filiale, dans laquelle la Caisse des dépôts et consignations aura sa part, nous met à l’abri du regard de Bruxelles ; nous sommes hors du champ de ce qui est autorisé ou interdit en matière de concurrence à l’échelle communautaire. Ce faisant, en outre, nous gardons l’AFP, ce fleuron dont nous avons tous parlé tout à l’heure, et qui ne doit pas bouger.
L’équilibre que nous avons trouvé est juste. Vous me demandez de revenir dessus, ce qui risque de faire, dans un sens ou dans l’autre, tout capoter.
Voilà pourquoi, si, dans le fond, je suis d’accord avec tout ce que vous avez indiqué dans votre défense d’amendement, ma chère collègue, je ne peux qu’émettre un avis défavorable.
La rédaction de l’alinéa 10, que le présent amendement tend à modifier, résulte d’une obligation à laquelle est tenu le Gouvernement. En effet, dans le cadre de la réponse à l’Union européenne, visant à solder la plainte pour aide d’État que nous avons évoquée il y a un instant, la France s’est engagée à soumettre au droit commun la liquidation des créances de l’AFP, en limitant la responsabilité de l’État, qui pourrait être comprise comme une aide d’État apportant un avantage concurrentiel à l’agence. C’est précisément l’alinéa 10 qui répondait à cet engagement.
Je voudrais apaiser les craintes que soulève cette disposition ; en réalité, elle ne fait que sécuriser l’agence, en la mettant en conformité avec le droit communautaire, ce qui est indispensable pour son développement, notamment sur le marché européen.
L’État, à travers cette disposition, est aux côtés de l’agence ; il accompagnera son ambitieux plan de développement, tant d’un point de vue financier qu’au regard de sa conformité aux règles européennes.
Dès lors, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
J’entends bien les propos du rapporteur et de la ministre. La présente proposition de loi essaie de préserver ce qui peut l’être, malgré le droit européen et les exigences de la Commission européenne. Vous l’avez très bien expliqué, monsieur le rapporteur, c’est une loi protectrice.
Néanmoins, monsieur le rapporteur, si cette agence est la seule à disposer d’un tel rayonnement et à ne pas avoir à subir de licenciements, c’est peut-être en raison du savant dosage que nous avons mis en place et fait vivre ces dernières années.
Prenons garde à ce que cet équilibre destiné à satisfaire ces exigences –j’ai bien lu la lettre de la Commission européenne et pris note des arguments qu’elle a avancés – ne mette pas à mal ce savant dosage.
L’amendement no 3 n’est pas adopté.
L’article 12 est adopté.
L’article 13 est adopté.
Madame la ministre, mes chers collègues, le titre III de cette proposition vise à sécuriser et à moderniser le secteur, autant que les acteurs, de la presse d’aujourd’hui.
Il contient des dispositions destinées à favoriser l’émergence de nouveaux acteurs à même de renouveler le pluralisme de la presse et de consolider le modèle économique et juridique des entreprises de presse.
Les nouvelles technologies ont profondément modifié les modes et les habitudes de consommation des lecteurs. Elles ont, par là même, fragilisé le modèle économique des titres de presse. La solidarité et la coopération ont, dès lors, un véritable rôle à jouer. Pour ces raisons, mon collègue Michel Françaix propose, de façon très pertinente, la création d’un statut d’entreprise citoyenne de presse d’information.
Ce statut est inspiré de celui des entreprises commerciales du secteur de l’économie sociale et solidaire. Il s’agit de permettre l’émergence de nouvelles formes de diffusion de l’information, en mobilisant, dans un projet collectif d’intérêt général, des financements provenant d’investisseurs, de fonds publics ou de participation de salariés.
Ce statut a pour caractéristique l’affectation d’une fraction des bénéfices à la constitution d’une réserve statutaire obligatoire consacrée au maintien et au développement de l’activité de l’entreprise.
Le titre III de cette proposition de loi ne se limite pas à renforcer la sécurité des modèles existants. Il a pour objet de repenser les logiques économiques, sociales et culturelles du secteur de la presse. Pour toutes ces raisons, je remercie Michel Françaix de sa proposition.
Avant de présenter mon amendement, je veux rappeler à Michel Françaix qu’il a tout à l’heure prôné une lecture centriste des amendements. Madame la ministre, je ne m’autorise pas à vous donner une leçon de centrisme..
Sourires sur les bancs du groupe SRC.
…mais votre conception du centrisme s’apparente à une guillotine ! En commission des affaires culturelles et de l’éducation, nous avions bien compris que la leçon centriste revenait à refuser le premier amendement au bénéfice du second. Or vous avez, d’un coup d’un seul, rejeté les deux !
Mon amendement revient à une forme de « dentelle législative » sur laquelle nous n’allons pas passer beaucoup de temps. Nous sommes tous d’accord pour ne pas qualifier ces entreprises de citoyennes, et pour chercher une autre appellation. Vous avez retenu celle de solidaire : nous proposons celle de participative, qui paraît beaucoup mieux correspondre à l’état d’esprit du rapporteur.
Je vous redis ce que j’ai déjà eu l’occasion de vous dire lors de l’examen de cette proposition de loi en commission : nous ne nous accrocherons pas à cette appellation, mais elle nous paraît meilleure.
Si vous avez déposé cet amendement, c’est bien que votre appellation vous paraît meilleure que la mienne. En ce qui me concerne, je ne partage pas votre avis. Je vais vous dire ce que je pense.
J’aurais en fait aimé retenir l’appellation de sociétés à lucrativité limitée, terminologie qui aurait correspondu le mieux à ma démarche. Mais j’ai eu peur que personne n’y comprenne rien. Pour cette raison, nous avons cherché une autre appellation.
