Intervention de Francis Vercamer

Séance en hémicycle du 2 février 2015 à 16h00
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 12

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrancis Vercamer :

Nous avons déposé un amendement de suppression de l’article 12, qui a trait aux professions réglementées, en raison d’un certain nombre de ses dispositions qui nous paraissent discutables, à commencer par le fait qu’il introduit dans le code de commerce une certaine marchandisation du droit. Je reconnais que la rédaction de cet article a évolué en commission spéciale, mais il suscite encore de nombreuses questions. Pour le groupe UDI, la première d’entre elles tient à l’homogénéisation des règles tarifaires, qui apparaît comme une fausse bonne idée. Chaque métier ayant ses propres spécificités, cette homogénéisation risque de mettre à mal un certain nombre de professions juridiques : elle aura des conséquences sur leur fonctionnement et remettra en cause les principes fondamentaux les régissant, à savoir l’égal accès au droit, la qualité juridique et le maillage territorial – je connaissais la lutte contre les déserts médicaux mais, en l’occurrence, il s’agit de la lutte contre les déserts juridiques.

Même si l’on peut se réjouir de l’adoption, en commission, d’une révision quinquennale des tarifs, cet article ne nous paraît pas encore satisfaisant. Tout d’abord, les critères sont encore trop vagues, s’agissant par exemple des « coûts pertinents du service rendu » ou de la « rémunération raisonnable, définie sur la base de critères objectifs », chacune de ces notions pouvant faire l’objet de plusieurs interprétations. Nous redoutons ainsi que la tarification résulte simplement d’une décision arbitraire, sans raison compréhensible. On peut d’ailleurs se demander ce qu’est une rémunération raisonnable. Cette incertitude risque d’engendrer un nombre incalculable de contentieux.

Ensuite, le corridor tarifaire induit un risque d’inflation. La version initiale instaurait une fourchette comprise entre un minimum et un maximum : les tarifs devaient donc être définis entre un prix plancher et un prix plafond. Il était difficilement envisageable qu’un client puisse négocier les tarifs avec un membre d’une profession juridique, en particulier un notaire. Les personnes les plus en difficulté auraient donc risqué de se voir appliquer le tarif le plus élevé. Aussi était-ce une disposition qui ne nous plaisait guère.

La nouvelle rédaction issue des travaux de la commission ne nous satisfait pas, dans la mesure où elle a remplacé la fourchette par un seuil, ce qui revient quasiment au même. Nous pensions que la première version du corridor tarifaire avait disparu : la voilà qui réapparaît avec cette nouvelle rédaction, complexe, qui risque de produire les mêmes conséquences. En effet, l’instauration d’un tel mécanisme engendrera de la même façon une hausse des prix, qui impactera directement les clients.

Il faut rappeler que 70 % des actes notariés sont effectués à perte et sont financés par les 30 % restants. Actuellement, un petit acte ne coûte pas moins cher à effectuer qu’un gros acte. Le fragile équilibre risque donc d’exploser, sous l’effet de la mise en place de ce corridor instauré au-dessus d’un seuil dont nous ne connaissons d’ailleurs pas encore les modalités de détermination. Nous risquons d’aller vers une libéralisation totale des tarifs qui ne peut que desservir le client. Nous avons déposé un certain nombre d’amendements, qui ont notamment trait à la forfaitisation des actes les plus courants et à la taxation, ce dernier sujet devant faire l’objet d’un travail approfondi. Rappelons en effet que 80 % de ce que l’on nomme les « frais de notaire » sont constitués de taxes.

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