Intervention de André Vallini

Séance en hémicycle du 18 décembre 2014 à 9h30
Représentation des communes membres d'une communauté de communes ou d'agglomération — Présentation

André Vallini, secrétaire d’état chargé de la réforme territoriale :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, mesdames et messieurs les députés, la question que vous avez à examiner ce matin relève de la démocratie locale, puisqu’elle concerne la composition des conseils communautaires des communautés de communes et des communautés d’agglomération, et plus précisément la marge accordée aux conseils municipaux pour, dans des conditions raisonnables, moduler le nombre de sièges du conseil communautaire ainsi que la répartition de ces sièges entre les communes.

En vertu d’un principe général dégagé par le Conseil constitutionnel, ce nombre et cette répartition doivent être déterminés proportionnellement à la population de chaque commune membre de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, afin de respecter le principe fondamental de l’égalité du suffrage. Le tableau du III de l’article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales fixe le nombre de conseillers communautaires en fonction de la population municipale de l’établissement public de coopération intercommunale – EPCI. Il n’est pas question de remettre en cause ce tableau.

La question porte en fait sur la répartition de ces sièges entre les communes membres de l’EPCI. C’est sur ce point que le Conseil constitutionnel a jugé, le 20 juin dernier, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité présentée par la commune de Salbris, que les dispositions actuelles du code général des collectivités territoriales dérogeaient au principe général de proportionnalité par rapport à la population de chaque commune « dans une mesure qui est manifestement disproportionnée », annulant de ce fait le principe même d’un accord local initialement inscrit dans la loi à la demande générale des élus locaux et nationaux.

La proposition de loi des sénateurs Alain Richard et Jean-Pierre Sueur que vous examinez ce matin vise à rouvrir cette possibilité de modulation. Tout en respectant la décision du Conseil constitutionnel, il convient de permettre aux élus municipaux de nouer des accords locaux de représentation dans leur intercommunalité.

Le Premier ministre a déclaré, lors de la convention nationale de l’Assemblée des communautés de France, le 9 octobre dernier, que le Gouvernement est favorable à cette proposition, à la condition que les dispositions votées par le Parlement soient sécurisées juridiquement de sorte qu’à l’issue d’une éventuelle nouvelle question prioritaire de constitutionnalité, le dispositif ne puisse pas être à nouveau remis en cause. En effet, plusieurs centaines d’intercommunalités sont aujourd’hui potentiellement confrontées à la décision du Conseil constitutionnel, et contraintes de procéder à une nouvelle répartition des sièges, entre leurs communes membres.

Le Conseil constitutionnel n’a pas demandé à l’ensemble des EPCI d’abroger immédiatement les accords locaux et a modulé dans le temps les effets de sa décision. Cependant, chaque EPCI est aujourd’hui confronté à ce risque, ne serait-ce qu’à l’occasion du renouvellement, même partiel, d’un seul conseil municipal d’une de ses communes membres. Cette situation est source d’instabilité et n’est pas tenable, comme plusieurs d’entre vous ainsi que des associations d’élus et de nombreux préfets l’ont signalé au Gouvernement.

La proposition de loi d’Alain Richard et de Jean-Pierre Sueur, adoptée le 22 octobre au Sénat, veut donc remédier rapidement à cette situation. Son examen par votre commission, monsieur le rapporteur, a permis de préciser le dispositif et d’en étendre les effets notamment aux métropoles et aux communautés urbaines, dans une orientation qui convient au Gouvernement.

Sont ainsi encadrées les adaptations à la répartition démographique, et sont garantis deux éléments nécessaires : le maintien d’au moins un siège pour chaque commune, même la plus petite, d’une part, et le plafonnement à 50 % des sièges pour la commune la plus importante d’autre part.

Cette proposition de loi répond également à la question de l’encadrement des dérogations au principe général de proportionnalité par rapport à la population. Le Conseil d’État en a été saisi par le Gouvernement, afin d’indiquer dans quelle mesure et à quelles conditions la possibilité d’un tel accord local pouvait à nouveau être inscrite dans le code général des collectivités territoriales.

D’après le Conseil d’État, un tel accord est possible, dans des conditions toutefois assez précises. La commission des lois de l’Assemblée nationale a adopté un texte qui reprend les conditions prescrites par cet avis du Conseil d’État. Elle a toutefois estimé que, pour favoriser les conclusions d’accords locaux, il fallait aller au-delà. En effet, le Conseil d’État n’est pas le juge constitutionnel et il peut être intéressant, comme l’a souhaité votre rapporteur, d’exploiter pleinement les marges que le Conseil constitutionnel est disposé à laisser aux acteurs locaux.

La volonté du Gouvernement est toutefois de sécuriser pleinement les nouvelles dispositions du code général des collectivités territoriales, induites par cette proposition de loi, et d’éviter, dans l’intérêt des communes et des EPCI, que le Conseil constitutionnel ne soit à nouveau conduit, le cas échéant, à en neutraliser les effets, rééditant les difficultés auxquelles nous avons été confrontés. À cet égard, il apparaîtrait justifié qu’une fois cette proposition de loi définitivement adoptée par le Parlement, le Conseil constitutionnel puisse en être saisi à titre préventif.

En conclusion, en mon nom, au nom de Bernard Cazeneuve, qui vous prie d’excuser son absence, et au nom du Gouvernement, j’aimerais remercier l’ensemble des groupes parlementaires qui, par leur soutien unanime, donneront de la force à ce texte utile à la démocratie locale et attendu par de nombreux élus dans un grand nombre de départements.

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