Nous avions effectivement commis une erreur en jetant notre dévolu sur le terme « citoyen », car il pouvait susciter, de la part d’entreprises de presse n’ayant pas opté pour ce nouveau statut, des réactions de surprise. J’en reste donc au terme que nous avions choisi.
Je me vois donc obligé, et pas par la guillotine, de donner un avis défavorable à votre amendement.
Même avis.
L’amendement no 11 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement no 8 .
Il est également défavorable. Il ne serait pas conforme à l’objectif poursuivi par la proposition de loi de contraindre les entreprises solidaires de presse à adopter le statut coopératif. Les sociétés coopératives de production et les sociétés coopératives d’intérêt collectif disposent d’un statut spécifique répondant à des exigences particulières en termes de gestion et d’association des salariés. En contrepartie, elles bénéficient d’avantages fiscaux particuliers.
Les entreprises solidaires sont des entreprises commerciales, qui renoncent à une partie de la redistribution de leurs bénéfices. Les avantages fiscaux, comme les contraintes statutaires de ces différents types d’entreprise ne sont pas équivalents. L’avis du Gouvernement est donc, pour ces raisons, défavorable.
L’amendement no 8 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour soutenir l’amendement no 24 .
Cet amendement vise à modifier l’alinéa 4 de l’article 14, puisque la seule mention de l’information politique et générale au sens de l’article 39 bis A du code général des impôts me semble insuffisante. En effet, il existe d’autres définitions de l’information politique et générale, notamment dans le code des postes et des communications électroniques.
Cette seule référence n’a vocation qu’à servir un dispositif fiscal à venir. Comme telle, elle n’a pas sa place dans une loi ne contenant que des dispositions d’ordre général comme celle du 1eraoût 1986 portant réforme du régime juridique de la presse.
En outre, cette mention présente l’inconvénient de perturber le débat actuellement en cours, au sein de la commission paritaire des publications et agences de presse, sur la définition de la notion d’information politique et générale. De plus, la définition de l’information politique et générale consacrée par l’article 39 bis A du code général des impôts semble plus large que les autres, ce qui ne manquera pas d’avoir un impact certain sur le nombre de titres pouvant bénéficier des aides à la presse.
Pour toutes ces raisons, il est proposé de renvoyer à un décret en Conseil d’État la définition de la part d’information politique et générale nécessaire pour bénéficier de ce statut spécifique d’entreprise.
Vous voyez que nous sommes en train de tâtonner. La ministre travaille actuellement à une évolution des aides à la presse en respectant un état d’esprit qui n’a pas changé. Que sont les aides à la presse ? Des aides aux lecteurs. Que sont les aides aux lecteurs ? Elles visent à aider davantage le lecteur citoyen que son homologue consommateur.
Le lecteur citoyen doit pouvoir lire un journal qui ne lui coûte pas trop cher, puisque ce support l’aide dans sa propre réflexion. Le lecteur consommateur pourrait, lui, payer son journal, qui ne doit avoir un accès que très limité aux aides à la presse, au juste prix. Nous sommes tous d’accord sur ce constat.
Faut-il retenir une définition restrictive ou élargie de l’information politique et générale ? Se poser cette question revient à constater que le monde évolue. Faut-il alors graver dans le marbre des textes qui, deux ans plus tard, se révèlent obsolètes ?
Pour quelle raison ai-je retenu la définition de l’article 39 bis A du code général des impôts ? Parce qu’elle est large et que son cadre permettra, demain, à une revue traitant des questions d’environnement ou de santé, à condition qu’elle consacre 33 % de sa surface à l’information générale, de bénéficier des aides à la presse.
Peut-être qu’à l’avenir ce type de revue méritera davantage d’être aidé que certains journaux dans lesquels l’information politique et générale est censée être prédominante, mais dans lesquels l’abondance de publicité dément cette orientation.
Avec cette définition, nous avons plutôt voulu élargir le spectre des aides. Elles doivent pouvoir bénéficier au numérique ainsi qu’à la presse régionale hebdomadaire, mais aussi, demain, à des journaux et à des revues – j’ai pris l’exemple de supports traitant des questions d’environnement ou de santé – qui donnent de l’importance à l’information politique et générale. Cette définition de l’article 39 bis A permet d’intégrer ces derniers au dispositif.
Voilà pourquoi, aujourd’hui, et en attendant peut-être que l’on y voit plus clair sur la façon la plus efficace de cibler les aides, je suis plutôt favorable au maintien en l’état de cet alinéa 4 et au rejet de votre amendement.
Il est également défavorable. Les entreprises qui vont choisir ce statut auront besoin, dès leur création, de savoir si leur activité d’éditeur de presse se situera bien dans le champ de la nouvelle loi. Il est vrai que la définition figurant à l’article 39 bis A du code général des impôts est, à l’heure actuelle, la seule définition de l’information politique et générale de niveau législatif dont nous disposons.
En outre, elle offre le champ le plus large à la presse dite d’information politique et générale. En effet, elle intègre des publications et des sites de presse en ligne qui peuvent s’adresser à des publics particuliers tout en traitant, sous un angle déterminé, de questions d’information politique et générale.
Je pense en particulier à certaines publications agricoles, environnementales ou culturelles. Je suis favorable à ce que cette disposition, qui vise à encourager l’émergence de nouveaux acteurs retienne, s’agissant de la définition de l’information politique et générale, le périmètre le plus large possible. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L’amendement no 24 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement no 16 .
Il s’agit d’un amendement proposant d’insérer dans la proposition de loi un outil d’information des salariés inspiré de celui figurant dans la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire. Cet outil doit, en cas de difficultés économiques, faciliter la reprise de leur entreprise par les salariés.
Cette loi prévoit un dispositif d’information des salariés sur les possibilités de reprise, mais il est limité aux entreprises de moins de 250 salariés. L’idée est d’adapter ce dispositif au secteur de la presse. Celui-ci connaît des difficultés économiques nombreuses et croissantes. Or fréquemment, des salariés manifestent la volonté de reprendre les entreprises du secteur dans lesquels ils travaillent, et c’est impossible à cause de cette limite à 250 salariés.
