Je reste dubitatif devant toute tentative académique – la vôtre comme d'autres – d'opérer des classements à l'intérieur de l'islam et de l'islamisme. Heureusement que vous avez fait allusion à la fracture entre chiisme et sunnisme, une des données de base de l'analyse de cette religion par nature éclatée qui défie nos modèles intellectuels ! Il y a autant d'islams que d'imams, voire davantage encore ; vos classifications me paraissent donc très peu opérationnelles.
En mission au Caire il y a quelques années, Jacques Myard et moi avons reçu un cours de salafisme de quelques adeptes de ce courant ; nous avons alors découvert qu'il existait même des salafistes pacifistes ! Qualifier le salafisme de violent par essence relève donc d'un abus de raisonnement.
De quel secours cette classification nous est-elle pour comprendre ce qui habite l'esprit de nos jeunes djihadistes qui partent en Syrie en passant par la Turquie – même si je n'ai pas tiré les mêmes conclusions que Marie-Louise Fort de notre mission commune dans ce pays ? Faudrait-il les interroger à leur retour : étiez-vous wahhabite ? djihadiste de quelle tendance ? Cela représente peut-être un intérêt universitaire, mais sûrement pas un intérêt pratique !