Intervention de Chaynesse Khirouni

Séance en hémicycle du 5 février 2015 à 15h00
Maladie de lyme — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChaynesse Khirouni :

Nous réaffirmons que la proposition de loi ne répond pas à l’objectif recherché. Je salue à ce propos le sens des responsabilités et de la mesure dont ont fait preuve certains députés de l’opposition qui, comme Bernard Accoyer ou Dominique Dord, nous ont fait part de leur doute quant à l’opportunité de recourir à une loi pour traiter d’une pathologie.

Il n’y a de notre part ni attentisme, ni inertie, bien au contraire : notre groupe considère que les malades attendent des mesures concrètes, qui doivent être mises en oeuvre sans tarder, tant dans le domaine de la prévention que dans celui du diagnostic et des traitements. C’est tout le sens de notre demande de renvoi en commission. Nous nous inscrivons, avec le Gouvernement, dans le temps de l’action.

En effet, cette infection, bien que parfois asymptomatique, peut provoquer des complications durables et invalidantes dans les stades tertiaires de la maladie. Les réactions aux différents traitements antibiotiques sont diverses. Il convient de souligner que l’évolution de la maladie est favorable lorsqu’elle est diagnostiquée et traitée précocement.

Plusieurs expertises ont été conduites en France pour actualiser les connaissances sur cette maladie infectieuse dont le diagnostic, parfois délicat, repose sur un faisceau d’indices à la fois cliniques, biologiques et épidémiologiques. Il demeure donc primordial que les tests de dépistage permettent un diagnostic fiable. Il nous faut progresser sur ce point crucial.

Nul ne peut nier que des controverses existent. Certains médecins, tels les professeurs Peronne et Montagnier, dont l’autorité est grande auprès des malades, s’interrogent sur le mode de contamination et de diffusion de la borréliose de Lyme.

Je veux rappeler après le rapporteur qu’il n’appartient pas aux parlementaires que nous sommes de trancher des controverses médicales et des débats cliniques. Il nous faut rester humbles sur cette question et ne prescrire que des mesures qui relèvent de la loi, et non du règlement ou de la circulaire.

Cependant, compte tenu de cette absence de consensus scientifique, nous pouvons comprendre qu’un certain nombre de malades et leurs familles se tournent vers des médecines parallèles, ou que, confrontés au manque de fiabilité des tests, recherchent un diagnostic à l’étranger, notamment en Allemagne.

Compte tenu des débats et questionnements en cours, la ministre des affaires sociales et de la santé a saisi, dès juillet 2012, le Haut conseil de la santé publique et un rapport a été établi en décembre 2014. C’est pourquoi notre groupe estime que votre demande d’élaboration d’un nouveau rapport dans un délai de deux ans risquerait d’être contre-productive, voire de retarder la mise en oeuvre de mesures concrètes pour prévenir cette maladie vectorielle et pour soigner les malades. Dans ce domaine, le mieux est parfois l’ennemi du bien.

Nous estimons en revanche que le rapport du Haut conseil de la santé publique constitue une expertise particulièrement poussée, qui prend la mesure de cette maladie et formule des préconisations de particulière importance. Ce constat est d’ailleurs partagé par les principales associations de malades, qui estiment que ce rapport contient des avancées incontestables pour les malades.

Le Haut conseil rappelle les précautions à prendre en compte pour le diagnostic, en particulier s’agissant de l’interprétation de la sérologie.

Les difficultés de diagnostic rencontrées peuvent en outre être liées aux performances des tests en raison de la variabilité des réactifs mais, aussi, de la diversité de la famille de bactéries Borrelia en Europe et de la possible interférence d’autres agents infectieux transmis par les tiques.

Le HCSP recommande de revoir les performances des réactifs, notamment, pour ce qui est de leur sensibilité et de leur spécificité analytique en tenant compte de la composition antigénique.

Des travaux sont engagés par la Direction générale de la santé en lien avec le Centre national de référence des Borrelia, l’Institut national de veille sanitaire et l’Agence nationale du médicament et des produits de santé pour identifier les points de fragilité des tests et les possibilités de renforcer leur fiabilité d’emploi.

Pour tenter de préciser le cadre de certaines formes polymorphes persistantes mal définies, le HCSP recommande par ailleurs des études cliniques, épidémiologiques et diagnostiques associées à des études sociologiques ainsi que la mise en place d’essais cliniques randomisés sur les traitements antibiotiques.

De telles études s’inscrivent essentiellement dans des projets de recherches multidisciplinaires portés par des organismes de recherche publics.

C’est pourquoi nous sommes satisfaits que le Gouvernement saisisse l’Institut national de la santé et de la recherche médicale et demandons qu’il mette en oeuvre rapidement les propositions du Haut conseil.

Enfin – c’est pour notre groupe une proposition importante – le Haut conseil préconise d’associer davantage les patients et les associations. Il appelle à accroître le rôle et l’implication des usagers ainsi que de leurs représentants dans l’amélioration du système de santé.

Il s’agit en effet de faire en sorte qu’ils participent davantage à la définition des politiques publiques, notamment, territoriales, d’associer les usagers et leurs proches à la définition des indicateurs de performances du système et de mieux prendre en considération leurs points de vue.

Ainsi, ce partenariat bien conduit pourrait instaurer avec les associations de patients un dialogue et une communication claire sur les incertitudes et les imperfections diagnostiques actuelles, les avancées de l’épidémiologie mais, aussi, les risques éventuels liés à des traitements, à des molécules ou à des associations de molécules.

Mes chers collègues, si nous en partageons les objectifs, force est de constater que la production d’un nouveau rapport, comme le préconise cette proposition de loi, n’est pas une réponse à la hauteur des enjeux. Le temps n’est plus à la rédaction d’un rapport mais à l’application de mesures attendues par les malades et les associations.

Par ailleurs, certaines dispositions de cette proposition de loi ne relèvent pas du domaine législatif…

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