Cette proposition de loi tend à encourager un certain nombre d’initiatives. Je vous propose simplement d’aller un peu plus loin, en élargissant aux entreprises de presse le dispositif d’information des salariés sur les possibilités de reprise de leur entreprise.
Sourires.
Les intentions des auteurs de cet amendement me paraissent correspondre aux objectifs poursuivis par la proposition de loi. Vous avez cependant bien compris que notre ambition demeure, s’agissant de ce titre III, modeste. Elle se borne à tester le nouveau statut, à espérer qu’il rencontre un certain succès et qu’il bénéficie de financements. Je ne crois pas que ce nouveau statut soit utile à Nice-matin, qui aujourd’hui n’en a d’ailleurs peut-être plus besoin.
Nous élaborons une troisième voie. De quoi s’agit-il ? La première voie a été suivie par la presse traditionnelle qui a pris l’habitude de s’en sortir grâce à des aides souvent difficiles à justifier et qui ont représenté jusqu’à 10 % de son chiffre d’affaires. Nous lui disons aujourd’hui qu’il faire plus attention et que nous l’aiderons à évoluer de manière différente.
La deuxième voie est celle suivie par la presse tenue par de grands capitalistes qui à l’heure actuelle bénéficient, sans en avoir forcément besoin, de toutes les aides à la presse.
La troisième voie est participative et s’efforce d’ouvrir des horizons pour des entreprises petites ou moyennes. Leurs besoins de financement pourraient être couverts par 7 à 8 investisseurs apportant chacun entre 30 000 et 50 000 euros chacun. Elles pourraient ainsi développer de nouveaux types de presse qui peuvent trouver leur place dans la presse française.
Vous savez que le seul segment au sein duquel se créent des journaux est celui de la presse hebdomadaire régionale. Certains de ces journaux, de création récente, s’en sortent.
Pour le secteur du numérique – vous avez dû rencontrer les mêmes interlocuteurs que moi – cet enjeu est extrêmement important. Mais si nous décidons que la proposition de loi dont nous débattons a le caractère d’un texte un peu plus fourre-tout, dans lequel on va pouvoir insérer de multiples dispositions, je pense que nous ne pourrons pas remplir les conditions que nous avions définies.
Ma démarche s’inspire d’une idée simple : commençons modestement. Si le dispositif fonctionne, alors nous pourrons, dans six mois ou un an, lorsque la ministre aura avancé – et je sais qu’elle avance – sur son projet d’évolution des aides à la presse, aller plus loin dans un certain nombre de domaines.
Modestement, et de façon non révolutionnaire, je demande donc de ne pas tout mettre dans cette proposition de loi et de s’arrêter à ce que nous avions défini au départ. Pour l’ensemble de ces raisons, je donne un avis défavorable à cet amendement.
Il est également défavorable. Certes, les entreprises de presse ne sont pas des entreprises comme les autres. Elles figurent sans doute parmi celles que leurs salariés pourraient légitimement vouloir reprendre afin d’éviter de voir disparaître un titre de presse ainsi que le lien social qui se tisse entre les lecteurs d’un journal et ceux qui le font vivre.
La loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire a effectivement créé une obligation pour les entreprises en difficulté de moins de 250 salariés d’informer leurs salariés sur les possibilités de reprise qui s’offrent à eux ainsi que sur les aides auxquelles ils peuvent prétendre pour le faire.
Je constate que de nombreuses entreprises de presse sont d’ores et déjà, du fait de leur taille, dans le champ de cette obligation. Elles doivent informer leurs salariés au cas où elles se trouvent engagées dans une procédure prévue au livre II du code de commerce.
Dans le cas récent des difficultés traversées par le quotidien Nice-matin, qui a été évoqué, l’absence de mécanismes d’information n’a pas fait obstacle à la démarche des salariés visant à présenter une offre de reprise. Cet exemple montre bien qu’à l’heure actuelle déjà des dispositions existantes permettent d’obtenir ce résultat.
Je pense que dans la situation actuelle, compte tenu des difficultés du secteur, il serait un peu dangereux d’imposer aux entreprises de presse, dont les difficultés sont aujourd’hui particulièrement importantes, une contrainte supplémentaire.
L’amendement no 16 n’est pas adopté.
L’article 14 est adopté.
Nous en venons à une série d’amendements portant articles additionnels après l’article 14. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement no 7 .
Le présent amendement vise à aider les petites entreprises de presse et à préserver le pluralisme en clarifiant la situation des dons réalisés par le biais de fonds de dotation au bénéfice des entreprises de presse qui s’engagent à ne verser aucun dividende à leurs actionnaires pendant une période de trois ans.
On voudrait pouvoir sauver les journaux qui se trouvent en difficulté. Mais ce n’est pas en prévoyant des recettes dans cette proposition de loi que nous y parviendrons. Par ailleurs, cet amendement remet en cause le statut du mécénat. Je veux bien réfléchir à la question, mais je suis sûr que cet amendement ne constitue pas le bon moyen pour régler ce problème.
Avis défavorable, donc.
L’avis du Gouvernement est également défavorable car cette proposition vient augmenter une dépense fiscale. Seules les lois de finances ont vocation à porter des dispositions fiscales.
Plus généralement, le dispositif d’exonération des dons des particuliers qui veulent soutenir un titre de presse existe déjà dans le cadre des rescrits ministériels pour la presse papier et numérique.
Je partage l’avis du rapporteur sur la possibilité d’engager une réflexion plus générale sur le régime du mécénat, mais probablement pas dans le cadre de la présente proposition de loi.
L’amendement no 7 n’est pas adopté.
