Intervention de Denys Robiliard

Réunion du 18 janvier 2015 à 21h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance et l'activité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDenys Robiliard, rapporteur thématique :

La loi sur la sécurisation de l'emploi a profondément remanié le dispositif d'adoption des plans de sauvegarde de l'emploi : le PSE donne lieu soit à un accord collectif, soit, à défaut, à un document unilatéral établi par l'employeur, qui doit ensuite être homologué par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi – DIRECCTE – dans des délais réduits. Ce document peut faire l'objet de recours devant le tribunal administratif, qui doit statuer dans un délai de trois mois, la cour administrative d'appel disposant du même délai pour se prononcer.

Dans l'affaire Mory Ducros, la Cour administrative d'appel de Versailles a estimé qu'à défaut d'accord sur le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements, le périmètre retenu est nécessairement celui de l'entreprise dès lors que le législateur n'a pas entendu, dans la loi sur la sécurisation de l'emploi, revenir sur les règles de fixation de ce périmètre.

L'ANI n'a pas envisagé la modification de ces règles. Quant au législateur, il n'en a pas discuté. Je serai d'ailleurs curieux de connaître les travaux parlementaires qui ont pu éclairer les juges de la cour administrative d'appel de Versailles.

La difficulté tient à ce que le choix du cadre de l'entreprise peut être déstabilisant pour les salariés. Dans le cas de Mory Ducros, il y avait quatre-vingts agences partout en France. L'application de l'ordre des licenciements au périmètre de l'entreprise obligeait à tenir compte de toutes les agences. Pour schématiser, ce n'est pas parce qu'une agence fermait que ses salariés étaient licenciés. La règle actuelle n'est donc pas satisfaisante.

Deux possibilités s'offrent à nous : soit nous attendons l'avis du Conseil d'État, soit nous opérons à chaud. Cette solution me semble préférable, car il convient de faire cesser une situation d'insécurité juridique que nous avons créée.

Pour ce faire, deux options sont possibles. L'une est de réaffirmer la règle selon laquelle, en l'absence d'accord, c'est le cadre de l'entreprise qui prévaut. Cette possibilité présente l'avantage d'inciter les parties à conclure un accord. Mais cela ne vaut pas dans tous les cas. Ainsi, dans les entreprises implantées sur plusieurs sites, les représentants syndicaux privilégieront une logique par site qui de facto exclut la signature d'un accord global.

L'autre possibilité, qui a ma faveur, consiste à définir un périmètre minimal que devra respecter le chef d'entreprise. Si ce dernier souhaite retenir un périmètre plus restreint, il devra obtenir un accord. En résumé, l'incitation à conclure un accord demeure, l'employeur ne fixe plus unilatéralement le périmètre et il est astreint à un périmètre minimum.

Mon amendement SP1582 propose de retenir le périmètre du bassin d'emploi – zone d'emploi dans la terminologie de l'INSEE – qui correspond à une nomenclature objective, les zones d'emplois étant recensées dans un atlas.

Interdire la fixation unilatérale du périmètre par l'employeur permet d'objectiver les critères et de maintenir une incitation à négocier. Qui plus est, l'existence d'un accord prémunit contre d'éventuels recours, ce qui n'est pas négligeable pour l'employeur.

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