Préférons le sens des mots à leur connotation : les débats n’en seront que plus sereins et fructueux. Dans le même esprit, attachons-nous au contenu du texte, plutôt qu’aux fantasmes ou aux peurs distillées ici ou là.
L’article 2 énonce précisément les conditions nécessaires pour bénéficier d’un suicide médicalement assisté, ainsi que la procédure envisagée. Ces conditions sont claires et strictes : le médecin doit vérifier que le patient est effectivement majeur et capable, atteint d’une affection grave et incurable, infligeant une souffrance physique ou psychique inapaisable ou jugée insupportable. Il prend alors acte de la demande, consulte un autre médecin, ainsi que l’équipe médicale, avant de valider la demande du patient, qui doit être réitérée. Alors, pas moins de quatre jours après la demande initiale, la volonté du patient est respectée.
L’article 3 définit la valeur exécutive, c’est-à-dire opposable, des directives anticipées, ainsi que les conditions de leur sauvegarde. Cet article précise également le rôle de la personne de confiance : sur ce point, les différences avec la proposition de loi de M. Claeys et M. Leonetti sont minimes.
L’article 4 énonce, quant à lui, les conditions de bénéfice et la procédure d’une euthanasie. La carte vitale mentionne l’existence, ou non, de directives anticipées, qui doivent alors être respectées, à condition que la situation médicale du patient corresponde effectivement au cadre prévu par la loi. Un deuxième médecin est également consulté, ainsi que la personne de confiance. Mais les directives prévalent sur tout autre avis.
L’article suivant décrit la procédure de contrôle a posteriori d’une euthanasie.
Vient enfin la clause de conscience du médecin, qui existe également pour la pratique médicale d’une interruption volontaire de grossesse.
Tels sont, mes chers collègues, les deux autres possibilités que doivent pouvoir choisir nos concitoyens, deux choix complémentaires aux aménagements, par ailleurs utiles, que proposent de faire nos collègues Claeys et Leonetti à la loi de 2005.
Il n’est pas question ici de savoir si nous serions prêts à accepter l’un de ces choix pour nous-mêmes ou pour l’un de nos proches. Il s’agit aujourd’hui de savoir si nous sommes prêts à accepter que certaines Françaises, que certains Français, réclament en toute conscience ces possibilités-là, et si nous sommes prêts à leur répondre favorablement.
Refusons d’infantiliser ces personnes, ne commettons pas un péché d’orgueil de bien portant, en affirmant doctement qu’elles seraient fragiles, faibles ou vulnérables, et que, pour ces raisons, elles ne sauraient décider en pleine conscience de ce qui est mieux pour elles-mêmes. Si la dignité est toujours difficile à définir, elle commence par le respect. Refusons d’infantiliser la personne malade, ou en fin de vie, et reconnaissons-lui cette capacité à choisir pour elle-même le moment et la manière.
Mercredi dernier, j’ai entendu plusieurs d’entre nous, lors du débat sur la fin de vie, appeler à une véritable avancée en la matière, à l’instar de notre président Bartolone qui s’est prononcé clairement en faveur de la légalisation du suicide médicalement assisté et de l’euthanasie dans des cas précis. J’ai entendu certains d’entre nous se dire favorables à une forme d’aide active à mourir. J’ai entendu certains d’entre nous prêts à discuter sur cette nouvelle base législative proposée par les écologistes. J’ai entendu certains d’entre vous souligner les manques de la proposition de loi Claeys-Leonetti.
Je vous appelle à en discuter, et à faire évoluer la loi afin que la liberté du choix, la garantie concrète de tous les choix, trouve une majorité nécessaire dans notre assemblée. Le débat et le vote, aujourd’hui, sur le texte dont je suis la rapporteure, permettraient de fixer la juste dimension qu’il faudra donner à la proposition de nos collègues que nous débattrons en mars.
Gardons à l’esprit que si l’apaisement est nécessairement un objectif, le consensus ne peut être l’alpha et l’oméga d’une réforme de société.