Comme je l’ai indiqué en commission, il s’agit d’un amendement d’appel. Nous nous étions inquiétés de la disparition du projet de loi sur la protection des sources, alors que nous y avions travaillé en commission des affaires culturelles et en commission des lois. La déclaration de Mme la ministre nous a rassurés puisqu’elle a annoncé que les travaux allaient reprendre. Elle souhaite cerner davantage son contenu, mais cela fera l’objet du débat. Pour l’instant, je me félicite de cette nouvelle et je retire mon amendement.
L’amendement no 5 est retiré.
La parole est à M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, pour soutenir l’amendement no 22 .
Comme je suis socialiste, je suis partageux, comme l’on disait au XIXe siècle. Je laisse donc le soin à Michel Pouzol de présenter cet amendement. Je me permettrai peut-être, monsieur le président, de vous demander la parole ensuite.
Notre amendement s’inscrit dans la suite de celui de notre collègue Marie-George Buffet dans la mesure où il reprend le texte sur la protection des sources tel qu’il avait été voté dans le cadre de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. L’adoption de ce texte constituera une avancée considérable ; il s’agit de se rapprocher le plus possible de ce qui est la référence pour nos collègues européens, à savoir la loi belge relative à la protection des sources.
Vous l’aurez compris, madame la ministre, nous avons été rassurés par votre déclaration liminaire et cela vaut pour l’ensemble de la presse qui est très attentive à ce que nous allons faire dans ce domaine. Je vais donc également retirer notre amendement dans la perspective des discussions qui s’ouvriront prochainement et qui s’annoncent aussi fructueuses, je n’en doute pas, que celles qui ont déjà eu lieu au sein de notre commission ainsi qu’en commission des lois.
L’amendement no 22 est retiré.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 30 rectifié .
Le présent amendement vise à mettre en conformité la procédure d’habilitation des journaux d’annonces légales avec la directive « Services » de 2006. Cette directive interdit la participation des concurrents à une procédure d’autorisation pour l’accès à une activité de services pour des raisons de conflits d’intérêts. C’est un peu cryptique, mais aujourd’hui, les éditeurs de journaux sont membres des commissions départementales qui proposent au préfet la liste des journaux habilités pour le département à publier des annonces légales.
Sans modifier les conditions d’habilitation elles-mêmes, l’amendement propose de supprimer ces commissions dans cent départements français de métropole et d’outre-mer, ce qui constitue du même coup une mesure importante de simplification.
L’amendement no 30 rectifié est adopté.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement no 4 .
Tout au long de notre débat en commission et encore ce soir, nous avons été plusieurs à insister sur une question cruciale qui n’est pas traitée dans la proposition de loi, celle des aides à la presse et du critère d’attribution de ces aides. M. le rapporteur et d’autres ont donné un certain nombre d’exemples sur des situations très paradoxales : des journaux qui ont beaucoup de moyens bénéficient d’aides alors que d’autres qui sont sans ressources publicitaires et sans moyens en capitaux n’en bénéficient pas.
Mme la ministre annonce un projet de loi qui va porter sur la question des aides à la presse. Si tel est le cas, je retire mon amendement.
C’est le grand débat entre la concentration et le pluralisme. L’idéal serait qu’il n’y ait pas de concentration, mais du pluralisme. Mais nous sommes dans une société où il faudra accepter les concentrations à condition que le pluralisme y trouve son compte. Ce que soutient Mme Buffet, c’est que la seule façon de défendre le pluralisme, c’est par le biais d’une charte ou d’un code de déontologie faisant que les rachats de titres ne mettent pas le pluralisme en danger.
Mais ce débat ne peut avoir lieu aujourd’hui, madame la députée, et je vous prie de bien vouloir m’excuser de tout renvoyer ainsi à plus tard. C’est aussi que le sujet est suffisamment important pour qu’il soit examiné dans un cadre plus général et il faudra alors débattre de votre proposition.
Si demain, il ne reste plus que quatre entreprises de presse régionale et que l’on nous explique que c’est juste pour mettre la comptabilité en commun, alors que cela va plus loin, cela mérite quelques vérifications.
Madame la députée, les aides directes et indirectes sont déjà limitées aux titres reconnus en CPPAP qui répondent aux critères d’intérêt général. Les aides directes de l’État versées par mon ministère sont concentrées sur la presse d’information politique et générale à plus de 99 %.
J’ai engagé une réflexion sur un ciblage des aides à la presse. Les parlementaires y seront étroitement associés dans les mois qui viennent. Cela donnera peut-être lieu à des mesures qui feront l’objet de dispositions législatives, mais à ce stade, ce n’est pas sûr. Je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement, dans la perspective des travaux que nous engageons dès à présent. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
L’amendement no 4 est retiré.
Je tiens à adresser mes remerciements à M. le président et à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles. À la commission des lois, nous avons en effet beaucoup apprécié que vous ayez accepté d’intégrer dans le texte un amendement qui est désormais l’article 15 lequel permettra aux journalistes qui le leur demanderont d’accompagner un parlementaire lors d’une visite d’un lieu de privation des libertés.
Mme Duby-Muller a rappelé que cela correspondait à une demande de l’association Prisons du coeur, présidée par M. Botton, présent ce soir dans les tribunes. Preuve en est de l’intérêt que cette association porte à notre travail.
Notre initiative a sans doute contribué à réactiver la loi sur le secret des sources, ce dont je me réjouis. Comme vous tous, je suis très heureux que notre ministre ait indiqué que le texte allait venir prochainement en discussion. Mme Chapdelaine, rapporteure du texte en commission des lois, en sera très satisfaite.
Je vous remercie, mes chers collègues, de m’avoir permis de participer avec vous à ce débat au cours duquel j’ai appris beaucoup de choses. Merci, chers collègues de la commission des affaires culturelles, d’avoir permis à la commission des lois de s’immiscer quelque peu dans votre travail.
