Intervention de Fleur Pellerin

Séance en hémicycle du 27 novembre 2012 à 9h30
Questions orales sans débat — Conséquences de la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires pour l'industrie du décolletage

Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique :

Madame la députée, en effet, le ministre du redressement productif a pu échanger avec des représentants de l'industrie du décolletage lors de sa visite au salon MIDEST, le salon de la sous-traitance industrielle, le 6 novembre dernier.

Le décolletage est une industrie de PME, qui représente en France environ 600 entreprises et 14 000 salariés. L'industrie automobile est son premier débouché. Ce secteur se concentre essentiellement, pour 70 %, dans la vallée de l'Arve, en Haute-Savoie.

Le décolletage est une filière de l'automobile qui peut s'appuyer sur un pôle de compétitivité – Arve Industries – et qui bénéficie d'un centre technique industriel basé à Cluses, le centre technique du décolletage. Celui-ci joue un rôle de vecteur d'innovation et de transfert technologique au sein des PME, qui, prises individuellement, sont dans l'incapacité de mener un effort significatif de recherche et développement.

Cette filière s'est prise en main et, sous l'égide de son syndicat, a lancé son grand projet « Expansion 2020 », qui vise à dynamiser le tissu industriel du décolletage français pour les dix prochaines années. L'État accompagne financièrement ce projet dans le cadre du programme d'investissements d'avenir.

Par ailleurs, dans le cadre du comité stratégique de filière automobile, les acteurs se sont engagés dans un contrat de filière qui vise à renforcer la solidarité, l'innovation partagée, l'internationalisation et la consolidation des filières-métiers, dont celle du décolletage. Ces efforts doivent permettre de renforcer l'ensemble de la filière du décolletage.

Il est incontestable que la proximité de la Suisse peut attirer les salariés de la vallée : quelque 70 000 travailleurs résidant en Haute-Savoie et notamment dans la vallée de l'Arve, traversent quotidiennement la frontière pour aller exercer leur talent en Suisse, dans l'industrie de l'horlogerie ou dans la mécanique de précision.

En revanche, les représentants du décolletage rencontrés au salon MIDEST ont davantage insisté sur leur besoin de retrouver des marges que sur une quelconque critique de la fin de la défiscalisation des heures supplémentaires. Existe-t-il d'ailleurs un seul autre pays européen qui, face à la crise économique et financière et à la montée du chômage, ait maintenu, et même amplifié, un système d'encouragement aux heures supplémentaires ?

L'Allemagne, un concurrent important de l'industrie savoyarde du décolletage d'après ce que confiaient les représentants de celle-ci au MIDEST, possède-t-elle un dispositif d'encouragement aux heures supplémentaires ? La réponse est non. Elle a mis en place des dispositifs qui permettent de mobiliser le chômage partiel. Dépenser de l'argent public pour permettre à des salariés de maintenir un lien avec leur entreprise et de conserver leur emploi est compréhensible. Par contre, dépenser autant d'argent public, non pas au profit des salariés, mais au profit des entreprises, pour créer du chômage, cela ne nous paraît pas admissible.

Nous avons cependant entendu le message de l'industrie du décolletage, qui n'est pas isolée. Nous comprenons que ces industriels aient besoin de marges plus élevées pour pouvoir investir et innover. Ce constat de la nécessité de dégager davantage de marges pour permettre aux entreprises de monter en gamme est d'ailleurs l'une des idées fortes du rapport commandé par le Gouvernement à Louis Gallois.

Ce rapport a été remis au Premier ministre le 5 novembre et le Gouvernement en a tiré toutes les conclusions qui s'imposaient en présentant son pacte pour la compétitivité, la croissance et l'emploi. Ce pacte propose de mobiliser, en trois ans, 20 milliards d'euros autour des entreprises. Destinée à l'appareil productif, cette somme doit contribuer, sous la forme de crédits d'impôt, à faire baisser les coûts de production pour permettre à la France de faire face à la mondialisation et à la compétition mondiale, dans une économie de plus en plus déloyale.

Cet effort, c'est l'effort de tous. C'est l'effort des entreprises, parmi lesquelles celles issues du décolletage. C'est l'effort des citoyens. C'est l'effort de chacun des consommateurs, qui, à travers leur pouvoir économique, peuvent privilégier le made in France. C'est l'effort des collectivités locales, qui devront elles aussi travailler à la remise en marche de l'appareil productif. C'est un effort d'union nationale. Tous les pays qui, dans la crise, ont réussi à tirer leur épingle du jeu sont des pays qui ont réussi à s'unir autour de leur appareil industriel.

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