Intervention de Philippe Mills

Réunion du 27 novembre 2014 à 10h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Philippe Mills, président-directeur général de la Société de financement local, SFIL :

Tout dépend de ce qu'on appelle économie spéculative. Les conditions de plus en plus avantageuses proposées par la BCE servent surtout aux banques italiennes et espagnoles à acheter la dette de leur pays. Cela a donc un effet positif sur la stabilité de la zone euro et, par ricochet, sur les conditions financières qui peuvent être accordées y compris aux hôpitaux publics français, sachant que l'unification monétaire voit sa concrétisation dans la mise en place de l'Union bancaire. En termes d'octroi de crédit, il faut regarder les perspectives d'évolution de la croissance à long terme. Actuellement, malgré une offre de crédit abondante en France pour tous les types d'acteurs, le volume de crédit accordé est inférieur car la demande n'est pas aussi importante.

Selon les analyses extrêmement détaillées de la BCE dont les résultats ont été publiés fin octobre – 6 000 personnes ont été mobilisées pour étudier 120 000 comptes au niveau européen, 96 % des actifs bancaires français et 83 % des actifs bancaires européens –, le résultat global des banques françaises est très bon. Les banques françaises sont donc en bonne santé et la liquidité à disposition est abondante. Les banques privées – y compris les réseaux mutualistes – font plus d'offres aux collectivités et aux hôpitaux en 2014 qu'en 2011 et 2012, mais c'est parce qu'elles en font moins aux ménages pour des crédits immobiliers – du fait de l'évolution du marché immobilier – et encore moins aux petites et moyennes entreprises, car le risque associé à un prêt pour une PME augmente avec la stagnation économique. D'où l'ambivalence de la situation actuelle avec, d'un côté, une BCE qui joue son rôle en matière de politique monétaire, et, de l'autre, des banques qui se montrent davantage prudentes. Pour autant, ce mouvement n'a rien de permanent : une fois la situation économique et financière française et européenne améliorée, les banques se déporteront vers les ménages et les entreprises. Par contre, la contrainte réglementaire est permanente, d'où la création de la SFIL pour répondre à la raréfaction de l'offre de financement aux collectivités et aux établissements de santé.

Enfin, concernant les évolutions récentes des changes, ce n'est pas tant l'évolution dollareuro qui est importante que l'évolution dollaryen. Dans une des catégories des prêts sensibles, un grand nombre d'entre eux sont indexés sur la relation dollaryen. Mais la nouvelle politique économique japonaise mise en place depuis le printemps 2013 joue positivement, ce qui nous aide à renégocier les crédits et nous aidera aussi en 2015. Les équipes de la direction de l'encours de la SFIL signalent aux hôpitaux l'intérêt de saisir ce type d'opportunité.

L'action de la SFIL présente trois caractéristiques.

D'abord, ce nouveau dispositif ne concerne que les financements à long terme, c'est-à-dire des prêts à quinze ans ou plus pour le financement des hôpitaux et des collectivités. L'accord conclu avec la Commission européenne fin 2012 indique quinze ans, ou plus si nous sommes capables de nous refinancer nous-mêmes à long terme, ce qui est le cas. Nous sommes ainsi en mesure d'accorder des prêts entre quinze et vingt-cinq ans, très complémentaires des prêts très longs de la Caisse des dépôts et consignation ou de la Banque européenne d'investissement (BEI). Par contre, ce dispositif public ne concerne pas les prêts de trésorerie – seules les banques les accordent, y compris la Banque postale, notre partenaire commercial, mais pas dans le cadre du dispositif public.

Ensuite, l'offre du dispositif public est simple. En effet, dans une décision du 28 décembre 2012, la Commission européenne a fixé une liste limitative de ce que peut faire ce dispositif : prêt à taux fixe, prêt à taux variable avec une référence, passage de l'un à l'autre éventuellement au cours de la durée de vie du prêt, phase de mobilisation. Si le dispositif devait proposer autre chose, il faudrait renégocier avec la Commission européenne.

Enfin, le dispositif public doit présenter des offres de prêt au prix du marché. En effet, nous dérogeons à la concurrence européenne, mais cette intervention publique, qui n'est pas considérée comme une aide d'État, ne doit pas désinciter encore plus les financements pour les acteurs privés.

Pour l'assister dans l'analyse des aides d'État, la Commission européenne a fait appel au cabinet de conseil Duff & Phelps, dont les rapports montrent que la SFIL et la Banque postale respectent tous ces critères.

Soumise à la réglementation bancaire et au contrôle de la Banque centrale européenne, la SFIL n'est pas cotée en bourse. Elle est une banque à 100 % publique dont l'État est l'actionnaire principal, à hauteur de 75 %, aux côtés de la CDC, à 20 %, et de la Banque postale, à 5 %. L'État est notre actionnaire de référence, conformément à un article du code monétaire et financier, et son soutien précisé par une lettre concerne l'ensemble du bilan de la SFIL et sans limitation de durée. Cela est très important vis-à-vis des investisseurs, a fortiori s'agissant des prêts structurés à risque.

La SFIL n'est pas l'agent commercial du dispositif public, mais elle fait tout le reste. La Banque postale fait les offres de prêts, dont l'analyse est réalisée dès le départ en commun par elle et par nous, car les offres ont vocation à être cédées au bout de quelques mois vers le bilan de la SFIL. Ainsi, toutes les offres de prêt de long terme sont conçues avec la Banque postale, puis nous sont cédées. C'est la première exclusivité.

Deuxième exclusivité : nous ne pouvons prendre que les prêts commercialisés avec la Banque postale, puisque ce sont ceux que nous avons analysés et conçus avec elles.

Troisième exclusivité : nous refinançons les prêts en émettant des « obligations foncières ».

Pourquoi cette séparation entre le commercial et le financier ? Créée en 2006, la Banque postale a vocation en tant que banque publique à développer le financement au secteur local, ce qui a rendu inutile la création d'un deuxième réseau de distribution pour le même type de prêt aux mêmes acteurs. Pour une fois, il n'y a pas eu de doublon ! Le réseau incomparable des bureaux de poste distribue ces prêts – le groupe La Poste a souhaité faire de tous ses postiers des banquiers –, ce qui permet d'atteindre tous les types de collectivités et d'hôpitaux.

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