Monsieur le président, permettez-moi tout d’abord de vous saluer très chaleureusement et de saluer aussi la très grande qualité avec laquelle vous avez présidé nos séances depuis deux ans et demi.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
En 2000, la gauche a mis en place un droit de visite pour les parlementaires dans les lieux de privation de liberté – prisons, locaux de garde à vue, centres de rétention administrative et hôpitaux psychiatriques. Depuis cette date, je m’emploie, comme nombre de mes collègues, à visiter les prisons de ma circonscription – elles sont deux, une maison d’arrêt et un centre de rétention. Ce droit de visite a vraiment fait évoluer la perception qu’a la classe politique de la prison, et c’est bien ainsi.
Par ailleurs, la création du poste de contrôleur général des lieux de privation de liberté, qui publie l’ensemble des avis qu’il émet à la suite de ses visites, participe également une meilleure information, indépendante et objective, de la société sur l’ensemble des lieux d’enfermement.
Mais cela ne suffit pas. La prison, institution républicaine, doit être ouverte aux journalistes. C’est précisément l’objet de cet article que de faire en sorte que, sous certaines conditions qui seront précisées par décret, les journalistes puissent accompagner les parlementaires dans les lieux de détention. Ce sera utile, car la prison demeure encore un lieu mal connu de nos concitoyens, qui fait l’objet de nombreux préjugés souvent éloignés de la réalité – qui vont de la croyance en la totale insalubrité de tout le parc pénitentiaire à la grande illusion d’une prison « quatre étoiles ». Une information objective, fondée sur des faits, contribuera, je l’espère, à la formation d’un regard libre et éclairé sur l’état de nos prisons. Nous aurons alors fait oeuvre utile.
Au cours de nos travaux en commission, je me suis prononcé très favorablement sur l’amendement qu’a proposé alors M. Mennucci. Cependant, nous sommes déjà quelque peu sortis du cadre du texte et il ne faudrait pas aller au-delà. Il faut en effet savoir raison garder.
Je suis, je le répète, très favorable à cette disposition, comme j’ai eu l’occasion de le dire sous forme de témoignage lors des travaux de la commission, et j’ai moi-même appliqué cette disposition, que j’ai peut-être anticipée, mais il convient cependant de prendre garde. Madame Pompili, avec toute l’amitié que j’ai pour vous, permettez-moi de vous dire après avoir lu vos amendements, qu’il ne faut pas confondre le monde de la prison avec celui de la téléréalité. Il faut faire très attention, car il s’agit d’un monde sensible, d’un monde clos. La présence même d’un parlementaire donne une autorité à sa visite, ce qui est très suffisant, alors que le fait de lâcher des journalistes dans le monde pénitentiaire, s’il peut être intéressant pour faire un scoop, peut également avoir des effets négatifs.
Nous devrions donc, dans le cadre de cette loi, nous en tenir à l’article 15 en l’état et ne pas en rajouter. Si, par la suite, sur la base de l’expérience acquise par les parlementaires accompagnés de journalistes, nous envisagions une solution plus avancée, nous pourrions faire le point. Mais ce soir, il semble suffisant de nous arrêter là.
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Je m’exprimerai dans le même esprit que M. Kert. En votant l’article 14, nous avons terminé l’examen de la proposition de loi du groupe socialiste, excellemment rapportée par son initiateur, M. Michel Françaix. Dans un premier temps, il s’est agi de retirer deux amendements relatifs à la protection du secret des sources des journalistes, car ce qui est devenu en commission l’article 15 était, comme l’a rappelé M. Mennucci, une disposition de ce projet de loi sur la protection du secret des sources des journalistes. Au moment d’achever l’examen de cette proposition de loi, suivons le conseil de M. Kert et ne chargeons pas trop la barque.
Nous avons exprimé le plus clairement possible, et Mme la ministre la première, notre intention de faire progresser la protection du secret des sources des journalistes et nous nous sommes donné rendez-vous. Néanmoins, si le calendrier est important, le contenu l’est tout autant, sinon plus, et il convient donc qu’in fine le texte que nous adopterons – durant cette législature, je l’espère comme bon nombre d’entre nous, comme M. Michel Pouzol – renforce la protection des sources des journalistes et soit une avancée par rapport à la loi de 2010 pour se rapprocher de la législation belge. Je m’arrêterai là sur ce point, car ces deux amendements ont été retirés.
Nous avons répondu en commission à la demande de M. Patrick Mennucci et de Mme Laurence Dumont de ne pas attendre et de légiférer afin de permettre aux journalistes d’accompagner les parlementaires visitant des lieux de détention, comme nous en avons le droit depuis plusieurs années déjà.
Nous avons adopté cet article 15 avec l’idée d’en limiter l’objet. Le droit de visite de journalistes accompagnant des parlementaires dans les lieux de détention, en complétant peut-être, avec l’amendement de M. Pouzol, la liste des lieux de détention ou de privation de liberté – car il semble qu’un oubli se soit produit malgré l’aval donné à l’époque par la commission des lois. Il convenait de préciser ce dont nous débattons ce soir et sans doute notre rapporteur rendra-t-il un avis dans le sens que je viens d’indiquer sur les amendements avec lesquels nous terminerons cette discussion.
Monsieur le président, si vous le permettez, je défendrai également mon amendement no 18 .
Je me félicite que nous ayons pu inscrire dans le texte cette disposition relative au droit donné aux journalistes d’accompagner les parlementaires en prison. Il s’agit en effet d’un droit fondamental pour notre démocratie. Nous avons voté cet amendement en commission et continuons évidemment à le soutenir.
Comme M. Michel Pouzol, nous avons déposé des amendements reprenant des dispositions adoptées par la commission des lois de notre assemblée dans la loi relative au secret des sources.
