Comme l’ont très bien expliqué mes collègues, ce n’est franchement pas la priorité aujourd’hui que de créer de nouvelles études alors que le nombre d’affaires diminue et que, là où de nouvelles études ont été implantées, elles ont beaucoup de mal, même au bout de 10 ou 20 ans, à trouver leur équilibre. Il y a donc là une méconnaissance totale du fonctionnement du monde notarial.
Surtout, nous ne comprenons pas pourquoi, alors que le ministère de la justice est là pour répondre à toutes les questions que vous vous posez sur la création d’études supplémentaires ou sur le maillage territorial, vous voulez recourir à une autorité administrative indépendante, l’Autorité de la concurrence. Selon vous, cela évite de créer une nouvelle autorité administrative. Mais le ministère pouvait parfaitement faire ce travail. En réalité, si vous souhaitez faire appel à l’Autorité de la concurrence, c’est parce que vous introduisez une philosophie, une approche entièrement nouvelle, que la France a combattue.
En 2005, la Commission européenne avait monté en épingle ce modèle et je me souviens avoir assisté, à Luxembourg, à une journée entière consacrée aux professions réglementées, durant laquelle la Commission vantait le modèle adopté par les Pays-Bas, qui avaient décidé que les notaires pourraient s’installer librement, sur la base d’un business plan, sans numerus clausus ni aucun contrôle.
Peut-être les Pays-Bas pouvaient-ils, du fait de la concentration de leur population, adopter une telle approche, mais la France, qui compte d’importants territoires ruraux, ne le peut pas. Vous auriez d’ailleurs dû vous intéresser à cette expérience néerlandaise, qui s’est soldée par un échec qui a même déstabilisé la profession de notaire. Vous faites fausse route en en voulant introduire ici l’Autorité de la concurrence. Vous montrez que votre approche n’est pas la bonne et nous la combattons.
Je suis certain que Mme la garde des sceaux et ses services partagent notre position, ce qui explique du reste son absence ce soir dans l’Hémicycle. Nous savons très bien en effet ce qui se dit dans les couloirs du ministère de la justice et, lorsque nous nous entretenons avec des hauts fonctionnaires de ce ministère, nous constatons qu’ils regardent votre projet avec une grande sévérité.
Je terminerai par une question. Vous ne cessez de charger la barque de l’Autorité de la concurrence, qui a déjà beaucoup de mal aujourd’hui à traiter tous les dossiers dont elle est saisie, au point que nombreux sont ceux qui se plaignent que leur traitement soit beaucoup trop long. Combien de fonctionnaires et quels moyens supplémentaires allez-vous donc affecter à cette Autorité, à qui vous voulez donner encore plus de travail ?