Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voilà de nouveau réunis en séance publique pour discuter, en nouvelle lecture, du projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la Principauté d’Andorre en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu.
Discuté et adopté par notre assemblée le 8 décembre dernier, le texte a été examiné et rejeté par le Sénat le 18 décembre. Le 15 janvier, la commission mixte paritaire qui s’était réunie pour trouver un compromis a abouti à un échec.
Comme nous l’évoquions en décembre, la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales est importante, non seulement pour la protection des budgets nationaux mais aussi pour la confiance des citoyens dans l’équité et l’efficacité des systèmes fiscaux. La nécessité d’éliminer la double imposition transfrontalière se justifie par le fait qu’il est vain que deux pays soumettent à l’impôt un même élément de revenu ou de propriété pour la même période et pour le même contribuable, donc pour un revenu d’être imposé deux fois.
Jusqu’à l’an dernier, la France et la Principauté d’Andorre n’étaient liées par aucune convention d’élimination des doubles impositions et de lutte contre l’évasion et la fraude fiscales, alors même que la Principauté d’Andorre sollicitait depuis très longtemps la conclusion d’une telle convention, en mettant notamment en avant l’imposition à la source trop lourde des débiteurs français bénéficiant de prestations rendues par des prestataires andorrans.
La convention fiscale entre la France et la Principauté d’Andorre a alors été signée à Paris le 2 avril 2013. Les raisons qui ont conduit à cette signature sont au nombre de trois.
La première est le constat de l’effort constant de la Principauté en matière de transparence fiscale. En effet, après la signature, en 2009 et 2010, de vingt accords relatifs à l’échange de renseignements en matière fiscale, avec notamment la France, l’Espagne, le Danemark et l’Allemagne, Andorre a été retirée, avec Monaco et le Liechtenstein, de la liste grise des juridictions non coopératives établie par l’OCDE.
Le 5 novembre 2013, la Principauté d’Andorre a signé la convention multilatérale de l’OCDE portant sur l’assistance mutuelle dans la lutte contre la fraude fiscale internationale, devenant ainsi le soixantième signataire de ce texte. Cette convention concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale renforce la coopération entre les administrations des pays signataires qui s’engagent à échanger leurs informations ou à organiser des contrôles simultanés.
Rappelons qu’en 2004, Andorre avait conclu avec l’Union européenne un accord prévoyant des mesures en matière de fiscalité des revenus de l’épargne sous forme de paiements d’intérêts. En vertu de cet accord, la Principauté pratique une retenue à la source non libératoire de 35 % sur les revenus d’intérêts dont le bénéficiaire effectif est un résident personne physique d’un État membre de l’Union et rétrocède 75 % du montant de cette retenue à la source à l’État de résidence de la personne.
Actuellement, la Commission européenne mène des négociations en vue de la révision de cet accord afin de tenir compte de la révision en cours de la directive sur la fiscalité de l’épargne, révision dont l’objet est d’étendre le champ des revenus couverts à certains produits d’assurance-vie et de couvrir les risques de contournement de la directive actuelle via l’interposition d’entités.
Le mandat de négociation prévoit également d’insérer dans l’accord entre Andorre et l’Union européenne une clause d’échange d’informations sur demande conforme au standard international et d’explorer la possibilité de mettre en place un échange automatique d’informations.
La deuxième raison poussant à la signature de la convention est la modernisation du cadre fiscal de la Principauté. En effet, si l’organisation fiscale d’Andorre se distinguait jusqu’à la fin 2010 par le fait qu’il n’existait pas de système d’imposition directe sur le revenu des personnes physiques, sur les bénéfices commerciaux ni sur le patrimoine, elle s’est depuis dotée d’un cadre fiscal plus moderne en introduisant une fiscalité directe sur les bénéfices des sociétés, les revenus des activités économiques et l’ensemble des revenus des non résidents. Cette législation est appliquée depuis le 1er janvier 2012. Par ailleurs, une loi relative à la TVA, d’un taux de 4,5 %, est entrée en vigueur le 1er janvier 2013, et Andorre prévoit d’introduire prochainement un impôt sur les revenus des personnes physiques.
La dernière raison, et non des moindres, tient aux échanges économiques franco-andorrans. Les principaux partenaires commerciaux d’Andorre sont les États membres de l’Union européenne, avec lesquels la Principauté réalise plus de 95 % de ses exportations. Parmi eux, la France figure en très bonne position puisqu’elle est son deuxième fournisseur de marchandises et son deuxième client, après l’Espagne. Certes, nos exportations ne représentent plus que la moitié de celles de l’Espagne, alors que nos deux pays étaient à égalité au cours de la dernière décennie. Cette convention devrait favoriser le retour à un équilibre.
Dès lors, cette convention ne pourra être que bénéfique pour nos deux pays. Elle le sera d’abord sur le plan économique et financier. Le risque de double imposition ne constituant plus une source d’incertitude pour les investisseurs, rassurés par ailleurs par des clauses anti-abus visant à prévenir le risque de non-imposition, la convention contribue à augmenter le potentiel d’investissements croisés entre la France et la Principauté. En outre, elle traduit le renforcement de la coopération fiscale entre les deux États.
Ensuite, la convention renforce la sécurité juridique des personnes morales et physiques en posant des règles claires applicables aux opérations impliquant des résidents des deux États. Puis elle définit les modalités de répartition des droits d’imposition des revenus entre les deux États contractants et les conditions dans lesquelles s’effectuera l’élimination des doubles impositions supportées par les résidents.
La convention prévoit notamment la limitation de l’imposition à la source en fixant des taux d’imposition de 5 % sur les revenus passifs – dividendes, intérêts et redevances. Elle instaure également des mécanismes visant à interdire l’usage abusif des stipulations conventionnelles et à éviter les situations de double exonération.
Enfin, cette convention bénéficiera d’une organisation efficace de la part de l’administration fiscale puisque c’est la direction générale des finances publiques, la DGFIP, qui est responsable de l’application des conventions fiscales conclues par la France.
Les modalités administratives d’application de la présente convention seront identiques à celles applicables à l’ensemble des conventions fiscales conclues par la France. Ainsi, les personnes résidentes de France pourront, en ce qui concerne l’impôt sur le revenu et sur les sociétés, bénéficier des crédits d’impôt auxquels elles auront droit en application de cette convention.
La direction des résidents à l’étranger et des services généraux, la DRESG, direction à compétence nationale de la DGFIP, sera compétente pour recevoir les déclarations des personnes résidentes de la Principauté. Quant au contrôle des déclarations, il sera effectué par le service de la DGFIP territorialement compétent, à savoir la DRESG pour les résidents de la Principauté.
Enfin, une évaluation de l’effectivité de l’échange de renseignements sera présentée chaque année lors de la préparation du projet de loi de finances.
Par conséquent, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste réaffirme, comme il le fit le 8 décembre, son soutien à ce projet de loi.