La première partie de l’amendement vise à ajouter à la liste des établissements que peuvent visiter les parlementaires les centres éducatifs fermés. Dès lors qu’ils peuvent visiter des établissements pénitentiaires pour mineurs, il semble en effet cohérent d’élargir cette mesure à ces centres, qui sont aussi des lieux fermés de privation de liberté. Rien ne justifie que ces centres soient parmi les seuls lieux de privation de liberté ne pouvant recevoir la visite de parlementaires.
La deuxième partie de l’amendement tend à préciser que les journalistes ont le droit de filmer, d’enregistrer et de photographier au cours de ces visites. Compte tenu du régime d’autorisation contraignant qui s’applique à l’entrée de matériel en détention, cet ajout est important et bienvenu. Le rôle des journalistes n’est pas, en effet, de visiter un lieu de privation de liberté, mais de rapporter ce qu’ils ont pu y voir. La commission des lois avait du reste soutenu l’an dernier un tel ajout.
Enfin, monsieur Kert, les journalistes ne font pas de la téléréalité. Il est réducteur pour leur travail d’employer ce terme dès qu’on voit une caméra. Il existe en effet un code de déontologie et le fait que certains journalistes ne le respectent pas ne justifie pas que l’on doive restreindre un droit.
Quant à l’amendement no 18 , il s’agit d’un amendement de repli qui reprend la seconde partie seulement de l’amendement no 17 .
Cet amendement vise à permettre la visite des centres d’éducation fermée en compagnie de journalistes. Cette disposition figurait dans l’article de la loi sur la prévention des sources voté par la commission des lois et la commission des affaires culturelles. Il s’agit là d’un sujet important.
Ayant eu l’occasion de visiter avec une équipe de télévision, à côté de chez moi, la plus grande prison d’Europe – celle de Fleury-Mérogis –, j’ai constaté que les relations en sont en effet quelque peu modifiées – mais il s’agissait d’une visite organisée à l’initiative de la Chancellerie. La mesure proposée ouvre un droit important et il importe de mettre l’article que nous examinons en concordance avec ce que nous avons voté dans le cadre du projet de loi sur la protection des sources.
Je suis en revanche beaucoup plus réticent pour ce qui concerne la deuxième partie de l’amendement no 17 , car la protection de la vie privée des mineurs de 13 à 18 ans à l’occasion de films, de photographies ou de témoignages doit être très étroitement encadrée. Cette question me semble relever davantage du décret d’application, qui devrait apporter les précisions nécessaires compte tenu de la présence de mineurs dans ce lieu qui, même s’il est un lieu de la République, n’est pas neutre.
L’amendement no 18 a déjà été défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?
Le rapporteur est de plus en plus embarrassé. En effet, en commission, nous avons tous convenu que la proposition de M. Mennucci était un « plus » et qu’il fallait l’adopter immédiatement. Cet ajout unanime était capital. Par ailleurs, si nous convenions que tout ce qui entoure cette disposition devait assurément donner lieu à un débat, il ne fallait pas nécessairement en attendre un vote, mais plutôt reporter la question à une discussion générale – je rappelle en effet que la commission a repoussé tous les amendements portant article additionnel, à l’exception de celui de M. Mennucci.
Je reste donc sur cette position, non que je sois opposé au fond de ces amendements, mais parce qu’ils n’ont pas fait l’objet en commission d’une réflexion aussi poussée qu’il l’aurait fallu. Si les députés qui siègent à la commission des lois connaissent très bien ce domaine, le rapporteur le connaît, quant à lui, beaucoup moins bien. J’entends que la visite des centres éducatifs fermés pourrait soulever des difficultés et je voudrais en savoir un peu plus sur les questions qui se posent lorsque des mineurs sont concernés car, à la différence sans doute de certains d’entre vous, je n’ai pas les réponses à ces questions.
J’en reste donc à l’idée que nous avons élaboré une loi en trois parties, à laquelle a été ajouté un point important. Pour le reste, je m’en tiens à la position de la commission, qui a rejeté l’ensemble des amendements – sans pour autant porter de jugement de valeur sur la qualité de ces amendements, ni exclure qu’ils puissent un jour être repris dans un grand texte. Je ne me sens pas en mesure d’émettre un avis favorable, car ce débat n’a pas eu lieu, nous n’avons pas mené la réflexion nécessaire et n’avons pas reçu les personnalités qui auraient pu nous éclairer à ce propos dans la perspective du texte que nous examinons. Avis défavorable, donc, à ces trois amendements – sur la forme, mais pas sur le fond, je le répète.
Je comprends tout à fait la volonté du Parlement d’élargir le droit de visite des parlementaires et je répète que je me réjouis vraiment que nous ayons pu adopter en commission cet article 15, qui représente un progrès pour le droit à l’information et pour la démocratie.
Si je comprends cette volonté d’élargir le droit de visite des parlementaires et, conjointement, le droit des journalistes de les accompagner dans les centres éducatifs fermés, il me semble que l’autorisation de filmer, d’enregistrer et de photographier des mineurs et des personnels se trouvant dans ces centres ne peut être donnée sans aucun cadre en matière de sécurité et de protection, notamment pour ce qui est du droit à l’image des personnes concernées, en particulier des mineurs.
Ces dispositions, à condition d’être précisées, trouveraient mieux leur place dans un texte relatif à l’administration pénitentiaire. Je suis donc, à ce stade, défavorable à l’adoption de ces amendements.
Je ne vois pas de problème à voter l’amendement de M. Pouzol. Les centres éducatifs fermés font en effet partie des lieux de privation de liberté. Cependant, il est mis en discussion commune avec un amendement qui introduit la possibilité de filmer et de photographier, ce qui pose problème dans les prisons pour majeurs, et plus encore dans les prisons pour mineurs. Je ne voudrais pas qu’on traite sur le même plan ces deux amendements : ils ne sont absolument pas de même nature.
