Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du 27 janvier 2015 à 15h00
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Je voudrais rebondir sur l’intervention de notre éminent collègue, M. Savary. Quand on déclare que les lignes ferrées existantes ne donnent pas satisfaction, encore faut-il savoir pourquoi. Prenons ainsi un exemple que je connais bien, celui de la ligne Clermont-Saint-Etienne. Les investissements décidés par la région Auvergne ont permis de maintenir le TER,mais cette ligne n’est pas rentable au-dessus de la ville de Thiers pour la traversée du Forez faute de desservir toutes les gares qui auraient pu l’être il y a vingt ou trente ans.

Voilà donc un équilibre fragile. Il est bien évident que si vous ouvrez une ligne de bus entre Clermont-Ferrand et Saint-Etienne par l’autoroute, un entrepreneur privé ne tardera pas à se présenter pour l’exploiter ce qui aura pour effet, dans un premier temps, d’aggraver les difficultés de la ligne ferroviaire et dans un deuxième temps, sa fermeture, pour un service qui sera différent ! La question de l’aménagement du territoire se pose. Si une ligne d’autocar relie un point à un autre rapidement, par l’autoroute, nous pourrons considérer qu’une partie du territoire a été abandonnée et que vous avez accepté le principe que des territoires ruraux restent des déserts et ne puissent plus, pour des raisons financières, bénéficier d’un véritable service public des transports. C’est inquiétant.

Deuxième exemple : la liaison Clermont-Bordeaux était suspendue depuis l’été dernier, à Ussel, pour des raisons budgétaires, liées à l’endettement de la SNCF et à l’impossibilité de maintenir des lignes alors que celle-ci est très importante. Il est fort probable que, très rapidement, nous n’ayons plus d’accès à la façade atlantique alors que nous en avons aujourd’hui deux – Clermont-Bordeaux ou Lyon-Nantes. Elles disparaîtront au profit du bus pour un résultat qui ne sera pas le même !

Je prendrai un troisième exemple : la ligne Clermont-Béziers. Électrifiée de bout en bout, cette ligne va pourtant être abandonnée, faute d’entretien. On nous opposera naturellement que l’autoroute existe et qu’elle est gratuite, de surcroît, à l’exception de la traversée du viaduc de Millau. La ligne ferroviaire sera donc remplacée par des autocars qui circuleront sur cette autoroute. Or, il se pose derrière cela la question de l’aménagement rural, sur le territoire des Cévennes, par exemple. L’approche y est différente. Le principe selon lequel la compétitivité doit primer et la concurrence résoudra tous les problèmes aura des effets considérables sur le maintien d’une activité dans les territoires ruraux.

Enfin, j’insisterai sur un dernier point. Les régions ont déjà consenti de nombreux efforts depuis la décentralisation et depuis qu’elles assument la compétence des TER. Celles d’entre elles qui ont effectué des travaux l’ont fait pour une durée d’amortissement à long terme, de l’ordre de vingt à trente ans. Or, malgré les nombreux travaux réalisés sur des lignes électrifiées par les régions, voire par RFF, l’ouverture préconisée dans le présent texte aboutira à la disparition de certaines de ces lignes au profit de l’autocar. Celui-ci n’ira pas pour autant desservir des territoires qui sont aujourd’hui abandonnés et que le train ne dessert pas.

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