Intervention de Gilles Carrez

Réunion du 3 octobre 2012 à 11h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi organique relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Carrez :

Ce projet de loi organique reprend, dans sa méthodologie, le travail réalisé en 2011 pour le projet de réforme constitutionnelle.

Cependant, le fait de passer par la loi organique – M. le rapporteur l'a très justement rappelé – empêche d'instaurer une supériorité de la loi de programmation des finances publiques sur les lois de finances et de financement de la sécurité sociale de l'année.

En outre, s'inspirant en cela de la révision de la Loi fondamentale allemande de 2009, le TSCG, élaboré entre-temps et en cours de ratification, a retenu dans son article 3, non pas la notion de solde budgétaire nominal, mais celle de solde structurel. Il s'agit de corriger les dépenses et les recettes en fonction de la conjoncture et de la position dans le cycle économique. Ce calcul est complexe et nécessitera une expertise fournie. Nombre d'experts, voire d'organismes publics, ont d'ailleurs des approches différentes de ces notions. Nous allons, malgré tout, nous efforcer de faire le meilleur travail possible.

J'en viens à nos amendements.

Les premiers, qui portent notamment sur l'article 1er, visent à clarifier la notion – essentielle – de solde structurel. Ce dernier devrait figurer, non pas dans une annexe comme le prévoit l'article 5 du projet de loi organique, mais dans le corps même de la loi de programmation. En outre, un solde étant le résumé de nombreux éléments, il convient de l'articuler avec la notion d'effort structurel, décomposée en recettes et en dépenses. On rejoint d'ailleurs la présentation que vient de faire le Gouvernement, lorsqu'il a précisé que, sur les 30 milliards d'euros d'économies à trouver, 10 porteraient sur les dépenses et 20 seraient des augmentati d'impôts. Nous nous inscrivons à cet égard dans la droite ligne du travail réalisé par la commission Camdessus en 2010.

Notre deuxième série d'amendements recoupe ceux de M. le rapporteur : il est préférable de constater les écarts – notion essentielle figurant à l'article 3 du traité, au même titre que celle de correction automatique – à l'occasion de la loi de règlement, qui est faite pour cela, plutôt que d'attendre le débat d'orientation budgétaire.

Nos amendements portent, troisièmement, sur le Haut Conseil. J'avais proposé initialement d'y adjoindre uniquement un membre désigné par le CESE. À la réflexion, il serait dommage de le priver de l'expertise de Bercy, même s'il doit demeurer indépendant. C'est pourquoi nous proposerons qu'il comprenne également le directeur général de l'INSEE. Nous devrions pouvoir trouver un consensus au sein de cette commission spéciale sur la composition de cette nouvelle institution, sur le renforcement de son rôle et sur ses méthodes de travail. Nous pourrions ainsi avoir gain de cause dans la discussion qui s'annonce compliquée sur ces points avec le Gouvernement.

Il convient, en outre, de préciser le rôle du Haut Conseil s'agissant des lois de finances rectificatives, voire des lois de financement de la sécurité sociale rectificatives. La loi organique n'indique pas s'il a les mêmes attributions que pour les lois de finances et de financement de la sécurité sociale initiales, à savoir non seulement l'analyse des prévisions macroéconomiques, mais également la possibilité d'émettre un avis sur les comptes. Nous souhaitons que le Haut Conseil puisse être saisi de toutes les lois de finances rectificatives qui, nous le savons d'expérience, se multiplient en période de crise.

Je termine par l'amendement le plus important, qui fera l'objet de discussions difficiles avec le Gouvernement si j'en juge par les propos du Premier ministre. Dans la rédaction actuelle de l'article 16, il est prévu que le Gouvernement « tienne compte » des écarts constatés à l'occasion de la plus prochaine loi de finances. Il convient d'aller au-delà, dans la droite ligne de l'article 3 du traité : le Gouvernement doit « engager » un début de correction.

J'ajouterai enfin, à titre personnel, un amendement, fruit d'une longue histoire, qui vise à réserver les mesures fiscales aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Je pense que M. le rapporteur me soutiendra sur ce point. La baisse de la TVA sur la restauration – nous nous en souvenons – avait figuré non pas dans une loi de finances, mais dans une loi sur le tourisme, alors que trois milliards d'euros étaient en jeu. L'instruction du Premier ministre de juin 2010 a le mérite d'exister, mais il faut aller plus loin en ajoutant cette disposition à la loi organique. M. le rapporteur nous dira si cet amendement pose un problème de constitutionnalité.

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