Intervention de Jacques Moignard

Séance en hémicycle du 5 février 2015 à 15h00
Maladie de lyme — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Moignard :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, nous sommes saisis aujourd’hui de cette proposition de loi déposée par nos collègues de l’UMP concernant la borréliose de Lyme, maladie infectieuse due à une bactérie et transmise par une piqûre de tique, cela a été rappelé maintes fois.

Cette zoonose, identifiée en 1975 dans le comté de Lyme aux États-Unis, est bien connue en milieu rural. D’ailleurs, les statistiques montrent que les forestiers et les chasseurs en sont les principaux groupes à risque, bien que cette maladie touche également d’autres catégories socio-professionnelles dans notre pays puisque beaucoup d’entre nous ont été sollicités, en circonscription, par des gens atteints par cette maladie et des associations. J’aimerais d’ailleurs remercier ici ces dernières pour leur engagement et leur implication concernant cette cause relevant d’un problème de santé publique.

Le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste que je représente soutient la recherche dans le domaine médical. Nous l’avons notamment démontré avec notre proposition de loi sur les cellules souches, qui a été adoptée. Il est effectivement important de prendre en compte cette maladie de Lyme dans nos politiques de santé. Dès lors, nous partageons le principal objectif de cette proposition de loi qui vise à mieux diagnostiquer, soigner et prévenir la borréliose de Lyme.

Toutefois, ayant bien étudié la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui, j’aimerais revenir sur plusieurs points. Tout d’abord, l’article 1er invite le Gouvernement à présenter au Parlement un rapport relatif aux modalités de prise en charge des personnes atteintes de la maladie de Lyme et infections associées, ainsi que ses aspects chroniques, dans un délai de deux ans.

Ce rapport permettrait également de réaliser un bilan de la capacité des unités de consultation et d’accueil en secteur hospitalier ; de faire une évaluation des besoins prévisibles en moyens et personnels qualifiés pour les dix années suivantes ; de dresser une cartographie des zones à risque ; et d’approfondir notre connaissance des modalités de transmissions, notamment par transfusion sanguine ou voie sexuelle, ainsi que des modalités de dépistage et de traitement de la maladie.

Toutefois, l’estimation de l’incidence de la maladie de Lyme en France est d’ores et déjà réalisée par l’Institut de veille sanitaire dans le cadre de ses missions grâce à un réseau de médecins sentinelles, et accessible sur le site internet de l’InVS.

En outre, les travaux permettant d’affiner la connaissance des cas chroniques sont désormais engagés au niveau européen, puisque la Commission européenne a réagi suite au vote d’une résolution européenne au sein de notre hémicycle sur ladite maladie de Lyme en août 2014. Ainsi, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies a confirmé que cette maladie était un problème important et grandissant pour lequel la mise en place d’une surveillance nécessitait une approche harmonisée de la définition de cas de maladie de Lyme et des tests de dépistage.

La Commission européenne précisait également que plusieurs options étaient à l’étude en vue d’une inscription de cette maladie sur la liste des maladies infectieuses soumises à surveillance européenne, dites maladies à déclaration obligatoire, ce qui nécessite notamment la détermination de critères diagnostiques qui ne sont aujourd’hui pas disponibles et qui risquent peut-être de ne pas l’être en deux ans, bien que ce travail soit actuellement mené au niveau européen.

Pour les modalités de dépistage et de traitement de la maladie, ce travail a précisément été sollicité et réalisé à la demande de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, en juillet 2012, comme l’a rappelé Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, lors d’une séance de questions orales sans débat de la semaine passée, en réponse à une question de Mme Chaynesse Khirouni.

En effet, dès juillet 2012, la ministre de la santé a saisi le Haut conseil de la santé publique – le HCPS – afin d’actualiser l’état des connaissances sur cette maladie en termes d’épidémiologie, de techniques de diagnostic et de traitements disponibles. Ce rapport, très complet, a été remis voici quelques semaines et est consultable par tous sur le site du Haut conseil.

Quant aux modalités de transmission par voie sanguine ou sexuelle, cette question relève d’une expertise complémentaire du HCSP, voire de la recherche, et non d’une loi.

L’article 2 inscrit la maladie de Lyme et la formation médicale continue y afférente comme l’un des thèmes nationaux prioritaires mentionnés au 1° de l’article L. 367-3 du code de la santé publique. Il serait donc plus utile de réfléchir aux moyens de sensibiliser l’ensemble des professionnels de santé parallèlement à l’information à destination du public. Là aussi, il me semble que l’élaboration des programmes de formation ne relève pas de la loi.

Pour ce qui concerne les articles 3 et 4, qui instituent un plan national pour la maladie de Lyme mis en oeuvre sur cinq ans, de 2015 à 2020, et comprend notamment la veille sanitaire ou le dépistage, le diagnostic et l’information du public et des professionnels, pour ne citer que ces points-là, je m’interroge sur l’implication ainsi que sur le domaine de recherche et d’action de l’Institut national de veille sanitaire. Là encore, en effet, il me semble qu’il s’agit de l’une des missions déjà actuellement assumées par l’Institut.

Si donc la maladie de Lyme est réellement un problème de santé publique, est-il opportun de découper la santé en tranches ?

Comme je l’ai annoncé au début de mon intervention, le groupe RRDP est convaincu que la maladie de Lyme est un sujet grave, que les pouvoirs publics doivent appréhender avec la plus grande attention. Les récentes explications apportées en commission et lors de la séance de questions orales sans débat du 27 janvier dernier confirment du reste que le sujet est sérieusement pris en compte actuellement et que des actions allant dans le sens de cette proposition de loi ont déjà été prises. En outre, les dispositions de cette dernière ne me semblent pas relever de la loi.

Vous l’aurez donc compris, chers collègues, le groupe des radicaux de gauche et apparentés, tout en confirmant les fondements justifiant la prise en compte de cette maladie, ne votera pas cette proposition de loi qui superpose des éléments aux dispositions déjà existantes et opte pour le renvoi en commission.

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