Intervention de élie Barnavi

Réunion du 4 février 2015 à 16h00
Commission des affaires étrangères

élie Barnavi, historien, professeur à l'Université de Tel-Aviv, directeur du comité scientifique du Musée de l'Europe à Bruxelles :

Je commencerai par m'adresser à mon bon ami Meyer, qui a fait un discours très passionné et idéologique.

Ce discours, sache-le, je le partage. Je n'aime pas moins mon pays que toi. Je l'ai défendu avec mon sang, avec ma plume, et je continue à le faire. Il faut que tu t'y fasses : on peut aimer ce pays d'une façon différente de celle du Likoud.

Tu dis que la démocratie a toujours raison. Malheureusement, c'est faux. Il faut certes la respecter, car nous n'avons pas d'autre moyen de vivre ensemble. Lorsque le prochain Premier ministre sera élu, je respecterai son pouvoir exactement comme je respecte le pouvoir de celui qui est en place aujourd'hui. Je n'ai pas d'autre choix que de l'accepter : il est le Premier ministre de tous les Israéliens. Suis-je pour autant obligé de marcher au pas cadencé, de croire tout ce qu'il dit et d'accepter tout ce qu'il fait ? Certainement pas !

Si, entre amis, je dis ce que j'ai à dire, c'est que je trouve qu'il y a péril en la demeure et que cet homme et sa majorité nous conduisent dans le mur. Cela me fait peur, pour moi-même et pour mes enfants. J'ai un fils qui sert depuis six mois dans une unité d'élite de l'armée. Je crains que la prochaine fois, à Gaza ou ailleurs, ce ne soit son tour. Je crains de voir sa photo en première page du journal.

Tout cela pour te dire que le lyrisme, je peux aussi en faire !

Mais je suis ici pour parler politique à une assemblée d'hommes et de femmes politiques.

L'équation selon laquelle il suffirait qu'Israël sorte des territoires pour avoir la paix est fausse, dis-tu. C'est possible. Mais que proposes-tu ? Même en admettant que ton pessimisme soit justifié, il faut agir politiquement avec les voisins que nous avons. Il y en a quand même avec qui nous pouvons faire un bout de chemin. Pourtant, nous n'essayons pas.

Certes, nous avons échoué plusieurs fois. Les torts sont-ils tous israéliens ? Certainement pas : ils sont largement partagés. Même Leïla Shahid en conviendra !

Pourquoi M. Terrot nous traite-t-il par le mépris ? Le général de Gaulle, dit-il, ne serait pas, lui, allé chercher l'appui de l'étranger pour signer le traité de l'Élysée. Quelle comparaison ! L'Allemagne était écrasée, le vainqueur lui offrait magnanimement de le rejoindre pour bâtir un autre ordre. Quel rapport avec la situation du Proche-Orient ?

Quel rapport, aussi, entre le mur de Berlin et ce mur que l'on qualifie de « mur de la honte » ? Le mur de Berlin visait à empêcher les gens de partir de chez eux. Le mur de séparation, dont je suis loin d'être un fervent partisan, vise à empêcher les gens de venir de l'autre côté pour commettre des attentats.

Il y a là matière à tout un séminaire. Le mur est une invention de la gauche israélienne.

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