Intervention de Virginie Duby-Muller

Séance en hémicycle du 17 décembre 2014 à 21h30
Modernisation du secteur de la presse — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVirginie Duby-Muller :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur, chers collègues, la proposition de loi portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse, ou proposition de loi Françaix, que nous examinons aujourd’hui en première lecture, a été déposée par les députés du groupe socialiste le 17 septembre dernier. Elle contient des dispositions qui avaient été proposées par Michel Françaix dans son rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2013.

Le Gouvernement avait par ailleurs confié une mission d’expertise conjointe sur l’avenir du schéma de diffusion de la presse écrite à l’inspection générale des finances, à l’inspection générale des affaires culturelles et au Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies. Ce rapport, remis l’été dernier aux ministères concernés, n’a pas été rendu public, mais d’après certaines fuites, il dresserait un constat alarmant : entre janvier et octobre 2014, la baisse de la diffusion de la presse quotidienne national atteindrait 9,6 % et celle de la presse quotidienne régionale 6 % ; le rapport serait en outre très critique envers plusieurs acteurs du secteur.

La présente proposition de loi était donc nécessaire, mais, au regard des enjeux, elle ne paraît guère révolutionnaire, comme l’a fait remarquer mon collègue Christian Kert en commission. Elle bénéficie toutefois de l’onction du Gouvernement, qui a engagé le 12 décembre la procédure accélérée.

Trois grands sujets y sont abordés.

Certaines de ces dispositions sont relatives à la distribution de la presse. L’Autorité de régulation de la distribution de la presse est appelée à jouer un rôle pivot dans ce secteur : elle devient une autorité administrative indépendante et voit ses pouvoirs de régulation renforcés.

D’autre part, les compétences du Conseil supérieur des messageries de presse sont étendues : chargé d’homologuer les barèmes des messageries, il lui reviendra de facto d’assurer le respect des principes d’égalité et de solidarité entre les éditeurs, notamment dans la distribution de la presse quotidienne, structurellement déficitaire. Il pourra également définir les bonnes pratiques en matière d’exercice de la profession d’agent de vente, notamment des vendeur-colporteurs. Enfin, il pourra autoriser les éditeurs de presse à traiter la question du « dernier kilomètre », en dehors du système coopératif des messageries.

Des amendements que j’avais cosignés avec mon collègue Christian Kert, porte-parole du groupe de l’UMP sur ce texte, ont été adoptés en commission afin de raccourcir les délais de décision concernant les barèmes.

Le deuxième sujet est celui de la gouvernance de notre « champion national », l’AFP. Le texte reprend les préconisations du rapport sur l’avenir de l’Agence France-presse que Michel Françaix, député de l’Oise, avait remis au Premier ministre au printemps 2014.

Lors de l’examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2015, vous aviez, madame la ministre, annoncé votre soutien à cette proposition, que vous jugiez « extrêmement importante » pour l’AFP ; vous aviez estimé qu’il était impératif d’en respecter le calendrier, conformément aux engagements pris par la France auprès de la Commission européenne.

La proposition de loi propose notamment de porter de trois à cinq ans le mandat du président-directeur général de l’AFP et d’en ouvrir le conseil d’administration à des personnalités qualifiées, sans lien avec les clients de l’agence.

Elle tend aussi à mettre en conformité le statut de l’AFP avec le droit européen de la concurrence, à la suite de la clôture de la plainte pour aide d’État déposée par un concurrent de l’AFP auprès de la Commission européenne. Il s’agit, plus précisément, de préciser que « la responsabilité de l’État ne peut se substituer à celle de l’AFP envers ses créanciers » et que « les activités de l’AFP ne relevant pas de ses missions d’intérêt général doivent faire l’objet d’une comptabilité séparée ». Dont acte.

Nous soutenons l’ensemble de ces mesures visant à défendre et conforter ce « géant de l’information », selon les mots de Christian Kert.

En revanche, nous sommes plus circonspects s’agissant du troisième volet de la proposition de loi, qui crée un nouveau statut d’éditeurs de presse. Notre orateur vous a d’ailleurs fait part de ses interrogations en commission. Nous avons bien compris que ce nouveau statut était en réalité destiné au secteur numérique et visait à encourager l’émergence de pure players, tout en étant ouvert à de petites entreprises de presse écrite, comme les hebdomadaires régionaux. Toutefois, le nom initialement choisi d’« entreprise citoyenne » nous semble maladroit, inapproprié, résultant uniquement d’une volonté d’affichage. En commission, nous en étions restés à la dénomination d’« entreprise solidaire de presse » ; nous préférerions, pour notre part, l’adjectif « participative ». La discussion nous permettra peut-être de revenir sur ce point.

De même, un travail plus approfondi avait été demandé par le président Bloche, deux codes – le code des postes et des communications électroniques et le code général des impôts – étant en concurrence pour la définition de la notion d’information politique et générale. Où en êtes-vous, monsieur le rapporteur ?

On s’attendait à ce que cette proposition de loi serve de véhicule à des cavaliers législatifs. Mais comment s’opposer à l’amendement tendant à permettre aux parlementaires visitant des prisons d’être accompagnés par des journalistes, disposition qui avait été enterrée avec le projet de loi relatif à la protection du secret des sources des journalistes ?

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