Il faut savoir que cette proposition de loi fait suite à un débat ouvert depuis très longtemps. Je vous indique, mes chers collègues, car cela n’a pas été rappelé tout à l’heure, qu’une pétition a été signée au mois d’octobre 2012 par 292 députés : c’est le signe que nombre de nos collègues, de tous les bords politiques, étaient favorables à ce type de mesure.
En revanche, concernant l’amendement de Mme Pompili, dès lors que Mme la ministre nous a assuré qu’il y aurait un débat sur le secret des sources, rien ne nous empêche de voter aujourd’hui l’amendement de M. Pouzol, puis d’examiner à nouveau un amendement allant dans le sens de Mme Pompili lors du prochain débat.
De toute façon, cela demande de discuter avec les personnels pénitentiaires : il appartiendra donc au garde des sceaux de prendre le décret adéquat, car nous ne sommes pas ici, ce soir, en capacité de le faire. Ce travail complexe devra faire l’objet de discussions avec la hiérarchie de la pénitentiaire ainsi qu’avec les syndicats, qui sont extrêmement puissants dans cette administration et qui disent en général ce qu’ils ont à dire.
Je pense donc que nous pouvons accepter l’amendement de notre collègue Pouzol ; en revanche, je voterai contre les deux autres amendements.
D’un mot, monsieur le président, je partage tout à fait le point de vue de M. Mennucci. Selon moi, l’amendement de M. Pouzol mérite absolument d’être adopté.
Concernant le droit de filmer et de photographier, on peut bien évidemment partir du principe que les journalistes, pour faire témoignage, ont besoin de filmer et de photographier. Mais on sait très bien qu’en détention, le droit à l’image est tout particulièrement encadré – cela ne vaut pas que pour les mineurs : c’est vrai aussi pour les majeurs. Il n’est donc pas question de faire sortir des images sans consentement ; en outre, cela pose un problème à l’égard des victimes.
Il faudra donc prendre le temps d’encadrer cette mesure dans le texte à venir. Même si, sur le principe, j’y suis favorable, je pense que ce n’est pas mûr à ce stade.
Je suis donc tout à fait d’accord pour qu’on adopte l’amendement de M. Pouzol et que l’on poursuive le débat sur les moyens dont disposeront les journalistes pour témoigner de leur visite en détention dans le texte sur le secret des sources.
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Après avoir écouté les arguments des uns et des autres, notamment le vôtre, madame la ministre, j’ai une proposition à vous faire, qui peut-être vous satisfera. Il s’agirait, avec la permission du président de séance, d’amender l’article 15, en ajoutant qu’il s’agirait d’un décret « en Conseil d’État ».
Le délai de dépôt des amendements n’ayant pas été rouvert, vous ne pouvez pas amender.
Oui, je suis bien d’accord avec vous : j’étais parti sur l’idée de sous-amender l’amendement de M. Mennucci, mais bien sûr, ce n’est plus un amendement mais un article du texte de la commission !
Peut-être pourriez-vous, madame la ministre, prendre cette initiative – en effet, le Gouvernement ne peut, contrairement à nous, se voir opposer de délai – en indiquant qu’il s’agit d’un décret en Conseil d’État ? Cela permettrait de répondre à votre souhait, et nous pourrions alors collectivement voter l’amendement de Michel Pouzol. Voilà la proposition que je vous fais.
On va inclure les centres éducatifs fermés, ce qui est déjà un progrès, et je m’en réjouis.
Sur la question du droit de filmer, il ne faut pas tout mélanger – je suis contente que Laurence Dumont ait commencé à le dire. Le droit à l’image est un droit absolu, qui existe également à l’intérieur des prisons : on ne peut pas faire n’importe quoi quand on filme des détenus, qu’ils soient mineurs ou majeurs. Ils ont le droit de disposer de leur image – j’en reparlerai dans l’amendement suivant –, ils ont le droit d’accepter ou de refuser de dévoiler leur image.
Je voulais juste indiquer qu’il existe de grandes disparités entre les prisons sur ce qui est autorisé ou pas. Aujourd’hui, les journalistes, selon qu’ils se trouvent face à un établissement ou à un autre, n’ont pas les mêmes droits. Je voulais tout simplement, par cet amendement, affirmer le principe que leur droit à filmer et à photographier est « inaliénable ».
Ce droit doit évidemment être encadré en concertation avec les représentants des établissements pénitentiaires et des professionnels qui y travaillent : pour moi, cela relève de l’évidence, et ce travail doit être mené à bien dans le cadre de la préparation du décret. Le présent amendement a simplement pour objet de rappeler un droit dont doivent disposer les journalistes – ni plus, ni moins ! Il faut savoir garder la mesure sur ce sujet, lequel ne devait pas selon moi susciter de débat particulier : je ne vois pas en quoi cela pose un problème !
Comme l’a suggéré le président Bloche, je propose d’amender le deuxième alinéa de l’article 15, permettant d’accéder au souhait de nombre d’entre vous d’adopter l’amendement de Michel Pouzol.
Je propose donc d’ajouter à la fin du deuxième paragraphe de l’article 15 les mots « en Conseil d’État ». Cela ajoute une sécurité dans l’adoption des modalités concrètes de visite dans les centres éducatifs fermés et permet ainsi de définir, dans le cadre d’un décret en Conseil d’État, les conditions permettant d’assurer la protection des mineurs.
La séance, suspendue le jeudi 18 novembre 2014 à zéro heure cinquante, est reprise à zéro heure cinquante-cinq.
La séance est reprise. Nous allons passer au vote sur les amendements qui ont été présentés.
L’amendement no 17 n’est pas adopté.
L’amendement no 18 n’est pas adopté.
L’amendement que Mme la ministre a présenté avant la suspension et qui tend à compléter l’alinéa 2 par les mots : « en Conseil d’État » est l’amendement no 32 .
