Ces trois métiers ont des points communs, mais aussi des différences.
Les huissiers de justice et les commissaires-priseurs font beaucoup de ventes, plus ou moins importantes. Ce matin, on vous a expliqué quel était le rôle de l'huissier en la matière. Qu'il y ait une fusion entre les deux professions me paraît parfaitement normal.
Reste le problème des mandataires, qui concerne essentiellement les entreprises en difficulté. Une confusion peut exister entre les huissiers de justice et les commissaires-priseurs d'une part, et les mandataires judiciaires d'autre part.
Il se trouve que, dans le cadre de ce projet de loi, je suis chargé plus particulièrement des entreprises en difficulté et que je dois intervenir dans la suite de la discussion, sur la question des mandataires judiciaires. Nous avons prévu que le président du tribunal de commerce désignera désormais deux administrateurs judiciaires et deux mandataires judiciaires lorsqu'une entreprise dépassant certains seuils à déterminer par décret sera amenée à déposer son bilan. On me répondra que le président du tribunal de commerce peut déjà le faire – sauf qu'en réalité il ne le fait pas.
Pour illustrer mon propos, je prendrai le cas de l'affaire de la Société nationale Corse Méditerranée (SNCM), où il faut licencier des centaines de personnes, organiser un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) et qui est confrontée à des problèmes très complexes de droit européen. Pourtant, un seul mandataire judiciaire a été désigné à la demande du procureur de la République. C'est pourquoi, lorsqu'on me dit qu'il faut se reporter à ce que va faire le procureur de la République, je réponds non. Dans tous les cas que j'ai dû traiter, et Philippe Vigier qui a participé à des auditions avec moi le sait bien, il n'y a pratiquement jamais eu de demande d'un second mandataire.
C'est presque la même chose pour les administrateurs judiciaires. Dans la circonscription de Coutances, une entreprise de 600 personnes spécialisée dans la découpe de viande de porc vient de déposer le bilan. Là encore, il n'y a eu qu'un administrateur judiciaire et un mandataire judiciaire alors qu'on avait la possibilité d'en désigner un second. De même, on avait la possibilité de demander une délocalisation, mais cela n'a pas été fait.
Dès lors que nous allons créer un appel d'air énorme pour les professions d'administrateur judiciaire et de mandataire judiciaire, que nous allons créer des diplômes complexes, que nous n'allons pas demander la désignation de personnes identiques – il y aura un administrateur judiciaire spécialisé sur le plan local, régional, ou national, un mandataire, et un autre qui aura des compétences par exemple en matière agroalimentaire – chacun comprend que l'on peut désigner une seconde personne qui aura des compétences spécifiques sur une liste prédéterminée qui sera établie par le ministère de l'économie.
Cela coûtera-t-il plus cher ? Tous les renseignements que Philippe Vigier et moi-même avons pu collecter montrent que non. C'est exactement le même prix qui sera supporté par l'entreprise en difficulté. Cela constituera un appel d'air énorme pour ces professions, ce qui justifie qu'elles aient leur unité. Je ne vois pas comment, dans de telles affaires, on désignera un huissier de justice. Sinon, cela voudrait dire, s'agissant de la SNCM, qu'une même personne serait à la fois chargée de toutes les créances de l'entreprise en tant qu'huissier.
Monsieur le ministre, je pense que vous aurez été sensible à mon argumentation. Vous avez parfaitement raison de vouloir regrouper les huissiers de justice et les commissaires-priseurs, mais traitons différemment la profession qui regroupera à la fois les administrateurs et les mandataires judiciaires.