Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale a subi des critiques qui constituent un vivant paradoxe politique. Les uns s'étonnent du temps laissé à la concertation tandis que les autres redoutent le grand soir, et ce sont parfois les mêmes qui expriment ces deux critiques.
Notre majorité a, elle, heureusement fait le choix de la marche en avant, le choix d'une reprise en main des comptes sociaux qui dérivaient et celui, essentiel, du droit à la santé, en proximité comme à l'hôpital, dans le cadre de la solidarité collective que doit permettre l'assurance maladie.
Sans reprendre le débat dans sa totalité, nous pouvons affirmer que le PLFSS désigne une nouvelle politique de santé et de protection sociale, et fixe les bases d'une réorientation. Il suffit de voir le nombre d'amendements de suppression de l'opposition, ainsi que leur constance, pour mesurer que de nombreuses pages seront tournées en 2013. Il était temps, au nom de l'efficacité, mais aussi au nom de la justice.
Pour l'hôpital, comme vient de le dire Mme la ministre, cette réorientation amorce la reconnaissance et même la renaissance du service public hospitalier que la loi HPST avait sacrifié. Nous le savons, le chantier ne fait que commencer, mais les décisions de principe sont là. La fin de la convergence tarifaire, la refonte de la tarification, l'arrêt du gel des crédits des missions d'intérêt général inaugurent, sans la conclure, cette nouvelle politique hospitalière.
Pour l'accès à la santé et à l'offre de soins, nos débats ont confirmé l'urgente nécessité d'intervenir sur deux fronts.
Le premier est celui des fractures géographiques, plus précisément les déserts médicaux. Après des années d'impuissance publique, nous souhaitons dépasser le débat entre incitation et coercition. Nous demandons au Gouvernement de faire de la lutte contre les déserts médicaux une grande cause nationale, et de s'y engager sans tabous, notamment par la mobilisation que vous avez annoncée, madame la ministre, cela au moyen, en 2013, d'une grande loi sur l'accès aux soins, que nous serons nombreux à soutenir très volontiers.
Le second front est celui des obstacles financiers qui s'opposent au droit à la santé : réduire le reste à charge et le niveau réel des remboursements doit être pour l'État comme pour l'assurance maladie le fil conducteur de cette législature.
Une reconquête sélective par l'assurance maladie du champ de la protection collective est nécessaire. Si, dans ce PLFSS, nous avons dit stop au déremboursement, il faudra, pour la suite, faire porter les efforts là où c'est nécessaire et juste. À ce titre, je salue l'effort qui sera accompli en 2013 pour la gratuité des interruptions volontaires de grossesse et pour la contraception des mineurs. Ainsi s'engage la reconquête par l'assurance maladie de son périmètre nécessaire.
L'effort est aussi à obtenir dans le domaine des mutuelles et des assurances complémentaires, qui doivent être plus accessibles et mieux régulées, sans pour autant devenir des assurances de base. Elles doivent également faire pression sur les tarifs dans des domaines spécifiques. Nous y reviendrons dès cette semaine avec la proposition de loi sur le conventionnement des mutuelles avec les réseaux de soins.
J'insisterai sur les points qui me semblent essentiels, portant sur le fruit des travaux parlementaires et sur les apports de notre commission. Pour la démographie médicale, la création de 200 postes de praticiens territoriaux de médecine générale permettra de répondre à des urgences sur les territoires. Il s'agit d'une étape que la commission des affaires sociales a eu à coeur de renforcer en l'ouvrant aux médecins remplaçants et aux assistants hospitaliers, et de compléter en adoptant un amendement présenté par votre rapporteur, visant à soutenir la médecine salariée dans les territoires où l'offre de soins est insuffisante. Ce dispositif permettra, par exemple, à des praticiens hospitaliers et à des médecins salariés de centres de santé d'exercer tout ou partie de leurs fonctions hors de leurs établissements dans des zones déficitaires en offre de soins.
En matière d'amélioration de l'accès aux soins, je tiens également à souligner l'expérimentation du tiers payant pour les étudiants de quelques grandes villes universitaires, qu'ils soient ou non couverts par une assurance complémentaire. Je souhaite d'ailleurs que cette expérimentation débouche sur une généralisation du dispositif.
Dans le domaine de la démocratie sanitaire, la commission a adopté en première lecture un amendement qu'il faudra maintenir, visant à améliorer le financement et surtout à affirmer l'indépendance des associations de patients, aujourd'hui largement tributaires des laboratoires, qui dépensent cinq millions d'euros par an à cet effet.
En matière de régulation de l'offre de soins, la commission des affaires sociales a également introduit un article 42 bis visant à mieux encadrer l'exercice libéral à l'hôpital et à limiter les dépassements d'honoraires perçus à cette occasion. Je voudrais réaffirmer ici la détermination intacte de notre groupe à sanctionner les abus commis par une petite minorité de praticiens, qui rejaillissent sur la pratique et la réputation de leurs collègues qui, eux, exercent leurs activités, publique comme libérale, dans le respect du cadre légal applicable. Il n'y aura aucun recul sur le fond, mais une appréciation de la situation nous conduit, au moment de cette seconde lecture, à souhaiter une intervention du législateur plus complète et plus efficace.
Nous avons en effet constaté que cette proposition de régulation était intervenue parallèlement à d'autres initiatives : d'une part, la signature de l'avenant 8, qui doit être transposé à l'exercice libéral à l'hôpital ; d'autre part, le lancement par Mme la ministre d'une mission sur l'exercice libéral, confiée à Mme Dominique Laurent. À ce stade, il apparaît clairement nécessaire de supprimer l'article 42 bis et, surtout, de reporter le débat au printemps 2013 : le groupe socialiste déposera alors une proposition de loi prévoyant une réforme globale et cohérente de l'activité libérale à l'hôpital.