Intervention de Annick Girardin

Séance en hémicycle du 20 janvier 2015 à 15h00
Convention entre la république française et la principauté d'andorre pour éviter les doubles impositions — Présentation

Annick Girardin, secrétaire d’état chargée du développement et de la francophonie :

Comme je l’ai déjà exposé devant vous, il s’agit d’une disposition à caractère totalement ponctuel dans le temps et dans l’espace. Tout d’abord, elle répond aux circonstances d’une négociation passée. À l’époque, en raison de l’absence de fiscalité directe à Andorre, il apparaissait nécessaire de prendre toutes les garanties possibles.

De plus, cette disposition ne concerne que la convention franco-andorrane. Elle ne saurait donc toucher aucun autre pays – notre intention n’est d’ailleurs pas de la reproduire où que ce soit – puisque les conventions négociées ultérieurement et, pour certaines, déjà ratifiées par le Parlement, ne contiennent pas une telle clause.

Enfin, elle est absolument sans effet sur le plan fiscal. Une telle disposition, dans une convention, n’institue en rien une imposition. Je l’ai déjà dit : la seule manière d’instituer un impôt, quel qu’il soit, est de passer par une loi votée ici, par le Parlement, c’est-à-dire par vous-mêmes, comme vous le savez.

En rejetant cette convention, je souligne qu’au lieu de défendre leurs intérêts, on pénaliserait les entreprises et les particuliers qui attendent d’en bénéficier, notamment nos compatriotes vivant à l’étranger.

Le Parlement d’Andorre a ratifié à l’unanimité ce projet de convention voici un an déjà. Cet État attend désormais que nous lui confirmions la ratification de notre côté, ce qui permettra l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions.

Je vous ai déjà présenté ces arguments en première lecture, tout comme je m’étais engagée avec force devant vous, au nom du Gouvernement, à vous assurer que la ratification de cette convention ne pourrait en aucun cas constituer une possible base juridique à la création d’un nouvel impôt fondé sur la nationalité. Je vous le redis aujourd’hui avec autant de force !

Un échec de la ratification du côté français nous conduirait à engager un nouveau processus de négociation et de signature qui repousserait l’entrée en vigueur de la convention dans un délai qui risquerait d’être très long, si l’on en juge par le nombre d’années que nous avons mis à négocier cette convention. Ce serait contraire à l’objectif que nous partageons tous ici, qui consiste à simplifier la vie des particuliers et des entreprises concernés et, naturellement, à renforcer nos relations avec Andorre tout en fermant la porte à la fraude et à l’évasion.

En outre, dans le contexte évolutif que nous connaissons, il n’est pas réaliste de croire que nous pourrions figer l’équilibre du texte. L’Espagne a elle aussi signé avec Andorre une convention fiscale le 8 janvier dernier. Dès lors, si la négociation était rouverte avec la France, les travaux ne sauraient porter que sur un seul point ; chacune des deux parties serait forcément conduite à évoquer d’autres changements, et tous ces nouveaux sujets de débat prendraient du temps.

Sur le fond, sans revenir en détail sur les nombreuses explications qui vous ont déjà été données, je vous rappelle brièvement les raisons pour lesquelles la signature avec Andorre d’une convention fiscale visant à éviter les doubles impositions est désormais possible et nécessaire.

Il est vrai que jusqu’en 2010, année où elle s’est dotée d’un cadre fiscal, la Principauté d’Andorre n’appliquait aucune fiscalité directe, ni sur le revenu des personnes physiques, ni sur les bénéfices commerciaux. C’est à la fin 2010 qu’elle a donc institué une imposition sur les bénéfices des sociétés, les revenus des activités économiques et ceux des non-résidents. Cette législation s’est appliquée à compter du 1er janvier 2012. En outre, un impôt sur les revenus des personnes physiques a été adopté en avril 2014 et s’applique depuis le 1er janvier 2015. Par ailleurs, une loi relative à la taxe sur la valeur ajoutée, dont le taux est fixé à 4,5 %, est entrée en vigueur le 1er janvier 2013.

Parallèlement, Andorre a connu des évolutions décisives en matière de transparence et de coopération fiscale, et vous savez que c’était pour la France une condition sine qua non à satisfaire avant d’envisager la signature d’une convention.

C’est dans ce contexte que la convention fiscale entre la France et Andorre permettra aux deux États, compte tenu de leur proximité, de disposer d’un cadre adapté pour éviter les doubles impositions, afin que ces dernières n’entravent pas les relations économiques et ne pénalisent pas les entreprises et les particuliers qui se trouvent dans des situations transfrontalières.

À cet égard, les stipulations de la convention reprennent de manière générale les principes de l’OCDE, comme on l’a déjà dit, en intégrant les adaptations rendues nécessaires par les particularités des législations de chaque État. Elles permettent de clarifier, par des règles précises agréées par les deux parties, la répartition des droits d’imposer entre les deux États, ainsi que les mécanismes permettant d’éliminer des doubles impositions. D’autre part, les retenues à la source portant sur les redevances, intérêts et dividendes sont limitées à des taux variant entre 5 % et 15 %. Enfin, au cas où un contribuable se trouverait en situation de double imposition, la convention prévoit la mise en oeuvre d’une procédure amiable bilatérale de règlement du différend.

Si la nouvelle convention fiscale franco-andorrane vise à éviter les doubles impositions, elle comporte aussi un arsenal très complet de stipulations visant à empêcher les montages d’évasion fiscale et les situations d’absence d’impôt. Comme vous le savez, la France est en pointe dans les travaux internationaux sur ces sujets et, pour le Gouvernement, il est prioritaire de lutter contre les abus de ce type.

Je voudrais pour finir revenir sur une particularité de ce texte. Comme vous l’avez relevé, la clause sur l’échange de renseignements y est remplacée par une référence à l’accord franco-andorran dédié du 22 septembre 2009. Cet accord se fonde sur un modèle défini en 2002 au niveau international, dans le cadre des travaux du Forum mondial sur la transparence et l’échange d’informations. Il est dédié au seul volet de l’assistance administrative sur demande. Dans ce domaine, il permet une coopération fiscale identique au standard de l’OCDE, en excluant explicitement le secret bancaire. Les deux parties ont fait le choix pragmatique de conserver le mécanisme déjà en place, par souci de simplicité.

En clair, la convention fiscale qui vous est soumise répond aux avancées indéniables d’Andorre en matière de fiscalité et de transparence. Dans un contexte d’étroite proximité entre ce pays et la France, elle a vocation à constituer à l’avenir un cadre essentiel des relations économiques, tant pour les particuliers que pour les entreprises qui sont en relation avec Andorre, notamment les Français de l’étranger qui ont fait le choix de s’y installer.

Les inquiétudes étant désormais levées, je rappelle l’importance qu’il y a à ratifier dans les meilleurs délais cette convention qui apportera une sécurité juridique aux personnes et aux entreprises vivant et travaillant en lien avec Andorre. Pour ces raisons, le Gouvernement est convaincu que son entrée en vigueur rapide relève de l’intérêt des deux États.

Je fais confiance, mesdames et messieurs les députés, à votre réalisme et à votre volonté d’avancer afin que ce texte puisse être ratifié le plus rapidement possible !

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