Intervention de Jean-Christophe Fromantin

Séance en hémicycle du 30 janvier 2015 à 9h30
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 9

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Fromantin :

M. Poisson, je crois, a bien posé le problème : il convient de se donner les moyens de ses ambitions. Encore une fois, je crois que c’est là le coeur de la tension qui anime nos débats.

Nous sommes tous d’accord pour que tout le monde ait un droit – on peut en discuter pendant des heures mais le problème n’est pas là : le problème, c’est celui des moyens.

Aujourd’hui, force est de reconnaître que le droit existe – il s’agit d’un droit d’accès au service public – mais si nous en discutons, c’est bien parce que les moyens ont fait défaut. Je ne referai pas le débat pour savoir qui est le premier, de la poule et de l’oeuf, mais nous sommes tout de même un peu dans une contradiction ou un paradoxe : le droit existant, qui est important, préexiste aux outils et ne peut pas être exercé.

Il est toujours possible de relever le droit d’un cran mais si l’on n’en fait pas réellement de même avec les moyens, cela n’en reste pas moins, excusez-moi, du bavardage.

Je renouvelle mes questions sur les éléments d’évaluation possibles. La densité du flux a-t-elle été vraiment évaluée ? Je le répète : les candidats qui repassent leur permis sont de plus en plus nombreux suite à la perte de leurs points – les mesures prises par la sécurité routière, même si elles sont évidemment heureuses, accroîtront encore leur nombre, au-delà des 100 000 actuels. Cette courbe progresse. A-t-elle été mesurée ? Qu’en est-il des flux passés ? Comment évolueront-ils ? Connaît-on le nombre de candidats qui repasseront le permis de conduire en 2015, en 2016 ou en 2018 ?

A-t-on réalisé une projection du nombre de personnes roulant sans permis par rapport aux 39 000 personnes qui sont aujourd’hui contrôlées chaque année sans l’avoir ? Combien sont-elles ? 500 000, 700 000, un million, 1,5 million ?

Avez-vous évalué le nombre de personnes qui se présenteront à l’examen du permis de conduire suite à cette nouvelle disposition concernant les candidats libres ?

Avec l’ouverture des agréments des auto-écoles aux « pure players », aux acteurs de l’internet, avez-vous projeté une évolution des demandes de permis ?

Excusez-moi, monsieur le rapporteur, mais nous ne disposons pas de tous ces éléments.

Il est certes toujours possible de faire des plans sur la comète – plus 90 000, plus ceci, plus cela – mais il manque à notre débat un élément d’évaluation extrêmement concret.

C’est pourquoi il importe de se donner des moyens supplémentaires avec la souplesse qu’offrirait un recours à des organismes agréés et certificateurs. Cela éviterait la thrombose ou l’impasse.

Je reviens aussi sur un élément d’évaluation évoqué tout à l’heure en commission spéciale par notre collègue Philippe Vigier.

Une bonne construction ou répartition suppose de savoir ce qu’il en est des délais, des volumes et du nombre d’inspecteurs par territoire.

C’est une équation à résoudre, et si nous n’avons pas les données nécessaires pour résoudre l’équation, c’est du vent.

Je reprendrai un exemple évoqué tout à l’heure : les délais en Seine-Saint-Denis n’ont rien à voir avec ceux de la Creuse : en Seine-Saint-Denis, ces délais doivent être multipliés par les centaines de milliers de personnes qui veulent passer le permis, alors qu’en Creuse, il faut seulement les multiplier par quelques milliers. Cet élément de pondération dans le calcul est fondamental, et il rend extrêmement ambiguës et aléatoires les solutions que vous proposez.

Celles-ci supposent en effet que les délais soient les mêmes partout en France, que le volume de demandes soit uniforme sur tout le territoire, et que la répartition des inspecteurs soit linéaire. Or cela ne marche pas comme cela, vous le savez, pour des raisons qui tiennent à la configuration de la France. La France n’est pas un ensemble homogène. Alors qu’elle compte des territoires denses et d’autres de faible densité, vous répondez en imposant la même norme partout, et sans tenir compte de ces différences.

Si vous ne faites pas d’évaluation précise, et si vous n’adoptez pas notre amendement, votre système ne marchera pas. C’est évident : il est théorique, fait dans la précipitation, et ne prend pas en compte des données et des paramètres essentiels d’appréciation, d’évaluation et de réglage inhérents à ce type de dispositif.

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