Intervention de Philip Cordery

Séance en hémicycle du 27 novembre 2012 à 15h00
Ancrage démocratique du gouvernement économique européen — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilip Cordery :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux apporter mon soutien plein et entier à cette proposition de résolution relative à l'ancrage démocratique du gouvernement économique européen. Elle représente une chance unique à saisir pour approfondir la réorientation de l'Europe et ancrer le contrôle démocratique, tout en donnant plus de poids aux décisions de notre assemblée et de l'ensemble des Parlements nationaux.

L'approfondissement de l'intégration européenne ne peut qu'aller de pair avec un approfondissement démocratique. C'est le sens de la Conférence interparlementaire figurant à l'article 13 du traité budgétaire et dont nous demandons, aujourd'hui, la mise en oeuvre rapide.

La désaffection de nos concitoyens pour l'Europe est malheureusement aujourd'hui une réalité. Ce n'est ni le projet européen ni le principe de l'intégration qui sont en cause, mais bien leur orientation. Je veux redire ici la grande responsabilité de la droite française, absente de ces bancs, et de la droite européenne, qui ont, ces dernières années, accentué ce désamour en menant des politiques d'austérité destructrices avec, pour seule méthode de concertation, un directoire franco-allemand qui empêchait tout contrôle démocratique.

L'Europe doit revenir en phase avec la réalité : il nous faut une Europe sociale et durable qui protège, une Europe avec une vraie politique économique, budgétaire et monétaire cohérente avec les politiques nationales. La réorientation de l'Europe initiée par François Hollande, en remettant la croissance, la justice et le progrès social au coeur du projet européen, réconciliera les citoyens avec l'Europe. Cette réorientation doit s'accompagner d'un renouveau démocratique. C'est notre mission de parlementaires de conduire ce changement. C'est notre rôle de parlementaires nationaux de nous impliquer davantage pour nous faire l'écho des citoyens dans les décisions européennes et de l'Europe auprès des citoyens. L'Europe ne peut plus être un sujet de débats ponctuels, mais doit se situer au coeur de nos préoccupations d'élus. Une européanisation de nos débats nationaux permettra aussi une politisation des affaires européennes. L'Europe doit devenir un terrain d'affrontements politiques, car il est sain pour la démocratie de proposer des options différentes aux suffrages des citoyens, comme c'est le cas pour les autres niveaux de gouvernance. Dans ce cadre, le Parti socialiste européen proposera un programme commun et un candidat unique à la tête de la Commission européenne lors des prochaines élections européennes, car les citoyens doivent pouvoir se positionner sur le choix de l'Europe qu'ils veulent.

La présente résolution européenne, en proposant la consultation des Parlements nationaux dans le choix des orientations budgétaires et économiques et l'instauration de débats nationaux consacrés à la politique économique et monétaire européenne, répond bien à ce double enjeu : ancrer l'Europe dans nos débats nationaux et consulter les Parlements nationaux dans les choix européens.

Au niveau national, nous pourrions aller plus loin encore en systématisant les débats préalables aux Conseils européens, voire en votant des résolutions pour transmettre notre feuille de route au Gouvernement.

Au niveau européen, l'ancrage démocratique doit passer par un contrôle parlementaire, qui se traduira par une Conférence interparlementaire à laquelle participeront les Parlements nationaux et le Parlement européen. Nous ne voulons pas occulter le Parlement européen, puisque la résolution européenne propose de constituer une commission spéciale composée de représentants de Parlements nationaux de la zone euro et du Parlement européen. Ce nouveau rôle des Parlements nationaux s'inscrira bien en complémentarité de celui du Parlement européen. Il ne s'agit, en aucun cas, de revenir en arrière et au Parlement européen d'avant 1979, mais bien d'avancer vers un nouveau contrôle alliant les niveaux nationaux et européen.

On voit aujourd'hui se dessiner une Europe de cercles concentriques : vingt-sept États sont membres de l'Union européenne ; vingt-six participent à l'espace Schengen ; vingt-cinq ont ratifié le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance ; dix-sept appartiennent à la zone euro ; onze ont approuvé la taxe sur les transactions financières... Le Parlement européen n'est pourtant pas compétent sur tous ces sujets majeurs qui, à l'avenir, ne doivent plus échapper au contrôle démocratique des parlementaires des pays concernés.

C'est pourquoi je propose que l'on réfléchisse à une nouvelle règle à instituer pour toutes les politiques mises en oeuvre dans le cadre de coopérations renforcées ou de traités. Cette règle aurait pour objectif de généraliser le recours aux Conférences interparlementaires de ce type, associant Parlements nationaux des pays concernés et Parlement européen. C'est ce que nous proposons pour la zone euro dans cette résolution, généralisons-le aussi à toutes les coopérations renforcées et à tous les traités.

Le Parlement européen doit contrôler l'exécutif européen, les Parlements nationaux les exécutifs nationaux. Et ensemble, Parlements nationaux et Parlement européen contrôleront les coopérations intergouvernementales.

Dans cette optique, des mécanismes nationaux et européens doivent être instaurés pour garantir cet ancrage démocratique et rapprocher les citoyens de l'Europe. C'est le sens de la résolution européenne que nous voterons aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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