L’amendement no 32 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 15, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement no 20 .
Nous allons poursuivre le débat sur le droit à l’image des personnes incarcérées. Cet amendement a une origine : les menaces pesant sur un documentaire, Le déménagement. Tourné en 2010 à l’occasion du transfert de l’ancienne maison d’arrêt de Rennes dans des locaux flambant neufs, il a fait l’objet durant deux ans d’un bras de fer entre l’administration pénitentiaire et la réalisatrice, Catherine Rechard. L’ensemble des détenus avaient donné leur accord pour apparaître à visage découvert, mais l’administration pénitentiaire avait imposé un floutage, ce qui modifiait considérablement ce reportage. Il a fallu aller jusqu’au tribunal administratif pour garantir le droit à l’image que conserve toute personne, même détenue.
Actuellement, l’administration pénitentiaire peut s’opposer à la diffusion ou à l’utilisation de l’image ou de la voix d’une personne condamnée, dès lors que sa diffusion permet son identification et que cette restriction s’avère nécessaire à la sauvegarde de l’ordre public, à la prévention des infractions, à la protection des droits des victimes ou à la réinsertion de la personne concernée.
Les premières de ces conditions nous apparaissent légitimes, mais la dernière, qui porte sur la réinsertion, nous semble contraire au droit à l’image que conservent les détenus. On ne peut limiter le droit d’une personne au motif, trop vague, que cela lui serait peut-être nuisible.
De la même façon, pour les prévenus non encore condamnés, le juge d’instruction garde tous pouvoirs. Il nous semble important d’encadrer cette restriction au droit à l’image par les mêmes motifs que ceux prévus pour les détenus condamnés, complétés par deux motifs supplémentaires : la préservation des preuves et le fait d’empêcher une concertation frauduleuse.
L’amendement no 20 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement no 19 .
Si les journalistes doivent pouvoir accompagner librement des parlementaires, il importe également de mieux encadrer et de faciliter leur entrée dans les établissements pénitentiaires sans la présence d’un parlementaire. Je note que cette idée de prévoir dans la loi les visites de journalistes est envisagée pour les centres de rétention dans le projet de loi relatif aux droits des étrangers en France, que nous étudierons l’an prochain.
Actuellement, les règles encadrant l’autorisation ne sont pas clairement définies. Au niveau législatif, seul existe l’article 41 de la loi pénitentiaire, qui permet à l’administration ou au juge d’instruction de s’opposer à la diffusion d’images concernant un prévenu, ainsi que nous venons de l’évoquer.
Il importe pour nous de faciliter l’entrée des journalistes pour évoquer les conditions de détention. C’est pourquoi cet amendement propose de clarifier le régime applicable et de sortir d’un certain arbitraire qui a pu parfois exister.
Avis également défavorable : s’il est tout à fait légitime et important que les conditions d’accès des journalistes aux établissements pénitentiaires soient définies, afin notamment de permettre aux services pénitentiaires de s’assurer de la qualité de journaliste professionnel des personnes qui se présentent comme tel, ces conditions précises ne peuvent être prévues dans la loi ; un décret doit donc les préciser.
Je pense que ces dispositions auraient davantage leur place dans une loi sur l’administration pénitentiaire, afin de bénéficier de toute l’expertise du ministère de la justice sur ces questions.
Par conséquent, l’avis est défavorable.
L’amendement no 19 n’est pas adopté.
La proposition de loi est adoptée.
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
Je vous remercie de me donner la parole alors qu’il est une heure du matin, que nous sommes déjà le 18 décembre et que c’est la 104° séance de cette session.
Nous venons de voter la proposition de loi et je tiens à féliciter Michel Françaix qui, tout au long de ce débat, a montré qu’il était sans doute le meilleur spécialiste des questions liées à la presse au sein de notre Assemblée.
Mais mon propos de conclusion, inévitablement bref, s’adresse à vous, monsieur le président de séance.
Si mes informations sont bonnes, vous venez en effet de présider une séance pour la dernière fois – à tout le moins, durant cette législature – puisque vous occupez la belle fonction de vice-président de l’Assemblée nationale depuis l’été 2012 et que votre « mandat », si j’ose dire, se termine au bénéfice d’un autre collègue, que nous connaissons bien.
Je voulais vraiment me faire le porte-parole – comme cela m’arrive souvent en tant que président de commission – des députés présents pour vous exprimer notre vive reconnaissance et notre très grande gratitude.
Nous sommes nombreux, ici, à avoir eu la chance – car cela en est une – de participer à des séances que vous avez présidées.
Je pense que tous mes collègues adhéreront à ces propos, qu’ils soient dans l’opposition ou dans la majorité.
Pierre Bellemare, voilà plus d’un demi-siècle, a popularisé une formule radiophonique : « Vous êtes formidable ! ».
Les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent. - Applaudissements sur tous les bancs.
Eh bien voilà l’adjectif qui qualifie le mieux la manière dont vous avez présidé notre Assemblée durant ô combien d’heures, de journées et de nuits : vous avez été un président formidable !
Fort heureusement, Stromae aussi a fait aujourd’hui de cet adjectif quelque chose de… formidable !
Sourires
Sourires
Merci beaucoup, monsieur le président Bloche, et merci à l’ensemble des collègues ainsi qu’aux membres du Gouvernement.
Applaudissements sur tous les bancs
Prochaine séance, demain, à neuf heures trente :
Proposition de loi autorisant l’accord local de représentation des communes membres d’une communauté de communes ou d’agglomération ;
Lecture définitive du projet de loi de finances pour 2015 ;
Lecture définitive du projet de loi de finances rectificative pour 2014 ;
Lecture définitive du projet de loi de programmation des finances publiques 2014-2019.
La séance est levée.
La séance est levée, le jeudi 18 décembre 2014, à une heure cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly