Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, nous sommes amenés à examiner le PLFSS en nouvelle lecture parce que la majorité des sénateurs a considéré que ce projet sans ambition était fondé sur une mauvaise analyse des enjeux de notre protection sociale. Il me revient de vous le montrer pour ce qui concerne la branche famille.
Une seule mesure figure dans le texte déposé par le Gouvernement : l'article 71, qui instaure une expérimentation dénuée de portée législative et n'ayant pas une incidence financière suffisante. Elle expose par ailleurs le législateur à la censure pour cause de « cavalier » social. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, des expérimentations ayant le même objet existent déjà, mais elles sont passées sous silence dans l'étude d'impact présentée au Parlement. La CNAF peut déjà coordonner les caisses d'allocations familiales et les relais d'assistants maternels qui aident les parents en insertion à utiliser le complément de mode de garde auprès d'assistants maternels en sous-activité.
Mme la ministre déléguée chargée de la famille n'est pas là, mais je pense, madame la ministre, que vous lui transmettrez mes observations. Elle serait mieux avisée d'utiliser la future convention d'objectifs et de gestion liant la CNAF et l'État. La convention actuelle se termine en décembre, mais, après six mois aux affaires, l'ouvrage vient tout juste d'être mis sur le métier. Je regrette vivement ce retard.
Si le PLFSS contient si peu de chose, c'est qu'un parti pris politique entraîne une erreur d'analyse. Selon le Gouvernement, en matière d'accueil du jeune enfant et d'aide aux familles vulnérables, une rupture serait nécessaire. Le refus d'admettre l'importance de l'héritage des dix dernières années aboutit à une impasse : on cherche en vain autre chose et l'on ne trouve rien.
Aucune échappatoire ne proviendra de l'invocation rituelle de la pré-scolarisation à la maternelle, dont les crédits ne sont pas examinés dans le cadre du PLFSS. Il suffit de se reporter à la loi de finances pour constater qu'ils n'augmentent pas plus vite que ceux de l'ensemble de l'enseignement scolaire du premier degré.
Madame la ministre, les mesures adoptées depuis dix ans contiennent, en matière d'accueil, les bons ingrédients d'une politique de l'offre à même de concilier la liberté de choix pour les parents, des incitations à l'efficacité pour les professionnels et des mesures de soutien pour les familles vulnérables ou les territoires sous-dotés. Il convient de poursuivre dans cette voie.
On note d'ailleurs une continuité de cet ordre avec le nouvel article 71 bis qui, dans certains cas de surendettement, élargit à deux allocations logement un mécanisme que nous avons instauré pour l'APL. En la matière, on reste cependant loin de l'amélioration, pourtant nécessaire, des aides personnelles au logement. Il ne faut pas négliger les économies provenant d'une meilleure coordination entre les CAF et l'État. Un rapport de l'IGAS, commandé par le précédent gouvernement, a été remis au mois de mai. Ce chantier ne doit pas être négligé dans la future convention d'objectifs et de gestion.
Mes chers collègues, tout cela est bien maigre. Pourtant, le Gouvernement prétend que ce PLFSS constitue un effort énorme pour les familles, après ce qu'il a qualifié d'années de régression. Je tiens, une nouvelle fois, à dénoncer ces contrevérités.
Alors que la politique familiale représentait 4,7 % du PIB au début du précédent quinquennat, elle est passée à 5,1 % en 2012. Elle n'a donc pas cessé de progresser.
Alors que, pour la première fois depuis trois ans, le PLFSS laisse le déficit de la branche famille s'aggraver d'une année sur l'autre, la majoration irréfléchie de l'allocation de rentrée scolaire représente une charge supplémentaire de 450 millions d'euros. Lors de la consultation du conseil d'administration de la CNAF, il n'y a pas eu d'avis unanimement favorable des syndicats de salariés, ce qui prouve que cette promesse de campagne s'articule mal avec les autres prestations familiales.